Chapitre 2 2

J'émerge doucement de mon sommeil, instinctivement, ma main retrouve mon portable dans un des tiroirs du lit, 20:07. Je me lève et mes doigts glissent sur l'interrupteur du chevet, mes yeux se plissent sous l'intensité de la lumière avant que je m'y habitue.

La maison est calme, rien de surprenant, c'est toujours calme parce-qu'il n'y a jamais personne: je suis enfant unique, ma mère ne rentre qu'aux environs de minuit et mon père n'est plus depuis mes 08 ans: une courte maladie, à peine deux mois et mon père n'existait plus. Il était le pilier de notre famille, il travaillait beaucoup mais il trouvait toujours un peu de temps pour nous. Je n'ai que de beaux souvenirs de lui, une personne aimante et extrêmement gentil, attentionnée et dévouée à sa famille. Son départ soudain m'a affligé au point où j'ai cru ne pas pouvoir le supporter, mais finalement je suis encore là. Au fil du temps, penser à lui c'est plus aussi triste qu'avant, et je fais de mon mieux pour que ses efforts ne soient pas vains.

Je me rends compte de mon état, je suis encore en tenu de classe, je me frappe le front en jurant de ma bêtise et rejoins la douche.

Je reviens et m'habille de façon à ne pas être gênée: un short et un t-shirt amples.

Je décide ensuite de rejoindre la cuisine histoire de manger quelque chose. Je marche en éclairant les pièces de la maison jusqu'à ma destination.

Le reste du dîner d'hier est encore au frigo, je ne réchauffe que la quantité qui me suffira, ma mère mange rarement quand elle rentre, aussi, je lui mettais toujours son dîner mais un bon jour elle m'a demandé de ne plus me donner cette peine. Ce que j'ai ressenti ? Rien de particulier, c'était depuis bien longtemps que notre relation était platonique.

Pendant que mon dîner se réchauffe, je m'adosse à l'encadrement de la porte et pense à tout et rien comme d'habitude.

Non, finalement,pas comme d'habitude, mes pensées ne sont pas floues et dispersées, les images qui me viennent à l'esprit sont claires, je distingue tous les contours et tout les détails, et j'entends même encore sa voix: Djal.

-( c'est n'importe quoi ! ) Me dis-je aussi tôt.

Quand je me remémore notre rencontre "bizarre", une sensation étrange me parcoure le corps, et je souris. Ma curiosité est naturellement éveillée, pourquoi ces images me reviennent Ils en tête pendant mon moment de quiétude c'est quelque chose de nouveau et ça m'excite, je ressens fortement que les prochains jours de ma vie auront de quoi me distraire de ma routine.

Je finis par dîner et retourne dans ma chambre pour entrer dans mes cahiers, mathématiques ce soir, comme tout les soirs en fait.

Face à un exercice difficile je suis tout à coup songeuse: mon quotidien n'a pas changé depuis la classe troisième.

Ma mère ne travaillait pas autant avant le décès de mon père, rongée par le chagrin, elle avait mis sa vie en pause pendant près de deux ans , elle n'avait plus de temps que pour pleurer et déprimer, ma grand-mère, sa mère était restée tout ce temps avec nous; mais au début de ma quatrième année de lycée, grand-mère retourna chez elle et aussi subitement, ma mère recommença à travailler, à trop travailler, elle sortait aux aurores et rentrait au voisin de minuit, elle avait encore moins de temps pour moi et depuis ce jour, un fossé qui ne fait que grandir s'est creusé entre nous. À 10 ans, j'ai compris que le seul moyen pour ma mère de surmonter la mort de mon père était de se noyer dans le travail quitte à oublier sa fille : je l'ai compris et j'ai cessé de lui réclamer ou de vouloir lui réclamer quoi que ce soit, après tout, son fardeau n'est pas non plus facile.

C'est ce qui lui a permis de survivre et je ne lui en veux pas pour cela. Nous nous disons à peine bonjour ou bonsoir mais notre relation n'est pas conflictuelle,et peut-être même qu'elle est consensuelle, quoiqu'il en soit elle n'est pas celle qu'on retrouve d'habitude entre mettre mère et fille.

Fatiguée d'avoir trop remué le passé, je ferme mes cahiers et rejoins mon lit. Je pense à mon père, il est 22:17 et je ne tarde pas à m'endormir.

Mon alarme sonne, mes mains expertes et habituées, arrêtent le cri strident sans même que je n'ouvre les yeux, je sais qu'il est trois heures et trente minutes. Puisque je n'ai pas travailler hier soir, je dois me rattraper ce matin, il ne faut pas grand chose pour accumuler les leçons et avoir du retard dans les révisions.

Après plus de deux heures de travail je n'ai pu résoudre que l'exercice sur lequel je me suis endormi hier, mais au moins j'y suis arrivé.

Il est presque six heures du matin et j'enfile mon jogging, je suis étrangement de bonne humeur et j'ai une folle envie de courir ce matin.

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