Éloïse POV:
Samuel avait passé la nuit dans la chambre d' Inès. Je l' avais deviné. Je n' avais pas besoin de le voir, ni de l' entendre. L' air lui-même portait l' odeur de leur trahison. Étrangement, je ne ressentais plus rien. Juste un vide béant.
J' étais dans la cuisine, préparant un café, quand Marie, notre gouvernante, s' est approchée de moi, le front plissé.
« Madame Éloïse... » Sa voix était un murmure inquiet. « Attention à cette femme. »
Elle a baissé la voix, ses yeux jetant un coup d' œil furtif vers l' étage.
« Ce matin, elle est sortie de la chambre de Monsieur Samuel en chemise de nuit. Devant tout le monde. »
J' ai souri, un sourire si mince qu' il en était presque douloureux.
« C' est très gentil de ta part, Marie. Mais ne t' inquiète pas. » J' ai pris une gorgée de café.
« Samuel a toujours été... spontané. » Une amertume que je m' efforçais de cacher a transpercé ma voix.
« Mais... » Marie a insisté. « Elle n' est pas comme vous. C' est une... » Elle s' est arrêtée, cherchant ses mots. « Une croqueuse de diamants. »
« Marie, ne dis pas de mal d' Inès. » Ma voix s' est faite plus ferme. « Samuel l' aime. C' est tout ce qui compte. »
Marie m' a regardée, les yeux écarquillés. Elle n' a rien dit, mais ses sourcils se sont froncés davantage.
« Madame Éloïse, vous avez changé. » Sa voix était à peine audible. « Que se passe-t-il ? »
J' ai secoué la tête, mon sourire toujours figé.
« Rien, Marie. Je vais très bien. »
Mon sourire était un masque. Un rempart contre le monde, contre la douleur qui menaçait de m' engloutir. Je ne pleurerais plus. Jamais.
Marie a secoué la tête. « Avant, vous appeliez Monsieur Samuel 'mon amour' . Maintenant, c' est 'Samuel' . »
Elle avait raison. Les mots avaient changé. Le cœur aussi.
J' ai baissé les yeux, le souvenir de ces mots doux me poignardant à nouveau.
Mon amour... Mon Sammy... Mon cœur.
Je l' appelais ainsi, des mots murmurés dans l' obscurité, des promesses échangées sous les étoiles. Il me demandait de l' appeler Samuel, juste Samuel, pour que notre amour soit unique, différent des autres. Je m' étais sentie spéciale. J' avais cru que c' était notre secret, notre intimité.
J' avais été si naïve. La vérité m' avait frappée comme un éclair.
Il voulait que je l' appelle Samuel parce que mes yeux n' étaient pas les siens. Mes yeux étaient différents. Samuel avait toujours fermé mes yeux quand il m' embrassait.
Mes yeux étaient trop différents de ceux d' Inès. Mais ma voix... ma voix ressemblait étrangement à la sienne.
Il voulait m' entendre prononcer son nom, encore et encore, comme un écho lointain de son passé.
« Marie, écoute-moi. » J' ai posé ma main sur la sienne. « Tu es une femme formidable. Je te demande juste une chose. »
Son regard s' est ancré dans le mien.
« Ne dis jamais de mal d' Inès. Ne fais jamais de vagues. » J' ai adouci ma voix. « Je ne veux pas que tu aies des problèmes. »
Je savais qu' après mon départ, Samuel chercherait un coupable, un bouc émissaire. Je ne voulais pas que Marie en soit un.
« Je vais au bureau de Samuel. » J' ai pris mon sac. « Je dois récupérer les papiers du divorce. »
La pièce était plongée dans un silence lourd. Samuel, assis derrière son immense bureau en acajou, n' a même pas levé les yeux quand je suis entrée.
Un grognement sourd a émané de sa gorge. « Tu as enfin réalisé ton erreur, Éloïse ? »
Ma voix était douce, presque inaudible. « Oui, Samuel. »
Je ne voulais plus me battre. La bataille était perdue depuis longtemps.
« Tu as toujours été têtue. » Il a fouillé dans un tiroir. « Cela t' aurait évité bien des problèmes si tu avais écouté dès le début. »
Il en a sorti une petite boîte sculptée, d' une finesse exquise. Il l' a lancée sur le bureau avec un geste brusque.
« Ton cadeau d' anniversaire. En retard. » Son ton était glacial. « Ouvre-le. »
Mon cœur a battu la chamade. Refuser ? Non. Il exploserait de colère. Et j' avais besoin qu' il signe ces papiers.
J' ai ramassé la boîte, mes doigts effleurant le bois froid. J' ai ouvert le couvercle. Un minuscule flacon de parfum, taillé comme un joyau, y reposait.
Son téléphone a sonné. Il a jeté un œil à l' écran. Inès.
Il m' a jeté un coup d' œil, puis a mis ses écouteurs. Son visage, si froid, s' est illuminé. Son regard sombre s' est adouci, son sourire est devenu lumineux. Sa voix s' est faite tendre, murmurant des mots doux à l' oreille invisible.
J' ai posé le flacon sur le bureau. J' ai sorti les documents du divorce de mon sac et les ai poussés vers lui.
« Samuel, peux-tu signer, s' il te plaît ? » Ma voix était à peine audible.
Il a signé, sans même un regard, sans lire une seule ligne. Sa main a tracé sa signature avec désinvolture, tout en riant de quelque chose qu' Inès venait de dire.
Un léger froncement de sourcils a trahi mon malaise.
« Tu ne veux pas les lire ? » J' ai demandé, ma voix hésitante.
Il a levé un sourcil, irrité par mon interruption.
« Pas la peine. Je suppose que c' est pour les frais médicaux de ta mère, n' est-ce pas ? » Il a agité la main. « Tu gères ça. À l' avenir, donne ce genre de choses à ma secrétaire. Tu m' as déjà fait manquer des appels importants avec tes histoires. »