La serveuse n'est autre que la reine de la mafia
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Chapitre 3

Point de vue de Blake

La cuisine était habituellement une symphonie de chaos contrôlé.

Le rythme staccato des couteaux sur les planches, les poêles grésillant dans des éclats de flammes, les appels et réponses rythmés de la brigade.

Mais quand Cindy Royer a poussé les portes battantes, la musique s'est arrêtée.

Elle m'avait suivie.

La brûlure ne lui avait pas suffi.

Elle voulait la mise à mort.

J'étais à l'évier de préparation, passant ma main cloquée sous l'eau froide. La peau pelait, d'un rouge colérique et suintant.

« C'est dégoûtant ici », a annoncé Cindy, plissant le nez à l'odeur riche d'ail et de demi-glace.

Elle s'est approchée du passe, où des assiettes de bœuf de Kobé étaient dressées à la pince.

« Toi », a-t-elle dit en pointant un sous-chef. « Mets ça sur mon steak. »

Elle a sorti un pot de caviar de supermarché de son sac à main.

Le silence s'est fait dans la pièce.

Ce n'était pas seulement impoli ; c'était une profanation.

Antoine Gordon est sorti de l'ombre de la chambre froide.

C'était une montagne d'homme, les bras couverts de tatouages qui disparaissaient sous sa veste de chef. Il n'avait pas l'air d'un cuisinier. Il avait l'air d'une arme qui avait été mise à la retraite mais pas désactivée.

Il se déplaçait avec une grâce silencieuse qui criait le danger.

« Pas de nourriture extérieure en cuisine », a dit Antoine.

Sa voix était profonde, un grondement qui semblait vibrer à travers le sol.

« Pardon ? » a ricané Cindy.

« Code de l'hygiène », a dit Antoine, sans la quitter des yeux. « Et respect du métier. Enlève cette merde de mon passe. »

Le visage de Cindy est devenu violet. Elle n'avait pas l'habitude qu'on lui dise non.

Elle a sorti son téléphone.

« Hugo va entendre parler de ça ! » a-t-elle crié.

Elle a lancé un appel vidéo.

Un instant plus tard, le visage de Hugo a rempli son écran.

Il était assis dans une salle de réunion. Je pouvais voir le bord de la table en acajou. Je pouvais voir les épaules des hommes assis autour de lui.

Les investisseurs.

Le conglomérat Véga.

Il était en pleine réunion au sommet. Une réunion sacrée.

Et il a répondu à son appel.

« Cindy, ma chérie, je suis en réunion », a dit Hugo, la voix tendue.

« Ils me harcèlent, Hugo ! » a-t-elle gémi, tournant la caméra vers le personnel de la cuisine. « Le chef ! Et cette connasse de serveuse ! Ils se liguent contre moi ! »

Elle a pointé la caméra sur mon visage.

Je n'ai pas détourné le regard. J'ai fixé l'objectif. J'ai fixé les yeux de Hugo.

J'ai levé ma main.

La peau rouge et cloquée était impossible à manquer.

« Hugo », ai-je dit.

Il m'a vue. Il a vu la blessure.

Pendant une seconde, j'ai vu une lueur de reconnaissance. Peut-être même d'inquiétude.

Mais ensuite, il a regardé les hommes autour de lui.

Ils l'observaient. Le jugeaient.

Un Patron qui ne pouvait pas contrôler sa femme ? Un Patron qui laissait son personnel lui répondre ?

Il a paniqué. Il a choisi la voie de la facilité. Il a choisi la voie du lâche.

« Donnez-lui ce qu'elle veut », a dit Hugo, sa voix métallique à travers le haut-parleur.

« Hugo », ai-je dit en me rapprochant du téléphone. « Elle m'a brûlée. »

« Je n'ai pas le temps pour ça, Blake ! » a-t-il claqué. « Excuse-toi auprès d'elle. Vous tous. Maintenant. »

Le silence est devenu total dans la cuisine.

Antoine a regardé le téléphone, la mâchoire serrée.

« Vous voulez qu'on s'excuse auprès de la femme qui a agressé votre personnel ? » a demandé Antoine.

« Je vous ai donné un ordre ! » a hurlé Hugo. « Faites-le, ou vous êtes tous virés. Blake, à genoux et supplie-la de te pardonner. Montre-lui le respect qu'elle mérite. »

L'air a semblé se vider de la pièce.

À genoux.

Il voulait que la fille de David Roux s'agenouille devant une arriviste.

Il voulait que je me soumette. Devant ses investisseurs. Devant son personnel. Devant la femme qui m'avait blessée.

J'ai regardé l'écran.

J'ai regardé l'homme que j'avais accepté d'épouser. L'homme que je pensais capable de m'aider à moderniser les familles.

Je n'ai pas vu un partenaire.

J'ai vu un handicap.

Le pacte était rompu. Pas par moi. Mais par lui.

« Tu es sûr de cet ordre, Don Lambert ? » ai-je demandé doucement.

« Fais-le ! » a-t-il rugi.

J'ai hoché lentement la tête.

« D'accord », ai-je dit.

J'ai tendu ma main valide.

Cindy a souri, pensant que j'allais lui prendre la main pour la baiser.

J'ai attrapé le téléphone.

Et j'ai mis fin à l'appel.

L'écran est devenu noir.

Cindy a cligné des yeux. « Qu'est-ce que tu crois que tu... »

« Antoine », ai-je dit, ma voix changeant.

Ce n'était plus la voix d'une serveuse.

C'était la voix que mon père utilisait juste avant de signer un arrêt de mort.

« Verrouille les portes. »

            
            

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