Je me redressai doucement, grimaçante : ma blessure me faisait toujours horriblement mal. Mais ce qui m'inquiétait, c'est que je n'avais toujours pas cicatrisé. Je regardai par la fenêtre : la lumière douce du matin filtrait à travers les rideaux.
- Pourquoi ma blessure ne cicatrise pas ? J'ai dormi combien de temps ? demandai-je, inquiète.
- Tu as été touchée par une arme en argent, répondit tante Lana. Et les loups-garous guérissent très lentement quand c'est le cas. C'est comme si tu étais humaine et que tu t'étais fait poignarder. Tu as dormi pendant trois jours, Sienna. J'ai cru que tu n'allais jamais te réveiller.
- Où est Alexander ? demandai-je aussitôt.
- Je ne sais pas. Il m'a appelée juste après l'attaque, m'a dit de venir au plus vite... et il a disparu. Il a laissé le chasseur enfermé dans la cave. Il n'allait vraiment pas bien quand je suis arrivée.
Encore une fois, il était parti. Me laissant seule, blessée, et un psychopathe enfermé à quelques mètres de moi. Qu'est-ce qu'il se passait ? Pourquoi m'éviter comme ça ?
Je repensai à ce qu'il m'avait dit avant que je perde connaissance. "Mon amour"... Était-il devenu fou ? Ou bien... était-ce moi ?
Des centaines de questions tourbillonnaient dans ma tête. J'allais exploser si je n'obtenais pas de réponses.
Soudain, une odeur familière vint chatouiller mes narines. Mon loup, à l'intérieur, se mit à s'agiter.
- Alexander est là, dis-je soudain à ma tante.
- Comment tu peux savoir ça ? Il n'y a que toi, moi... et le fichu chasseur, répondit-elle, confuse.
- Je reconnais son odeur, tata. Il est là, j'en suis sûre !
Elle renifla l'air avec attention, fronça les sourcils. Puis son regard se figea dans le mien.
- C'est impossible... L'Alpha cache toujours son odeur. Aucun loup ne peut la détecter... sauf...
Elle s'arrêta net, le souffle court.
- Sauf sa partenaire... murmura-t-elle. Et si toi, tu arrives à sentir son odeur... ça veut dire que...
- Enfin tu es réveillée ! Je commençais à perdre espoir !
Alexander venait d'entrer dans le salon, coupant la discussion comme s'il avait entendu chaque mot.
- Je suis réveillée depuis quelques minutes. Tu n'as rien raté, répondis-je froidement. Merci de m'avoir secourue, Alexander...
Son expression soulagée se mua aussitôt en tristesse, puis en colère. Il semblait accablé.
- Lana, vous pouvez vous reposer. Je vais m'occuper d'elle. J'ai apporté quelques plantes pour accélérer sa guérison, dit-il, sans me quitter des yeux.
- Très bien, Alph... Alexander. Appelle-moi si tu as besoin de quoi que ce soit, répondit-elle en quittant la pièce.
Une fois seuls, Alexander referma la porte, s'approcha et s'assit au bord du lit.
- Comment tu te sens ? demanda-t-il doucement.
- J'ai mal, mais je suis en vie. Donc je ne me plains pas, répondis-je en touchant doucement mon pansement.
- Je suis désolé. Je n'aurais jamais dû te laisser seule... murmura-t-il, en me prenant la main.
- Où étais-tu passé ? Je t'ai appelée plusieurs fois, et tu n'as jamais répondu ! demandai-je, la voix pleine de colère.
Il baissa les yeux. Ses paupières tremblaient. Il retenait ses larmes.
- Sienna... Je suis désolé. Je suis parti parce que... je ne supporte pas ta présence. Ton odeur me rend fou. Je ne comprends pas ce qu'il se passe, mais depuis que je t'ai sentie il y a quelques semaines... je n'arrête pas de rêver de toi. De ton odeur. De tes yeux. Je deviens dingue.
Je le fixai, bouche bée.
Il faisait les mêmes rêves que moi.
Pour la première fois, il semblait fragile. Et pour un Alpha, c'était loin d'être commun.
- Alors on est deux fous... Parce que j'ai exactement le même problème, avouai-je à mon tour.
Je ne savais pas pourquoi je venais de dire ça. Mais être près de lui me rassurait. Même si son odeur m'envoûtait complètement... je me sentais bien.
Il me fixa, troublé.
- Comment est-ce que tu peux sentir mon odeur ? murmura-t-il. Un loup normal ne peut pas détecter celle d'un Alpha... à moins que...
Il s'interrompit, se leva d'un bond et sortit de la pièce.
- Je reviens.
Et il disparut.
Il ne m'avait pas donné de réponse. Mais les pièces du puzzle commençaient à s'assembler dans ma tête. Sa phrase, juste avant que je perde connaissance : « Sienna... Je t'en prie, reste avec moi. Ne me quitte pas. Mon amour... »
Les paroles de tante Lana... Le fait que je sente son odeur...
Et si Alexander était mon partenaire ?
Je m'endormis, la tête remplie de cette idée folle.
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Un énorme fracas me réveilla.
Je bondis hors du lit et traversai le couloir. Le salon était sans dessus dessous. De la vaisselle brisée jonchait le sol. Des coussins renversés. Et, au centre du chaos... Alexander, debout, furieux.
- Qu'est-ce qu'il se passe ? demandai-je, inquiète.
- Il se passe que je suis en colère, répondit-il sans se retourner.
- En colère ? Contre moi ? J'ai fait quelque chose de mal ?
- Non, pas contre toi... contre moi-même. Parce que je n'ai pas su te protéger de ce monstre de chasseur. Je n'ai pas vu les signes. Tout était là, sous mes yeux.
- Ce n'est pas ta faute. On ne pouvait pas prévoir qu'il allait m'attaquer...
- Bien sûr que si, c'est ma faute ! J'aurais dû comprendre plus tôt... Ton odeur, mes rêves... tout me criait que tu étais ma partenaire ! Et au lieu d'assumer, j'ai fui. Parce que tu me rends fou, Sienna. Mais j'aurais dû être là, et pas fuir comme un lâche !
Il se tourna enfin vers moi, les yeux brillants.
- Les rêves, ton lien avec mon odeur... ce sont les signes. On est liés, Sienna. Et il est de mon devoir de te protéger. Parce que tu es ma femme.
Ses mots me percutèrent de plein fouet.
Il ne mentait pas.
Et moi... je ne savais plus quoi penser.i