Devant la porte, un gardien était assis juste à l'entrée. Elle fait les présentations et m'invite à entrer. Malgré son statut de riche, j'trouve une fille posée, respectueuse et modeste. Il y'avait 3 gros chiens, des pitbulls dans leur cage. J'fais une blague « Si tu veux me chasser, libère ses chiens et tu ne me reverras plus. Je n'ai aucune affinité avec ses espèces. Je ne badine même pas avec eux ». Elle sourit « ça ne risque pas d'arriver, parce que je ne libérerai pas les chiens. Sinon, ils feront de toi leur diner rire ». Elle m'installe dans un grand salon. Je ne cessais de regarder la décoration. C'était la première fois que je me suis retrouvé dans une pièce pareille. Amna niou yalla mey Mashallah. Que Dieu leur préserve. Je ne suis pas un jaloux, je n'ai rien mais la réussite des autres me va droit au cœur. Quelques minutes, une femme est venue remplir la table d'amuses bouches, des fruits et des bouteilles de boissons. Même en passant deux jours ici, je ne pourrai finir tout ça. Diary est revenue avec un autre accoutrement. Une autre robe plus sexy que la précédente mais longue. Nous discutions quelques minutes, avant que j'ne voie un homme et une femme correcte faisant leur entrée dans la pièce. C'était facile à deviner. Ils peuvent qu'être que ses parents. Je me suis levé et je leur ai salué avec respect. Son père était le premier à parler « Tu es surement Chérif, le jeune qui a aidé la prunelle de mes yeux. Elle est têtue. Je l'ai mainte fois demandé de prendre la voiture 4X4 lorsqu'elle sort dans certains milieux mais elle refuse. Elle pense que les gens croiront qu'elle se vante. Elle est trop modeste et aime vivre caché. C'est sa qualité première. Mais parfois faut penser à soi avant de penser aux autres. Imagine qu'elle tombe sur des mauvaises personnes. Que ferai-je ? En tout cas, merci pour ton aide. C'est un geste noble et ça m'a beaucoup touché lorsqu'elle me l'avait expliqué. J'ai tenu à te témoigner ma gratitude. Ne change jamais de comportement. Tu es sur la bonne voie. Assieds-toi et mets-toi à l'aise. Je ne me suis pas présenté, c'est Mr KA ». Sa maman sourit « Mon mari a tout dit. Merci pour ton aide ». J'voyais une famille riche mais modeste et respectueuse. Je ne connais pas l'histoire de cette famille, mais j'parie qu'un d'entre eux a vécu dans la difficulté. Bref, ça ne me concerne pas. J'me suis mis à l'aise et son papa était assis face à moi. Il est encore jeune. Avec sa silhouette, il maintient sa forme en salle de musculation. Il a démarré la discussion.
Mr KA : Que fais-tu dans la vie Chérif ?
Chérif : (Sans surprise, je m'attendais à cette question). J'suis vendeur de café Touba et beignets dans ma cantine.
Mr KA : C'est bien. Il n'y a pas de sot métier. Je t'encourage à aller de l'avant. Tu as fait des études ?
Chérif : (J'souris avant de répondre. J'me suis préparé à cette question). Oui monsieur, j'ai fait des études. J'suis un bachelier et un ex étudiant. J'étais à l'UCAD (Faculté des Sciences Economiques et de Gestion) et j'ai eu ma (Licence Professionnelle Science de Gestion option Finance – Comptabilité). Par manque de moyen, j'étais obligé d'arrêter les études. Maman ne pouvait plus continuer de m'assurer. Mais bon, au Sénégal parfois c'est difficile de trouver un boulot. J'ai fait de nombreux stages sans être embauché. Bref... J'suis le soutien de ma famille et je ne dois pas rester les bras croisés. Avec le café Touba et les beignets, je m'en sors très bien. J'réussis à entretenir mes parents. Franchement, je ne me plains pas.
Mr KA : Quoi ? (d'un ton sec et surpris) Tu m'envoies dès demain ton CV. J'suis vraiment séduit de ton courage. Tu pouvais rester les bras croisés à attendre des boulots dans les bureaux. Le pays va mal. Je ne comprends pas comment un diplômé peut subir tout ça. Dieu est grand. Je ne minimise pas les vendeurs de café mais je ne peux pas imaginer qu'un diplômé puisse se retrouver comme ça. Comprends ma surprise.
Chérif : Non je ne me sens pas offenser. J'comprends ta surprise mais c'est le Sénégal. Je ne suis pas le seul, beaucoup de jeunes sont des chômeurs intellectuels. Y'a certains jeunes qui vendent même des sachets d'eau, d'autres des arachides. La liste est longue. Dieu merci, Il est là pour tout le monde même si parfois, il nous arrive de douter de son existence rire.
Mr KA : Astafourlilah !!! Rire. Dieu existe et Il est le même pour tout le monde. Chacun a son heure de gloire. Je ne doute pas de ta réussite parce que tu es un brave jeune.
