La reconnaissance est la mémoire du cœur
Hans Christian Anderson
12 mai 2008
Ma très chère Laura,
Le temps qui passe est une injure au temps qu'il reste. Il hisse son bras d'honneur si haut que son ombre s'étend sur chaque projet, chaque envie, chaque doute. Bons ou mauvais souvenirs, qu'importe... Pour ceux qu'il nous reste à conquérir...
Avant que mes souvenirs ne se troublent définitivement, je souhaite t'écrire cette lettre, comme d'autres refont le monde devant un bon verre de vin. Pour que, lorsque tu regarderas dans le futur ces yeux qui ne sembleront pas te connaître, tu saches que sous ces déchets cérébraux qui s'accumulent, bat un cœur qui aura vécu pleinement pour toi
Je m'accroche Laura. Je m'accroche de toutes mes forces, lutte contre le néant qui s'approche à grands pas. Je vis aujourd'hui dans un perpétuel présent. Un présent d'une autre époque, lumineux certes, mais sans avenir. Et pourtant, ta voix qui sautille d'instant en instant, tes rires qui m'atteignent par-delà les brumes, me ramènent inéluctablement à cette réalité nécessaire et magnifique : tu es là. Tu es là, à moi, et je ne peux me résoudre à laisser filer cet avenir car cela signifierait renoncer à toi. Et comment le pourrais-je ?
Alors oui, ma mémoire va petit à petit te graver dans mon esprit ainsi, ignorer la femme que tu deviendras pour s'accrocher à ce petit être doux et espiègle que j'ai voulu, désiré, attendu et chéri. Je voulais faire de toi une femme, tout simplement. Je te voulais plus sensible qu'intelligente ; plus rayonnante que belle ; plus conquérante que dominatrice. Je ne sais encore et ne verrai probablement pas ce que tu deviendras, ce que tu feras de cette vie que je verrai sans la comprendre. Mais j'ai confiance. J'ai confiance car je t'ai vu, petite fille, me parler avec cette sensibilité qui est la tienne. Qui est la nôtre, si j'ose te le dire...