La lame s'est enfoncée profondément dans mon épaule. Une douleur blanche, aveuglante, a explosé dans tout mon corps. J'ai crié, un son étranglé qui s'est perdu dans le tumulte général.
Je me suis effondrée au sol, le sang coulant abondamment de ma blessure, tachant la robe de soirée coûteuse. J'ai levé les yeux vers Marc. Il n'y avait aucune trace de remords sur son visage. Juste le soulagement intense de voir que Sophie était saine et sauve.
Il s'est agenouillé, non pas à côté de moi, mais à côté de Sophie, la prenant dans ses bras, la réconfortant. "Ça va, mon amour ? Tu n'as rien ?"
Il m'a complètement ignorée. J'étais un objet cassé, jeté de côté après avoir rempli sa fonction. Je perdais conscience, le sol de marbre froid sous ma joue, le son de leurs voix s'éloignant.
Je me suis réveillée dans une chambre d'hôpital, encore une fois. Mon épaule était bandée, douloureuse. Marc était là, l'air contrit.
"Aurore... Je suis désolé," a-t-il commencé.
Sa voix était comme du poison dans mes oreilles. Je n'ai pas répondu. J'étais lasse, vide. La douleur physique était un lointain écho de la dévastation de mon âme.
"Je ne voulais pas que ça arrive," a-t-il continué, son ton devenant de plus en plus faux. "C'était un réflexe..."
Un réflexe. Sacrifier la femme qu'il prétendait aimer pour sauver celle qu'il aimait vraiment. La vérité était là, nue et brutale.
Il a essayé de me toucher, de prendre ma main. J'ai reculé avec une telle force que j'ai failli tomber du lit. "Ne me touche pas," ai-je sifflé.
Il a sorti une autre boîte de sa poche. Encore des bijoux. Une parure encore plus chère que la précédente. "C'est pour toi. Pour... l'incident."
J'ai regardé la boîte, puis son visage. Je n'ai ressenti que du dégoût. J'ai fait un geste pour balayer la boîte, mais la douleur à mon épaule m'a arrêtée net.
Pire encore, j'ai été forcée d'accepter une nouvelle humiliation. Édouard et Sophie, pour "étouffer l'affaire" et éviter un scandale, ont décidé que je devais publiquement pardonner à mon agresseur, dans le cadre d'une conférence de presse sur la "résilience et le pardon". J'étais la victime, et on me forçait à jouer le rôle de la sainte.
Édouard est venu me voir à l'hôpital. Il se tenait au pied de mon lit, son regard froid et calculateur. Il n'a pas dit un mot de réconfort. Il m'a juste regardée comme si j'étais un problème à résoudre.
"Tu feras cette conférence de presse, Aurore. Tu souriras et tu diras que tu ne portes aucune rancune. C'est le meilleur moyen de clore cet incident."
La véritable humiliation a commencé lors de cette conférence. J'étais là, sur une estrade, sous les flashs des photographes, mon bras en écharpe. On m'a forcée à serrer la main de l'homme qui avait failli me tuer, un homme qui était lui-même une victime du système que représentait Édouard.
Puis, Édouard a eu une idée encore plus perverse. Pour prouver au monde à quel point ils étaient "bienveillants", lui et Sophie ont organisé un gala de charité pour les "victimes de la violence en entreprise". Et j'étais l'invitée d'honneur.
On m'a forcée à porter une robe sans manches, exposant mon pansement à la vue de tous. On m'a forcée à monter sur scène, à parler de mon "expérience" et de l'importance du "pardon". J'ai essayé de refuser, de me débattre. Mais ils ont menacé de révéler de fausses informations sur ma famille, de les ruiner. J'étais piégée.
Sur scène, sous les projecteurs, j'ai senti des centaines de regards sur moi. J'ai vu Édouard et Sophie au premier rang, souriants, savourant leur triomphe. J'ai vu Marc, un peu plus loin, le visage impassible.
Mon discours était un tissu de mensonges écrits par leur service de communication. Ma voix tremblait. Chaque mot était une torture. C'était la dépossession totale de ma dignité, de ma vérité. J'étais leur marionnette, dansant pour leur gloire sur la scène de ma propre tragédie. Mon corps, mon histoire, tout m'avait été volé. Je n'étais plus rien.