Chérif : Rire. J'sais que Dieu existe. Il nous arrive de douter, tellement, nous vivons parfois des difficultés inexplicables. Mais pour ma mère, j'suis prêt à tout pour son bonheur. Elle a sacrifié toute sa vie pour nous et surtout pour moi.
J'commençais à avoir les larmes aux yeux. Quand j'parle de mon passé avec ma mère, je ne peux pas retenir mes larmes. La maman de Diary sentant mon émotion, elle a détendu l'ambiance « Maintenant buvons un peu. Chérif, j'espère que Diary n'a pas montré ses caprices quand tu as voulu l'aider ». J'ai compris qu'elle voulait juste changer de sujet. L'heure avançait. Le diner était servi à 20h00. Nous nous sommes mis à table. Je ne me rappelle pas d'avoir été à table une seule fois de ma vie. Le menu était vraiment extraordinaire. Y'a une grande différence de ce qu'elle a mangé chez moi mais les situations ne sont pas les mêmes. Je me suis bien régalé. J'étais à l'aise, loin d'être complexé. Je ne suis pas analphabète, j'suis civilisé et bien cultivé. A la fin du diner, le dessert était présent, fruit, glace, jus naturel, boisson etc... Ce que j'vis actuellement, je ne le vivais que dans les grandes fêtes, Tabaski ou Korité. (Qu'il me pardonne mais Dieu a du mal avec la division). Regardez-moi tout ce qu'il y'a sur la table, le prix de leur diner est l'équivalent de notre semaine de dépense. Après avoir pris toutes ses gâteries, j'discutais avec le vieux. J'crois qu'il testait mon intelligence. Il parlait de l'actualité. J'ai aimé le sujet de la discussion. Nous nous exprimions longtemps dans la langue de Molière que j'manie très bien. Il savait que j'étais très bien informé. Le vieux ne savait pas que mon passe temps favori, c'était l'actualité politique, économique etc. J'voyais dans son regard, un homme séduit par un jeune vendeur de café Touba et beignet. Il était très attentif à notre discussion. Ma façon de m'exprimer a attiré l'attention de Diary et sa maman. Ce vieux m'avait invité indirectement dans mon jeu favori. A la fin de cette discussion, Monsieur Ka accélère les choses à nouveau « Chérif, je te donne ma carte, lundi passe directement à mon bureau, avec ton CV. Tu as l'adresse. Allez, j'vous fausse compagnie. J'me retire dans la chambre. Bonne fin de soirée ». Il se lève et sort du salon. Madame Ka était gentille aussi, elle était vraiment ouverte et accueillante. Elle y est allée de ses commentaires.
Mme KA : Chérif, j'étais vraiment touchée lorsque tu parlais de ta maman. J'aime les fils qui se soucient du bonheur de leur maman. Nous sommes vraiment fatigués pour nos enfants. Je ne connais pas ta maman, mais elle peut se réjouir d'avoir un fils si dévoué à la rendre heureuse.
Chérif : Madame pour ma maman, j'suis capable et prêt à tout pour son bonheur. Malgré ses moyens minimes, elle n'a ménagé aucun effort pour ma réussite. Malheureusement, le travail tarde à venir. Je ne me décourage pas. Tant que y'a la vie, y'a l'espoir. Mon objectif est de construire une maison pour ma maman et l'amener à la Mecque pour son pèlerinage. Et j'crois dur comme fer que j'atteindrai mon objectif. Ma vie est pour ma maman.
Mme KA : J'en suis sûre que le Bon Dieu exaucera tes vœux. Quant tu parles de ta maman, tes yeux brillent. Mashallah. La sincérité dans tes propos prouve tout. J'prierai pour la réussite de tes ambitions. Je te conseille de toujours croire en tes rêves. Ta maman travaille dans quel domaine ?
Chérif : Elle vend des légumes au marché du quartier. Et c'est avec cet argent que j'ai réussi mes études.
Mme KA : Ok j'vois. Dieu est Grand. Il est là pour tout le monde. J'vous laisse discuter à mon tour. N'oublie pas de partir lundi au bureau de Monsieur KA. Peut-être, il a quelque chose pour toi. Allez bonne fin de soirée.
