"Je ne t'ai pas donné la permission de partir."
La voix de Léa, tranchante comme une lame, m'a clouée sur place. Je me suis retournée lentement. Elle se tenait au milieu de la pièce, les bras croisés, un air de défi sur son visage parfait. Marc, à ses côtés, me regardait avec un amusement cruel.
"Qu'est-ce que tu veux, Léa ?" ai-je demandé, ma voix plus lasse que je ne l'aurais voulu.
"Marc a soif," a-t-elle dit, comme si c'était une évidence. "Va lui préparer son thé préféré. Et ne te trompe pas dans les dosages cette fois."
C'était une humiliation délibérée. Elle savait que je détestais faire ça, que chaque geste pour servir Marc était une torture. Mais je n'avais pas la force de me battre. Pas cette fois.
J'ai acquiescé silencieusement et je me suis dirigée vers la cuisine. Alors que je passais devant eux, Marc a tendu le pied. Je n'ai pas pu l'éviter et j'ai trébuché, tombant lourdement sur le sol.
Un petit objet métallique est tombé de ma poche et a roulé sur le carrelage. C'était un médaillon en argent, simple et usé. Le seul souvenir que j'avais de ma mère.
Avant que je ne puisse le ramasser, la botte de Marc s'est abattue dessus. Un craquement sec a retenti. Il a écrasé le médaillon sans la moindre hésitation, le réduisant en un morceau de métal tordu et méconnaissable.
J'ai regardé les débris avec des yeux vides. Une colère froide a commencé à monter en moi, mais je l'ai réprimée. À quoi bon ?
"Oh, pardon," a dit Marc avec une fausse sollicitude. "Je ne l'avais pas vu. Tu ne devrais pas laisser traîner tes babioles."
Il s'est tourné vers Léa, feignant la douleur. "Chérie, je crois qu'elle m'a fait mal en tombant. Regarde, mon pied."
Léa s'est précipitée vers lui, le visage empreint d'une inquiétude exagérée. "Marc, ça va ? Montre-moi." Elle a fusillé du regard. "Camille, comment oses-tu ? Tu as blessé Marc !"
Son amour pour lui était si aveugle, si inconditionnel. La partialité était si flagrante, si injuste.
"Je n'ai rien fait," ai-je murmuré, mais mes mots se sont perdus dans le vide.
"Ça suffit !" a crié Léa. "Tu deviens de plus en plus insupportable. Tu mérites une punition."
Elle a claqué des doigts. Deux gardes du corps, qui attendaient dans le couloir, sont entrés. Ils m'ont saisie par les bras sans ménagement.
"Emmenez-la dans l'entrepôt," a ordonné Léa d'une voix glaciale. "Et donnez-lui une leçon qu'elle n'oubliera pas."
Ils m'ont traînée hors de la maison, jusqu'à un vieil entrepôt humide et sombre au fond du jardin. L'un des gardes a sorti un fouet. Le cuir a sifflé dans l'air avant de s'abattre sur mon dos.
La douleur était fulgurante, brûlante. J'ai serré les dents pour ne pas crier. Un coup, puis deux, puis dix. Mon dos est devenu une plaie à vif, le sang tachant mes vêtements.
Quand ils ont eu fini, ils m'ont jetée sur le sol en béton froid et ont verrouillé la porte derrière eux, me laissant dans l'obscurité totale.
Allongée là, dans la saleté et la douleur, je sentais le désespoir m'envahir à nouveau. Mais cette fois, quelque chose avait changé. La résignation avait laissé place à une lueur de haine.
J'avais tout donné pour Léa. Je l'avais protégée, aimée, et j'étais morte pour elle huit fois. Et voilà ma récompense. La trahison, la torture, l'humiliation.
Mon cœur était glacé. L'amour que j'avais pour elle s'était transformé en cendres. Il ne restait plus que le désir ardent de m'échapper. De fuir cet enfer, pour de bon.
Plus tard, la porte s'est ouverte avec fracas. Léa se tenait sur le seuil, la lumière du jour dessinant sa silhouette. Son visage était tordu par la colère.
"Marc a de la fièvre," a-t-elle dit, sa voix sifflante. "C'est de ta faute. Tu vas le payer, Camille. Tu vas le payer très cher."
Elle s'est approchée, et j'ai vu dans ses yeux une promesse de souffrance encore plus grande. Mon cauchemar était loin d'être terminé.