Il m'a repoussé, maintenant il me traque
img img Il m'a repoussé, maintenant il me traque img Chapitre 2
2
Chapitre 5 img
Chapitre 6 img
Chapitre 7 img
Chapitre 8 img
Chapitre 9 img
Chapitre 10 img
Chapitre 11 img
Chapitre 12 img
Chapitre 13 img
Chapitre 14 img
Chapitre 15 img
img
  /  1
img

Chapitre 2

Je me réveille dans mon propre lit. Le blanc stérile d'un hôpital est un souvenir d'une autre vie. Cette fois, ma punition est plus personnelle.

Mon bras est bandé, mais le travail est maladroit, rageur. Ma jambe palpite d'une douleur profonde et persistante. Charlotte ne gaspillerait pas un médecin pour moi pour une « cascade » de ce genre.

J'attrape mon téléphone. L'écran est une lueur dans la pénombre de la pièce. Une alerte d'actualité est la première chose que je vois.

« Des géants de la tech amoureux ? Charlotte Moreau et Hugo Fournier - Une nuit de drame et de romance. »

Sous le titre, une photo. Charlotte et Hugo quittant l'hôtel. Il a son bras autour d'elle, un geste protecteur. Elle se penche contre lui, le visage tourné vers le sien. Ils ont l'air parfaits ensemble.

Une vague de nausée me frappe, si vive qu'elle me coupe le souffle. C'est ce que je voulais. C'est le prix à payer.

Mes yeux dérivent vers mon bureau. Une épaisse enveloppe d'une université d'Aix-en-Provence y est posée. La lettre d'acceptation pour leur école vétérinaire. La dernière fois, je l'ai jetée sans une seconde de réflexion. Mon monde était ici, avec elle.

Maintenant, c'est ma seule issue de secours.

Un léger coup à la porte me fait sursauter. Elle s'ouvre, et Hugo Fournier entre. Il porte un bol de soupe, un sourire doux et concerné sur le visage.

« Salut, gamin », dit-il doucement. « Charlotte est prise en réunion, mais elle voulait que je m'assure que tu manges quelque chose. Elle s'inquiète. »

Il pose le bol sur ma table de chevet. La vapeur s'élève, emportant une odeur familière, écœurante de douceur.

Des cacahuètes.

Je suis mortellement allergique aux cacahuètes. Une seule cuillerée pourrait me fermer la gorge.

Hugo le sait. Bien sûr qu'il le sait. Dans ma vie passée, j'ai vu le dossier détaillé que son assistante tenait sur moi. Allergies, peurs, antécédents médicaux. Hugo se serait fait un devoir de connaître mes faiblesses.

« Je n'ai pas faim », dis-je, la voix rauque.

Le sourire d'Hugo se crispe à peine. « Allez, Alex. Ne sois pas difficile. C'est Charlotte qui a préparé ça elle-même avant de partir ce matin. Elle sera tellement déçue. »

Un mensonge. Charlotte n'a pas cuisiné un repas depuis plus d'une décennie. Mais c'est un mensonge conçu pour faire mal.

Juste à ce moment-là, la porte s'ouvre à nouveau. C'est Charlotte. Elle a l'air fatiguée, stressée, mais elle force un petit sourire quand elle voit Hugo.

« Je vois que tu joues les infirmiers », lui dit-elle, sa voix s'adoucissant.

Puis elle me regarde, et son visage se durcit. « Qu'est-ce qui ne va pas encore ? Alex, Hugo est gentil avec toi. La moindre des choses serait d'être reconnaissant. »

Je la regarde, une supplication désespérée et silencieuse dans les yeux. Tu sais. Tu dois te souvenir. C'est elle qui m'a emmené aux urgences quand j'avais dix ans après avoir mangé un biscuit à une fête d'école. Elle m'a tenu la main tout le temps, me chuchotant qu'elle ne laisserait jamais rien m'arriver.

Mais la femme qui se tient devant moi n'est pas la même personne. L'amour l'a rendue aveugle. Ou peut-être que mon obsession a brisé cette partie d'elle il y a longtemps.

Il n'y a aucune reconnaissance dans ses yeux. Seulement de l'impatience.

C'est le test. Et je dois y échouer. Pour son bien.

D'une main qui semble déconnectée de mon corps, je prends la cuillère. Je puise le liquide crémeux.

Je le porte à mes lèvres et j'avale.

La réaction est violente et immédiate. Ma gorge se serre. C'est comme si elle était remplie de gravier brûlant. Je ne peux plus respirer. Des sifflements s'échappent de mes lèvres alors que je laisse tomber le bol, griffant mon cou.

Mon Anapen. Il est dans le tiroir de mon bureau. Je titube vers lui, ma vision se brouillant.

Je parviens à ouvrir le tiroir, mes doigts cherchant maladroitement l'auto-injecteur.

« Regarde, il va chercher quelque chose ! » crie Hugo, un tremblement de panique dans la voix.

Il « trébuche » en avant, me heurtant. Ma main a un spasme. L'Anapen s'envole de ma prise, dérape sur le parquet et glisse sous le lit.

Je tombe à genoux, cherchant de l'air. Je lève les yeux vers Charlotte, la main tendue, une supplication silencieuse pour de l'aide.

Elle voit un monstre.

Elle me voit, un garçon « violent et instable », tendant la main vers l'homme qu'elle aime.

« Alex, arrête ! Tu es fou ! » hurle-t-elle, son visage un masque d'horreur et de fureur.

Elle attrape son téléphone, non pas pour appeler le 15, mais pour composer le numéro abrégé de la sécurité.

« Il fait une autre crise. Emmenez-le dans la chambre froide au sous-sol. Laissez-le se calmer. »

La chambre froide. C'était une punition pour rire quand j'étais enfant, après avoir cassé un vase. J'avais une peur bleue du noir, et elle m'enfermait une minute avant d'ouvrir la porte en riant et de me prendre dans ses bras.

Maintenant, c'est un tombeau.

Deux gardes m'attrapent les bras. Je ne peux pas me débattre. Mes poumons sont en feu. Des points noirs dansent devant mes yeux.

Alors qu'ils me traînent hors de la pièce, j'entends la voix apaisante d'Hugo.

« Ce n'est rien, Charlotte. Il ne le pensait pas. Il n'est juste pas bien. »

La dernière chose que je vois avant qu'ils ne claquent la lourde porte isolée, c'est Charlotte, laissant Hugo la prendre dans une étreinte réconfortante, me tournant complètement le dos.

Le clic de la serrure résonne dans l'obscurité glaciale. Puis, il n'y a plus que le son de ma propre respiration, rauque et défaillante.

            
            

COPYRIGHT(©) 2022