L'Échappée Belle d'Amélie
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Chapitre 1

Le téléphone a sonné, brisant le silence de son appartement à Lisbonne. Amélie a ignoré l'appel. Elle savait qui c'était. Son père, Jean-Jacques. Une autre tentative pour la faire rentrer dans le rang. Elle a regardé par la fenêtre les toits colorés de l'Alfama, une vie qu'elle avait choisie, loin de Bordeaux et de ses vignobles. Une vie de bohème, libre et sans contraintes. Le téléphone s'est tu, puis a recommencé à sonner, insistant. Elle a soupiré et a décroché.

« Quoi ? »

« Tu rentres. Demain. »

La voix de son père était froide, sans appel. Comme toujours.

« Je ne rentrerai pas. Je suis bien ici. »

« Tu n'as pas le choix, Amélie. La fusion avec Valois & Fils est sur le point d'être signée. Ta présence est requise. Ta réputation de fille rebelle nous fait du tort. »

« Ma réputation ? Ou le fait que je te rappelle maman ? »

Un silence glacial a suivi. Amélie savait qu'elle avait touché un point sensible. Sa mère, décédée il y a des années, lui avait laissé un héritage conséquent, 500 000 euros, bloqué dans un fonds en fiducie que son père contrôlait. C'était son seul levier.

« Ne parle pas de ta mère. »

« Alors laisse-moi tranquille. »

« Si tu ne rentres pas, tu peux dire adieu à ton héritage. Chaque centime. »

Le chantage. Son arme favorite. Amélie a senti la colère monter. Cet argent, c'était tout ce qui lui restait de sa mère. C'était sa liberté future.

« C'est mon argent. »

« Il est sous mon contrôle jusqu'à tes trente ans. Ou ton mariage. Tu connais les termes. »

Amélie a fermé les yeux. Elle s'est souvenue du jour où son père avait présenté sa nouvelle femme, à peine un an après la mort de sa mère. Et avec elle, sa fille, Chloé. Douce, fragile Chloé, qui avait immédiatement conquis le cœur de tout le monde, y compris celui de son père. Amélie était devenue l'ombre, la rebelle, le problème à gérer.

« Très bien. Je rentre. Mais à mes conditions. »

« Tu n'es pas en position de négocier. »

« On verra. »

Elle a raccroché, le cœur lourd. Sa liberté à Lisbonne était terminée.

Deux jours plus tard, elle n'était pas à Bordeaux, mais à Lorient, en Bretagne. Son père ne l'avait pas ramenée à la maison. Il l'avait envoyée dans un camp d'entraînement des Commandos Marine. Pour la « discipliner ».

« Trois mois », lui avait-il dit au téléphone, sa voix triomphante. « Sous la supervision du Capitaine Étienne Valois. Le fils de mon partenaire. Il saura te mater. »

Amélie a regardé le portail de la base militaire, un sentiment d'impuissance la submergeant. C'était pire que tout ce qu'elle avait imaginé. Un homme en uniforme s'est approché. Grand, le visage dur, les yeux d'un bleu glacial. Il la toisait comme si elle était une nuisance.

« Amélie ? Je suis le Capitaine Valois. Suivez-moi. »

Sa voix était aussi froide que son regard. Il n'a pas attendu sa réponse, tournant les talons. Elle a attrapé sa valise et l'a suivi, luttant pour ne pas trébucher sur le gravier. Il n'a pas ralenti. Il n'a même pas jeté un regard en arrière. Arrivé devant un baraquement austère, il s'est arrêté.

« Votre chambre. L'entraînement commence demain à 0500. Ne soyez pas en retard. »

Il allait partir, mais il a remarqué sa valise. Il a froncé les sourcils, puis a fait un signe à un jeune soldat qui passait.

« Aidez-la avec ça. »

Le ton était un ordre, pas une demande. Puis il est parti sans un autre mot. Ce petit geste inattendu, cette contradiction avec sa froideur apparente, a semé une graine de confusion dans l'esprit d'Amélie.

Les jours suivants ont été un enfer. Des réveils avant l'aube, des courses épuisantes, des parcours du combattant interminables. Amélie, qui n'avait jamais fait d'exercice de sa vie, souffrait. Mais elle serrait les dents. Elle refusait de donner à son père et à Étienne la satisfaction de la voir échouer.

Et puis, elle a commencé à le regarder. Vraiment le regarder. La façon dont il se déplaçait, avec une assurance et une puissance contenues. La rigueur de ses ordres, la discipline qu'il incarnait. Malgré elle, elle était fascinée. Une attirance dangereuse a commencé à naître.

Elle a décidé de tester le terrain. Lors d'un parcours du combattant, en passant un mur d'escalade, elle a fait semblant de glisser et a poussé un petit cri.

« Ma cheville ! »

Il était près d'elle en quelques secondes. Il s'est agenouillé, ses doigts experts palpant sa cheville sans la moindre hésitation. Son contact était professionnel, impersonnel, mais il a envoyé un frisson le long de la colonne vertébrale d'Amélie.

« Il n'y a rien. Relevez-vous. Continuez. »

Il l'a rejetée sans ménagement. L'humiliation a rougi ses joues. Elle s'est relevée, boitillant légèrement pour la forme, le cœur battant de déception.

Quelques jours plus tard, elle a compris. Une voiture élégante s'est garée près du terrain d'entraînement. Une jeune femme en est sortie. Chloé. Sa demi-sœur par alliance. Elle a marché directement vers Étienne, un sourire doux sur les lèvres. Il lui a souri en retour, une chaleur dans les yeux qu'Amélie n'avait jamais vue.

Un soldat à côté d'Amélie a murmuré :

« C'est sa fiancée, Chloé. Une fille incroyable. Elle lui a sauvé la vie il y a des années, lors d'un accident de voilier. Il s'est presque noyé. Il lui est redevable à vie. »

Le monde d'Amélie s'est effondré. Une dette de vie. Comment pouvait-elle rivaliser avec ça ? La jalousie, amère et puissante, l'a envahie.

Cette nuit-là, une tempête bretonne s'est déchaînée. Le vent hurlait, la pluie frappait violemment les fenêtres. C'était l'occasion parfaite. Trempée jusqu'aux os, les cheveux collés au visage, elle a couru jusqu'à la porte du petit pavillon d'Étienne. Elle a frappé, tremblant de froid et d'anticipation.

Il a ouvert. En la voyant, son visage s'est durci. Le mépris était évident dans ses yeux.

« Qu'est-ce que vous faites ici ? »

« J'ai... j'ai peur de l'orage », a-t-elle balbutié, essayant de paraître vulnérable.

Il l'a regardée de haut en bas, son regard balayant ses vêtements trempés et son expression pitoyable.

« Retournez à votre baraquement. Immédiatement. »

Il lui a claqué la porte au nez. Le son a été plus violent qu'une gifle. Amélie est restée là, sous la pluie battante, l'humiliation et la douleur la transperçant. Les larmes se sont mêlées à la pluie sur son visage.

                         

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