-Moi: Bonsoir. Ca va? Comment était ta journée?
-Marc: tu as vu l'heure? Tu sors d'où?
-Moi: du boulot. Je vais encore sortir d'où? Je t'ai prévenu non?
-Marc: ton boulot là que tu cris partout! Hum! Un jour un jour tu vas me dire vraiment ce que c'est.
Faut pas croire. Marc sait très bien ce que je fais dans la vie. Seulement les hommes adultères sont les plus jaloux du monde. Ils savent ce qu'ils font et croient que tout le monde fait comme eux. Ce n'est pas mon cas. Pourtant j'aurais pu. Soyons pragmatiques: Marc me trompe. Il a un 2e voire un 3e bureau là dehors (2e bureau=maitresse). Pourquoi pas moi? J'aurais pu. J'ai plein de dragueurs. Mais non! Je n'ai pas le temps pour ça. Mon travail et mes enfants ça me va. Marc croit que je ne sais pas ce qu'il fait. Il ne sait pas que je suis au courant pour Mélanie. Un jour j'ai fouillé son téléphone. Parce que j'avais des soupçons. Des rumeurs. Des gens qui l'apercevaient à un endroit alors qu'il disait qu'il était ailleurs. Un soir il a abandonné son téléphone sur la table sur de lui. Il a un HTC avec un code tactile. Il croit que ça le protège. Je n'ai même pas eu à faire 2 tentatives. Marc a une assez haute opinion de lui même. J'ai donc dessiné un M sur l'écran tactile et le téléphone d'est décodé. J'ai eu accès aux messages de Mélanie. Il n'a même pas pris la peine de les effacer.
Je n'ai pas eu mal. Ca ne m'a pas dérangé. Les camerounais considèrent comme normal de gérer plusieurs femmes à la fois. Pour eux, c'est comme respirer. J'ai déposé le téléphone sur la table et je me suis remise à suivre le "Dexter" sur Canal +. Comme si de rien n'était. En même temps, "rien n'était". Rien ne venait de se passer. Je n'avais rien découvert d'extraordinaire. Je n'allais pas faire une crise de colère ou de larmes. Pourquoi le ferais-je? Dans quel but? J'allais crier et pleurer et après? J'aillais le quitter? Pour aller où? Mais surtout pour qui? Un autre qui allait également me tromper à la première occasion? Pffff. Ce n'était pas rose tous les jours. Je ne ressentais pas le grand frisson c'est vrai. Mais voilà c'est le père des jumeaux et tant qu'il rentre à la maison, il peut coucher avec toutes les Mélanie du monde, je m'en fous. Tant que ça reste hors de chez moi.
Je vais à la cuisine me servir à manger. Je suis fatiguée. Je mange donc rapidement. Puis je vais laver les jumeaux et je les mets au lit. Je me lave également et au lit.
A 22 heures Marc vient me rejoindre. Il va prendre une douche et je soupire de contrariété. Marc ne se lave pas le soir. Sauf quand il veut faire l'amour.
A peine il a touché le lit qu'il m'embrasse. Je suis fatiguée mais je réponds à son baiser. Sinon on va encore dire que les femmes sont toujours fatiguées. Il me caresse puis monte sur moi. Je dois avouer que Marc est doué. Il est à mon écoute. Mais là je suis juste fatiguée. J'ai envie de dormir. J'essaie de me concentrer. Je le caresse et je pousse des soupirs quand il faut. Je ne sais même pas quand j'ai commencé à faire ça. A Simuler. Je fais ça depuis tellement longtemps! Bien avant que je sois au courant pour Mélanie. Ah tiens cette histoire m'a fait quelque chose finalement. Parce que à partir de là, je crois que je n'ai plus rien éprouvé pour lui. J'ai demandé qu'on reprenne les préservatifs. Je lui ai sorti une raison bidon et il n'a rien trouvé à redire.
