Chapitre 4

La nuit a été un enfer. Je suis restée éveillée, le fixant dormir paisiblement à côté de moi. L'homme que j'aimais était un monstre. Un étranger.

Le lendemain matin, une résolution froide s'était installée en moi.

Je ne lui ai pas adressé la parole. J'ai pris ma douche, je me suis habillée, et je suis partie travailler.

Mais je ne suis pas allée au bureau.

Je suis allée à la banque. J'ai ouvert un nouveau compte à mon nom. J'ai ensuite appelé les ressources humaines de mon entreprise et j'ai fait modifier mes informations de paiement.

Mon prochain salaire serait à moi. Uniquement à moi.

Puis, j'ai pris un rendez-vous avec un avocat spécialisé dans les divorces.

La journée est passée dans un brouillard. Je fonctionnais en pilote automatique, mon esprit entièrement concentré sur une seule chose : la fin.

Quand je suis rentrée, Julien m'attendait. Il avait l'air contrarié.

« Tu ne réponds pas à mes messages. J'ai essayé de t'appeler. »

« J'étais occupée. »

« Chloé, arrête ce jeu. Je sais que tu es fâchée pour hier. D'accord, j'ai peut-être surréagi. Tiens. »

Il m'a tendu la carte de crédit.

« Je l'ai débloquée. On oublie cette histoire, d'accord ? »

Il pensait pouvoir acheter mon silence, ma soumission, avec ma propre carte.

J'ai ri. Un rire sec, sans joie.

« C'est trop tard, Julien. »

Son visage s'est assombri.

« Qu'est-ce que tu veux dire, c'est trop tard ? »

« Je veux le divorce. »

Le mot est resté suspendu dans l'air entre nous.

Il m'a dévisagée, incrédule. Puis, il a éclaté de rire. Un rire méprisant.

« Le divorce ? Pour une stupide histoire de gâteaux ? Tu es ridicule. Tu es trop émotive, Chloé. C'est pour ça que je dois gérer l'argent, tu n'es pas capable de prendre des décisions rationnelles. »

Il utilisait mes émotions contre moi. Le gaslighting dans sa forme la plus pure.

« Ça n'a rien à voir avec les gâteaux. Ça a à voir avec Manon. Avec ton contrôle. Avec tes mensonges. »

« On ne divorce pas pour ça », a-t-il dit, le ton soudainement dur. « On a un projet. Un avenir. Tu ne vas pas tout gâcher sur un coup de tête égoïste. »

« Égoïste ? C'est moi qui suis égoïste ? »

Ma voix a monté. La colère, si longtemps contenue, a explosé.

« Je me sacrifie pour toi, pour nous, et pendant ce temps, tu couvres ta maîtresse de cadeaux de luxe avec mon argent ! Qui est l'égoïste, Julien ? »

J'ai atteint un point de non-retour. La Chloé soumise était morte dans ce bureau de poste, devant ses collègues.

Une nouvelle Chloé était née. Et elle n'avait plus peur.