Chapitre 5 05

Elle le suivit et gravit les marches en manquant de trébucher. Il ouvrit la porte, et ils pénétrèrent dans le noir avant qu'il ne daigne allumer. Agatha s'enfonça timidement dans le hall, regardant tout autour d'elle, les lèvres entrouvertes. C'était beau, luxueux, baigné d'opulence. Agatha en avait presque le tournis.

- C'est vraiment très...

Agatha sursauta quand de féroces grognements et aboiements éclatèrent au loin. Mortifiée, elle vit un Rottweiler au pelage noir courir vers elle. L'homme se mit devant elle et se mit à aboyer des ordres à son chien en russe. Agatha s'agrippa à son manteau en plaquant sa tête dans son dos pour se cacher.

- N'ayez pas peur, il n'attaque que si je lui ordonne.

Agatha se détacha peu à peu de lui et jeta un coup d'œil méfiant au chien, assis aux pieds de son maître.

- Ra... ravie de le savoir, balbutia Agatha en s'éloignant le plus possible du gros chien.

- Il s'assure que vous n'êtes pas dangereuse, expliqua Apollon en s'approchant de la jeune femme terrifiée.

- Je suis l'être humain le plus gentil au monde. Je serais ravie de lui traduire ! s'écria-t-elle, affolée, les yeux fixés sur le chien.

- Il s'appelle Rov et il ne vous fera aucun mal, assura Apollon en ramassant son sac par terre. Venez avec moi, je vais vous montrer votre chambre.

Apollon n'était plus sûr que son acte soit aussi pur qu'il ne l'aurait voulu. En effet, pour la première fois de sa vie, il était confronté à un petit bout de jeune femme complètement différent de ce qu'il avait l'habitude de fréquenter. Aucune femme n'avait jusqu'ici envahi son espace privé, c'est-à-dire sa maison, son chez-lui. Alors pourquoi il se retrouvait ici, au milieu de son hall, avec une femme ? Prêt à l'installer dans l'une de ses chambres ? Pas de femmes, pas d'ennuis, la règle était pourtant claire. Mais Apollon n'avait pas pu résister à la tentation de l'aider. Elle avait boosté son adrénaline. Depuis qu'il était devenu milliardaire, Apollon avait tout... les femmes tombaient à ses pieds comme des mouches. Ses amis l'adoraient, ses ennemis le craignaient. Mais chaque matin, quand il se levait, Apollon n'avait plus le même enthousiasme qu'il y a cinq ans ; son envie de conquérir le monde avait disparu parce que le conquérir était déjà fait. Aujourd'hui, cette montée d'adrénaline était revenue, lorsque la jeune femme lui avait rappelé qui il était.

Il la guida vers l'escalier et grimpa les marches, tout en cherchant laquelle de ses chambres pouvait lui correspondre. Le teint frais et lisse, les cheveux dorés... Apollon ouvrit la dernière porte au fond du couloir, au deuxième étage.

- Voilà, j'espère que ça vous ira. Désolé, ce n'est pas très féminin.

- Oh, ça ira, elle est fabuleuse.

Il déposa le sac sur le grand lit et darda un énième regard sur cette étrange jeune femme. Ses yeux bleus étaient tristes, sa silhouette fébrile à chacun de ses pas.

- Je vous promets de ne pas vous déranger, je serais invisible, dit-elle en s'asseyant sur le bord du lit. Et surtout, si je commence à trop parler, c'est que je suis nerveuse, alors il faut m'arrêter. Parfois, je parle, je parle, sous la nervosité, et je m'épuise en épuisant les autres, c'est absolument horrible, vous voyez ? Ça commence !

Apollon esquissa un faible sourire. En effet, elle parlait, beaucoup, contrairement dans la voiture.

- Je tâcherai de m'en souvenir. Si jamais vous parlez trop, je vous bâillonnerai.

Elle rougit en baissant la tête. Apollon cessa de la dévisager et alla jusqu'à l'armoire pour en sortir une couverture. Il l'enveloppa dedans, sans lui demander son avis. Aussitôt, elle se raidit, le regardant incrédule. Mais elle la serra contre elle.

- Merci...

Apollon s'en alla jusqu'à la porte, et au moment de sortir tout simplement, et de refermer derrière lui, il se retourna.

- Prenez une douche, habillez-vous chaudement et rejoignez-moi pour le dîner. Est-ce clair ?

- C'est un ordre ? demanda-t-elle en se levant du lit, le regard étincelant de colère.

- Exactement.