J'essaie de me concentre sur nos 2 corps en mouvement mais rien n'y fait mon esprit s'échappe. Je pense aux jumeaux. Il va falloir que je fasse un tour chez mes parents avec eux. Ca fait longtemps qu'ils ne les ont pas vus. Il va aussi falloir que j'aille faire un tour sur mon chantier. Oui MON. Marc n'est pas au courant. Pourquoi lui dirais-je? Lui ne m'a rien dit à propos de Mélanie.
Je pense que ce sont des choses à dire à la personne avec laquelle on partage sa vie. " Chéri je construit une maison" "ah bon c'est bien! Moi j'ai un 2e bureau, elle s'appelle Mélanie. Tu la construis où ta maison?"
Voilà, ça aurait pu se passer comme ça et tout le monde aurait été au courant de tout. Mais non. Monsieur à son jardin secret? Moi aussi!
Je pousse un faux soupir de bien être pour encourager Marc. Puis mon esprit va encore se balader. Je repense à ma journée. On avait beaucoup de travail. Pour préparer la visite de notre collègue gabonais. Ma collègue, Ginette, m'a dit qu'il venait régulièrement. Mais comme je n'étais là que depuis 1 an et demi, je ne l'avais jamais vu. Toute la journée je l'avais entendu me rabattre les oreilles a propos de Cameron Nguema.
"Il est sympa" "j'adore son accent chantant' "Il est très mignon". Notre secrétaire commune a lâché un "Bref il est beau et sympa" simple et concis. Je l'aimais bien. Pragmatique tout comme moi. Mais entre nous, depuis quand les gabonais sont mignons? A part leur joueur de foot là, celui dont j'ai oublié le nom, il y a encore qui? Tous les gabonais sont petits, noirs et plutôt insignifiants. Je sais c'est méchants mais bon... tous les gabonais que j'ai rencontré sont comme ça qu'est ce que vous voulez que je vous dise ? (C'est dans la joie les Gabonais. En vrai vous êtes très mignons). D'ailleurs Ginette ne s'est pas gênée pour me dire que je me trompais, mais j'étais sure de moi. On a même fait un pari. On avait parié que si en toute honnêteté je le trouvais moche, je lui filais une espèce de pierre colorée que j'avais rapportée de Johannesburg et dans le cas contraire, elle me donnait son ensemble de post-it de toutes les couleurs qu'elle avait obtenu je ne sais où.
Je secoue la tête de gauche à droite. Ce que Marc prend pour de la passion. Laissons le croire ce qu'il veut. En fait je pensais à ma pierre. J'allais devoir m'en séparer. Parce que quand il était entré dans le bureau alors que je faisais l'idiote, j'ai eu un choc.
Ce n'est pas parce que je suis en couple que je n'ai plus les yeux pour regarder. Et apprécier. Premièrement il n'était pas court. Pas du tout. Premier cliché à partir à la poubelle. Il était grand. Bien plus que moi. Deuxièmement il n'était pas noir, mais plutôt clair de peau. Un peu comme moi. Pas métis. Juste clair. Enfin the last but not the least il n'était pas quelconque. Loin de là. Il était peu enrobé. Pas de graisse. Mais plutôt massif. Ca lui allait bien. Ses oreilles étaient décollées et il avait des petits yeux. Une belle bouche fine et...des belles oreilles. J'ai décidé sur le champ que j'aimais ses oreilles.
Je me suis lancé à moi même un avertissement. Pas question d'aimer les oreilles de qui que se soit. A part celles de Marc que j'ai sensuellement caressé, histoire de monter ma bonne volonté participative.
Oui il ne fallait rien faire de stupide. J'estimais que si Marc était allé voir ailleurs, alors j'avais le droit moi aussi. Il a rompu le contrat qui nous liait tacitement. Mais bon je n'avais pas vraiment envisagé de le faire. Je n'en avais même pas envie. Je ne suis pas comme ça. Je ne trompe pas mon compagnon. Mais quand j'ai senti le froid de l'alliance de Cameron Nguema contre mes doigts, j'ai eu un sentiment de déception qui m'a fait comprendre que je devais me tenir éloigné de lui le plus possible.
J'ai crié en même temps que Marc. Enfin, j'allais pouvoir dormir. Je me suis tournée sur le côté et j'ai fermé les yeux. Demain est un autre jour.