Il m'a repoussé, maintenant il me traque
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Chapitre 4

« Il est fou ! Il vient de m'attaquer ! » s'étouffe Hugo, du sang bouillonnant de ses narines. « Buster m'a mordu, et il est devenu complètement dingue ! »

Charlotte se précipite aux côtés d'Hugo, l'aidant à se relever, son expression un mélange de peur et de dégoût en me regardant.

Je ne dis rien. Il n'y a pas de mots. Mon regard passe au-delà d'elle, vers le patio en contrebas. Vers le petit corps immobile.

Je descends les escaliers en titubant, les dépassant, chaque pas une agonie. Je sors dans le jardin alors qu'une bruine froide commence à tomber. Je m'agenouille à côté de Buster, mes mains planant au-dessus de sa forme brisée, effrayé de le toucher, de confirmer ce que je sais déjà.

Ses yeux sont ouverts, vitreux. Il est parti.

Des sanglots secouent mon corps, violents et silencieux. J'enlève ma veste et l'enveloppe doucement dedans. Je le porte jusqu'au vieux chêne au bord de la propriété, l'endroit où nous jouions.

À mains nues, je creuse. La terre froide et humide s'accumule sous mes ongles. La pluie plaque mes cheveux sur mon crâne. Je creuse jusqu'à ce que mes doigts soient à vif et saignent.

Je le dépose dans la tombe peu profonde.

« Je suis désolé, mon grand », je murmure, ma voix se brisant. « Je suis tellement désolé de ne pas avoir pu te protéger. »

Je retourne à la maison, trempé et frissonnant, mon cœur une caverne vide dans ma poitrine. Hugo est assis sur le canapé, une poche de glace sur le visage, choyé par une femme de chambre. Charlotte n'est nulle part en vue.

Il me voit et ses yeux brillent. « Tu te sens mieux maintenant que tu as eu ta petite crise de nerfs ? »

Je passe devant lui sans un mot.

Plus tard dans la nuit, la vraie torture commence. C'est une série de petites coupures cruelles.

Hugo renverse « accidentellement » une tasse de café brûlant sur ma main alors que je passe à côté de lui dans la cuisine.

« Oh, quelle maladresse de ma part », dit-il, sans la moindre trace de remords.

Je pousse un cri, retirant ma main. La peau est déjà rouge et boursouflée.

Charlotte entre à ce moment précis. Pendant une fraction de seconde, je vois une lueur d'inquiétude dans ses yeux, l'ancienne Charlotte qui se serait précipitée pour la trousse de premiers secours.

« Mon amour, mon nez me lance à nouveau », gémit Hugo, coupant court à sa réaction. « Pourrais-tu m'apporter un peu plus de glace ? »

Son attention se tourne vers lui. L'inquiétude pour moi s'évanouit. « Bien sûr, mon chéri. »

Elle me tourne le dos, son attention entièrement sur lui, me laissant passer ma main brûlée sous l'eau froide, la douleur un écho sourd de la blessure béante dans mon âme.

C'est ça. C'est le moment où je sais avec certitude. Il n'y a plus rien pour moi ici. Aucun espoir d'être vu, d'être compris.

Je suis un fantôme dans ma propre maison.

Je vais dans ma nouvelle petite chambre et je sors ma valise. Je fais mes bagages méthodiquement. Quelques vêtements de rechange. Un livre de poche usé. La lettre d'acceptation.

Le majordome de la maison, un vieil homme aimable nommé Arthur qui est avec Charlotte depuis des décennies, me trouve près de la porte.

« Monsieur Alex ? Où allez-vous ? » demande-t-il, son visage empreint d'inquiétude.

« Je pars, Arthur », dis-je. « Je vais à l'université. »

« Mais... est-ce que Madame Moreau est au courant ? »

« C'est mieux ainsi », je lui dis, en lui tendant une petite enveloppe scellée. « S'il vous plaît... assurez-vous simplement qu'elle l'ait. Mais pas aujourd'hui. Peut-être dans une semaine. »

Il regarde l'enveloppe, puis de nouveau vers moi, ses yeux tristes. Il sait. Il a tout vu.

« Prenez soin de vous, mon garçon », dit-il doucement.

Je hoche la tête, incapable de parler au-delà de la boule dans ma gorge.

Je sors par la porte sans regarder en arrière. Mais je ne vais pas à l'aéroport. Pas encore.

Je prends un taxi pour le Palais de Justice.

Le bâtiment est froid et impersonnel. Je m'approche du guichet du greffier.

« Je dois déposer une demande d'adoption simple », dis-je, la voix ferme.

La greffière me regarde, puis les formulaires. Elle voit mon nom, Alexandre Chevalier, et le nom du parent adoptant, Charlotte Moreau. Elle voit la procuration, signée par Charlotte des années auparavant, me donnant le contrôle de mes affaires éducatives et légales une fois que j'aurais dix-huit ans. Un document né de la confiance, maintenant une arme de rupture.

« Vous êtes sûr de vous, jeune homme ? » demande-t-elle, une pointe de gentillesse dans la voix.

Je pense au visage de Charlotte, tordu de dégoût. Je pense au corps de Buster sur la pierre froide. Je pense au sourire triomphant d'Hugo.

« Je n'ai jamais été aussi sûr de quoi que ce soit de ma vie », dis-je.

Je signe les papiers. Le stylo semble lourd dans ma main. Je repousse les documents vers la greffière.

Elle les tamponne. Un son dur et définitif.

C'est fait.

Je ne suis plus Alexandre Chevalier, le pupille obsessionnel. Je suis Alexandre Moreau, son fils. Un titre qui érige un mur infranchissable entre nous, un cadeau final et douloureux qui la forcera à me voir non pas comme un prétendant, mais comme un membre de sa famille. Une limite qu'elle peut comprendre.

C'est la chose la plus cruelle et la plus gentille que j'aie jamais faite.

                         

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