Chapitre 4 Chapitre 4

Chapitre 4

Murmures étouffés. Voix basses, rapides. Comme un secret mal dissimulé. Des mots qui claquent et s'entrelacent, trop vifs pour être innocents. Un prénom, une date, un avertissement.

- Il va frapper bientôt.

Silence.

Sophie retient son souffle. Son cœur tambourine contre ses côtes. Elle est cachée derrière la porte, dans l'ombre, trop proche pour faire marche arrière, trop loin pour entendre tout. Mais ce qu'elle capte suffit à faire naître une tempête en elle. Une trahison. Une attaque imminente.

Un bruit de chaise repoussée brutalement.

- Il faut agir avant qu'il le découvre.

Un frisson la traverse. Qui est « il » ? Antonio ? Un autre ? Elle sent son ventre se tordre. Elle devrait partir, ne pas rester là. Mais ses pieds sont figés.

- Si elle l'apprend...

L'air se fige dans ses poumons. Elle. Elle, c'est elle.

Un grincement. Un pas. Une main qui s'approche de la poignée. Sophie recule d'un coup, manque de trébucher. L'adrénaline explose. Elle s'éloigne en silence, les tempes battantes. Chaque battement de son cœur cogne dans ses oreilles. Il faut qu'elle parle à Antonio. Il faut qu'elle lui dise.

Mais il est déjà au courant.

Il l'attend.

Son regard, une lame de rasoir.

- Tu étais où ?

Elle ne répond pas tout de suite. Il sait. Il a deviné. Antonio a ce don de lire les non-dits, de traquer les silences.

- J'ai entendu tes hommes parler. Il y a une trahison.

Le muscle de sa mâchoire se contracte. Son regard brûle, fouille son visage.

- Tu es allée écouter des conversations qui ne te concernent pas.

Elle serre les poings.

- Je fais partie de cette histoire, que ça te plaise ou non.

Antonio s'approche, lentement, dominant l'espace.

- Tu ne sors plus seule. C'est fini.

Sophie explose.

- Hors de question.

Le silence est violent. Antonio reste impassible.

- Ce n'est pas une demande.

Un combat de regards. Aucun ne cède. Antonio sait qu'il pourrait l'emporter en un mot, en un geste, en une menace. Mais il sait aussi que Sophie est un feu qu'il ne peut pas éteindre par la force.

- Tu veux me protéger ou me contrôler ? crache-t-elle.

- Je veux que tu restes en vie.

Elle rit, sans joie.

- T'as peur pour moi ou pour ton putain d'honneur, Antonio ?

Le nom claque dans l'air, comme un défi. Antonio s'approche encore, son souffle mêlé au sien.

- Ce n'est pas un jeu.

- C'est toi qui as fait de moi un pion.

Il la saisit par le poignet, pas brutalement, mais fermement.

- Je ne te laisserai pas crever à cause de ta fierté.

Elle arrache sa main.

- Et moi, je ne te laisserai pas m'enfermer.

Silence. Un mur invisible entre eux. Deux volontés prêtes à s'entre-déchirer.

Puis il se détourne.

- Va dormir.

Elle hésite. Une partie d'elle voudrait continuer à se battre. L'autre sait que ce combat-là, pour ce soir, est terminé.

Elle part sans un mot.

La nuit est lourde. Chargée d'un poids invisible. Sophie s'allonge, mais ne trouve pas le sommeil. Son esprit tourne en boucle. Qui est le traître ? Qu'est-ce qu'Antonio ne lui dit pas ? Pourquoi elle a l'impression d'être une proie coincée dans une cage dorée ?

Un bruit.

Presque imperceptible.

Mais assez pour la sortir de ses pensées.

Son souffle se coupe.

Un frôlement.

Elle se redresse lentement. Tend l'oreille.

Quelqu'un est là.

Pas un garde. Pas Antonio.

Quelqu'un d'autre.

Le sol grince faiblement. L'adrénaline envahit son corps. Elle descend du lit, pieds nus, avance lentement vers la porte. Sa main tremble sur la poignée.

Elle entrouvre.

Un mouvement furtif.

Un homme.

Dans la pénombre, une silhouette massive se faufile à travers le couloir, glissant entre les ombres. Il avance vers la chambre d'Antonio.

Elle n'a pas le temps de réfléchir.

Elle agit.

Un pas. Deux pas. Trois.

Son pied heurte un meuble. L'homme se fige.

Leurs regards se croisent.

Et puis tout bascule.

Un éclat métallique. Une lame. Il fonce sur elle.

Sophie recule, cherche une échappatoire. Une main se tend, l'agrippe brutalement. Elle se débat, griffes et dents, mord l'air pour s'échapper.

Un cri. Pas le sien.

Antonio.

Il est là.

Un coup de feu explose dans la nuit.

L'homme s'effondre.

Un silence brutal.

Le souffle court, Sophie se tourne vers Antonio. Son regard est noir, foudroyant.

- J'avais raison.

Elle voudrait répondre. Mais les mots se coincent dans sa gorge.

Antonio s'avance, lentement, vers le corps gisant sur le sol. Un regard à ses hommes, qui accourent.

- Nettoyez ça.

Il se tourne vers elle.

- Toi, tu restes avec moi.

Elle voudrait refuser.

Mais cette fois, elle sait qu'il n'y a pas d'alternative.

Antonio a toujours raison.

Et ça, c'est peut-être la chose qui lui fait le plus peur.