J'ai secoué la tête, essayant de rester lucide.
« Non. C'est ma sœur. Elle pensait bien faire. »
Il a ri. Un rire méprisant.
« Ta sœur ? Quelle bonne excuse. Vous êtes pareilles toutes les deux. »
Je n'avais pas la force de me disputer. Le poison de Manon faisait son effet. Mon seul objectif était de les faire partir.
Je me suis appuyée contre le mur pour ne pas tomber.
« Prends-la et pars. C'est tout ce que je te demande. »
Mon corps criait. Il voulait que je me jette sur quelqu'un. N'importe qui. La vision de Marc, si proche, était une torture.
Non. Pas lui. Jamais.
J'ai attrapé le bras de Chloé et l'ai tiré vers le bord du lit, avec le peu de force qu'il me restait.
« Aide-la. Elle est à toi. »
Marc m'a regardée, surpris par mon geste. Il a hésité un instant, puis a passé un bras sous les genoux de Chloé et l'autre derrière son dos. Il l'a soulevée sans effort.
Elle a murmuré son nom dans son sommeil.
« Marc... »
Le cœur de Marc a dû fondre. Le mien s'est brisé une seconde fois.
Même dans cette vie, son premier mot était pour lui.
« Pars maintenant, » j'ai réussi à articuler.
Il m'a jeté un dernier regard, un mélange de méfiance et de triomphe, avant de sortir de la chambre en emportant Chloé.
La porte s'est refermée.
Je me suis effondrée sur le sol.
La solitude et la chaleur m'ont submergée. Je pleurais, non pas de tristesse, mais de frustration et de douleur physique.
Je devais sortir d'ici. Je ne pouvais pas rester seule.
J'ai rampé jusqu'à la porte, je l'ai ouverte et je suis sortie dans le couloir.
Tout était flou. Les lumières du couloir me faisaient mal aux yeux.
Je suis descendue en titubant vers le bar de l'hôtel.
Il fallait que je boive quelque chose de froid. N'importe quoi.
J'ai poussé la porte du bar. L'endroit était chic, feutré. Il n'y avait presque personne.
Je me suis dirigée vers le comptoir, mais mes jambes ont lâché.
Je suis tombée.
Juste avant de toucher le sol, des bras forts m'ont rattrapée.
Une voix de femme, calme et posée, a dit : « Ça ne va pas ? »
J'ai levé la tête.
À travers le brouillard qui emplissait mon esprit, j'ai vu un visage. Des traits fins, des yeux sombres et intelligents, des cheveux noirs coupés courts.
Elle portait un tailleur-pantalon impeccable.
« J'ai... chaud, » j'ai bafouillé.
La femme a froncé les sourcils. Elle a posé sa main sur mon front.
« Vous êtes brûlante. Vous avez de la fièvre ? »
« Non... c'est... autre chose. »
Je me suis accrochée à son bras comme à une bouée de sauvetage. L'odeur de son parfum, subtil et boisé, a calmé un peu la tempête en moi.
« Aidez-moi, s'il vous plaît. »
Elle m'a regardée droit dans les yeux. Elle a dû voir le désespoir dans mon regard.
Sans un mot, elle a passé mon bras sur ses épaules et m'a aidée à me relever.
« Je prends une chambre ici. Venez, je vais vous aider. »
Je l'ai suivie sans réfléchir. Chaque pas était une épreuve.
Dans l'ascenseur, je me suis appuyée contre elle. Mon corps réagissait à sa proximité, à la chaleur de sa peau à travers le tissu de sa chemise.
C'était à la fois un soulagement et une nouvelle forme de torture.
Elle a ouvert la porte de sa suite et m'a conduite jusqu'au lit.
« Asseyez-vous. Je vais vous chercher de l'eau. »
Quand elle est revenue, je tremblais de façon incontrôlable.
Elle a posé le verre sur la table de chevet et s'est assise à côté de moi.
« Qu'est-ce qui vous arrive ? Est-ce que quelqu'un vous a... ? »
« Ma sœur, » j'ai chuchoté. « Elle a voulu m'aider. »
Je l'ai regardée. Elle était mon seul espoir de ne pas devenir folle.
Poussée par une force que je ne contrôlais pas, je me suis penchée et je l'ai embrassée.
Elle a été surprise, mais elle n'a pas reculé.
Mes mains se sont agrippées à sa chemise.
La suite de la nuit est un souvenir confus, un mélange de plaisir et de douleur, de peau contre peau, de soupirs et de murmures.
Je me souviens juste d'une chose claire : une petite cicatrice en forme de lune sur son épaule gauche.
Quand je me suis réveillée, le soleil filtrait à travers les rideaux.
J'étais seule dans le lit.
La panique m'a saisie. J'ai regardé autour de moi. La chambre était impeccable, à part le lit défait.
Mes vêtements étaient pliés sur une chaise.
Je me suis habillée en vitesse, la honte me montant aux joues.
Qu'est-ce que j'avais fait ?
En mettant mes chaussures, j'ai remarqué que mon collier, un simple pendentif que ma mère m'avait offert, n'était plus à mon cou.
J'ai cherché partout. Sur le lit, par terre, dans la salle de bain.
Rien.
Je l'avais perdu. Ou peut-être que je l'avais laissé ici.
Je ne pouvais pas rester. Je ne pouvais pas affronter la femme de la nuit dernière.
J'ai quitté la chambre sur la pointe des pieds, comme une voleuse.