J'remercie à mon tour. Il faisait 22h. J'devais me préparer à rentrer. J'ai reçu l'appel de Néné mais je ne voulais pas répondre. Je ne saurai quoi dire. Elle a insisté avec ses appels et j'ai fini par décrocher « Allô mon amour ? Comment tu vas ? Tu me manques ? » J'ai vu dans le visage de Diary une crispation. Je ne me souciais pas d'elle. J'ai continué tranquillement ma discussion « J'suis sorti. Une amie m'a invité chez elle et je ne pouvais pas refuser. Je t'expliquerai à mon retour. Bisou je t'aime mon amour ». J'raccroche mon téléphone. Diary gardait le silence 2mn avant qu'elle ne le brise « On dirait que monsieur est un homme déjà pris ? Pourquoi j'devais m'en douter ? Un homme si charmant, gentil, travailleur et si fier de lui ne court pas les rues. J'envie ta copine, elle a trouvé le vrai mec. J'espère qu'elle fera des efforts nécessaires pour te garder. Y'a trop de lionnes affamées dans la nature, prêtes à croquer les hommes sans défense ». Nous rions ensemble, elle n'avait pas fini de parler que son téléphone sonna à son tour. Elle ne répondait pas, je n'ai pas cherché à savoir. Le téléphone continua de sonner « Si c'est à cause de moi que tu ne peux pas répondre, j'peux sortir un moment. Ou bien tu peux partir répondre dans ta chambre, ça ne me gêne pas ». Elle sourit « Non, je ne me permettrai jamais de laisser mon invité seul et allait répondre un appel. L'appelant pourra attendre ou bien j'rappellerai. Bref... J'suis fière de toi et contente de ta venue. C'est la première fois que j'vois mes parents aussi à l'aise avec un de mes invités. Tu t'es bien comporté. Je ne savais pas que tu as fait des études si poussées. J'suis vraiment impressionnée. La chance ne sourit pas à tout le monde. J'crois que papa fera quelque chose pour toi. Il a de bonnes connaissances ». Elle n'avait pas fini de parler que son téléphone sonne à nouveau. Cette fois-ci, j'insiste pour qu'elle répond « Stp, réponds à ton téléphone ». Elle décroche « Bonsoir, j'suis occupée. Je te ferai signe tout à l'heure. Bye ». Elle raccroche à nouveau. J'ai continué notre discussion. Elle me posait des questions sur ma vie et je n'avais pas honte de répondre à toutes ses questions sans hésiter. Vers les 23h, je me suis levé pour rentrer. Elle me tend une enveloppe. J'ai deviné que c'était de l'argent mais j'ignorais la somme. « Je t'avais promis de te donner la journée d'aujourd'hui, heureusement que maman s'en est chargée. C'est elle, qui a laissé cette enveloppe pour toi. Soit tu la prends, soit je la réveille pour qu'elle te la donne de ses propres mains. Tu n'oses pas me laisser réveiller maman pour ça ». J'souris et j'prends l'enveloppe. Elle se lève et m'accompagne jusqu'à la porte. Elle me retient par la main « J'peux te donner une bise sur la joue ? » J'souris « Si ça te fera plaisir vas-y. Y'a rien de mal à ça. Tu es comme une sœur ». Elle me coupa la parole « Arrête de me dire que j'suis ta sœur ? J'suis juste une connaissance qui veut devenir une amie proche et pourquoi pas plus (en souriant)». Je ne voulais pas débattre de ce sujet. J'ai fait semblant de sourire. On se dit au revoir avant que je ne sorte de la maison. Heureusement dans ce milieu, on peut trouver facilement un taxi. Sur le chemin du retour, j'ai reçu son appel « J'veux te tenir compagnie. Je ne veux pas que tu t'ennuies sur le chemin du retour ». Je la remercie d'abord mais je ne pouvais pas accepter. J'avais envie d'entendre ma belle Néné. « Merci Diary, c'est vraiment gentille de ta part mais ne t'en fait pas. J'ne m'ennuie pas. J'vais rappeler ma copine ». Elle n'insiste pas et d'un ton sec, elle me dit juste « Ok et excuse du dérangement ». Elle raccroche. J'commençais à me poser des questions sur ses intentions. Je ne veux pas croire ce que me disent mes pensées. Pour être franc, j'croyais qu'elle avait des sentiments pour moi. Ça ne peut pas être ça. Nous ne sommes pas du même monde. (Deureum ak deureum nio meuneu andeu... Témérr ak témérr). Si une chèvre s'aventure à manger dans le même plat que les lions, elle finira par être un dessert. Je ne veux pas me compliquer la vie. Néné me va très bien. Elle est du même milieu que moi. Ce qui se ressemble doit s'assembler pour leur propre bien. D'un autre côté, j'sens que Diary m'estime tout court. Je ne vais pas me faire des films. J'ai contacté tranquillement ma Néné mais cette dernière refuse de prendre mon appel. Après insistance, elle me décroche et me répond sèchement « Continue ce que tu faisais. J'suis déjà au lit. Bonne nuit ». Elle raccroche. J'étais choqué mais j'ai géré tranquillement. A mon arrivée, j'essaie d'appeler Diary pour lui faire part de mon arrivée, mais elle était en communication. J'envoie un texto « Juste pour te dire que j'suis bien arrivé ». A la minute qui suit, elle répond « Dieu merci. Bonne nuit et merci une fois de plus ». J'pouvais me coucher. J'avais du mal en m'endormir tellement, j'pensais à ma Néné. Demain, j'irai la voir. A demain...