Chapitre 5 Chapitre 5

Point de vue d'Elara

Quand il quitte la salle de bain, je respire profondément. Mon cœur cogne si fort que j'ai l'impression qu'il va éclater. Mes sous-vêtements sont trempés et je me hais pour ça. Comment mon propre corps peut-il me trahir de cette façon ?

Je m'approche du lavabo, m'appuie dessus avec mes mains crispées et fixe mon reflet dans le miroir. Je cligne des yeux, j'essaie de calmer ce rythme cardiaque déchaîné.

- Mais pour qui tu te prends, bordel ? murmurai-je à voix basse en pensant à lui.

Je me lave les mains, comme si ce geste banal pouvait purifier mes pensées en même temps que ma peau. Puis je sors mon téléphone et ouvre le groupe de discussion avec Anna et Sterling.

« Vous êtes partants pour qu'on se retrouve ce soir, près de chez moi ? »

Anna répond la première : « Désolée bébé, j'ai un rencard. »

« Laisse-moi deviner... avec ton dieu grec ? » je renvoie aussitôt.

Sterling intervient : « Pas possible pour moi, j'ai dû prendre un service en plus au resto. »

« Pas grave. On se cale une autre soirée. Et Anna, bonne chance », ajoutai-je avec un clin d'œil virtuel.

Je range mon portable dans ma poche et ressors. Le cours a déjà commencé. Pas envie de retomber sur lui. Alors je file au bureau et me replonge dans mon travail. Le temps passe sans que je m'en rende compte, jusqu'à ce que Nolan entre seul. Mon souffle se détend.

- Hé, c'est l'heure du déjeuner, tu veux venir avec moi ? demanda-t-il.

- Non merci, j'ai apporté à manger, répondis-je avec un sourire poli.

- Je paie, Liv. Tu refuses toujours de déjeuner avec moi.

- Peut-être lundi ? répondis-je, esquissant un petit sourire.

Il sourit, puis s'en va. J'installe mon saladier sur la table, sors mon livre Mon lycan, mets mes écouteurs et lance de la musique. Mon déjeuner avalé, je range tout et me remets au travail que Nolan m'a transmis par mail.

- Ce mec ne s'arrête jamais, marmonnai-je.

Vers 18 h, Nolan réapparaît.

- Je te ramène ? propose-t-il.

- Tu es sûr que ce n'est pas trop de détour ?

- Pas de souci, viens.

Il attrape son blazer, son portefeuille et ses clés. J'empoigne mes affaires, puis on rejoint sa voiture sur le parking. Une Audi impeccable. Il m'ouvre la porte, je m'installe, il contourne et prend place côté conducteur. La voiture démarre vers Brooklyn.

La radio diffuse un fond musical. J'observe la ville par la vitre. D'habitude, je prends le métro. Là, tout semble différent. J'aime cette ville.

- J'adore ce coin, dit-il alors qu'on approche de mon immeuble.

- Moi aussi... même si j'aimerais m'offrir mieux. Mais je crois que je ne pourrais jamais quitter Brooklyn, mentis-je. En vérité, je ne cracherais pas sur un penthouse à l'Upper East Side, avec vue sur Central Park...

Il arrête la voiture. Son regard s'ancre au mien, trop intense.

- Hé ?

- Oui ?

- Je peux te poser une question ?

- C'est déjà ce que tu fais, répondis-je avec un sourire.

Il rougit. Nolan, rougir ? Étonnant.

- Vas-y.

Je sais ce qui vient. Encore une demande, et encore un refus de ma part. La situation commence à devenir lassante.

- Il se passe quelque chose avec Camden ?

Je le fixe, choquée.

- Pardon ?

- J'ai juste remarqué la façon dont il te regardait. Et crois-moi, il ne regarde jamais les femmes ainsi. Habituellement, elles se jettent sur lui.

- Non. Rien à voir entre M. Preston et moi.

- Alors une autre question...

- D'accord.

- Tu veux dîner avec moi demain soir ?

Quelle rapidité.

- Nolan, avec tout le respect que je vous dois, non. Tu es mon patron. Ce serait totalement inapproprié. On peut rester en bons termes, mais uniquement professionnels, répondis-je comme la dernière fois où tu m'as invitée à boire un verre.

- Mais je tiens vraiment à toi, Elara.

Il ne me connaît même pas vraiment. Il aime une idée, pas la vraie personne.

- Désolée, mais c'est impossible, dis-je en battant doucement des cils, un sourire aux lèvres. Merci quand même pour le trajet. Bonne soirée.

Je sors sans lui laisser le temps de continuer. Il me regarde encore, visiblement blessé, alors que je referme la portière.

Je franchis la porte de l'immeuble, prends l'ascenseur et rejoins mon appartement au deuxième. Sitôt entrée, j'ôte mes talons, les laisse tomber au sol, pose mon sac près de l'entrée et m'effondre sur le canapé. La télé s'allume.

Mes pensées dérivent malgré moi vers Camden. Je finis par céder : j'attrape mon ordinateur portable, m'installe en tailleur sur le canapé et tape « Camden Preston » dans la barre de recherche.

Des photos apparaissent aussitôt. Ses yeux bleus transpercent l'écran. Mon ventre se serre. Cet homme est d'un sex-appeal hallucinant. Je fais défiler les images. Jamais un sourire. Pas même sur tapis rouge. Toujours ce visage dur. Pourtant, je sais qu'il en a un, de sourire. Et quand il le dévoile, il est puissant. Pourquoi le cache-t-il ? Je me rappelle sa main m'agrippant, ses mots crus. C'est un salaud. Alors pourquoi je le laisse occuper mes pensées ?

Je claque l'ordinateur et vais à la cuisine. Le frigo est vide. J'ai oublié les courses. Je me contente d'un verre d'eau, puis pars dans ma chambre, me déshabillant en rythme avec la musique qui tourne encore sur l'ordinateur. J'entre dans la salle de bain, ouvre la douche, laisse l'eau devenir brûlante et m'y glisse. L'eau coule, mes mains glissent sur ma peau. Quand elles se posent sur mes seins, je frémis. Mon corps s'échauffe. Mes doigts descendent, trouvent mon clitoris. Je me laisse aller, et son nom m'échappe au moment de jouir.

- Putain... Pourquoi pas Channing Tatum, au moins ? soufflai-je en m'adossant au carrelage.

Je sors, m'enroule dans une serviette pour les cheveux, une autre autour du corps. Dans ma chambre, j'enfile un string, un short et un crop top. Tout en séchant mes cheveux, je souris devant mon reflet. Étrangement, je me sens confiante ce soir. Peut-être à cause de cette confrontation dans la salle de bain. Ou de Nolan qui reste... Nolan.

Je ramasse mes vêtements sales, les jette dans le panier et descends faire une lessive au sous-sol. La musique dans mes oreilles, je danse en attendant la machine. Quand soudain, je sens un regard sur moi.

Un jeune homme m'observe, sourire en coin, désignant mes écouteurs. Je les retire aussitôt, gênée, et croise ses yeux.

- Salut, dit-il d'une voix grave.

- Salut. Je pensais être seule un vendredi soir, répondis-je en m'excusant presque de ma tenue légère et de ma danse ridicule.

- C'était sympa à voir, réplique-t-il.

Je rougis, mal à l'aise. Ses yeux glissent sur mon corps. Je m'empresse de récupérer mon panier, bredouille une excuse et remonte. Une fois dans mon appartement, je referme vite la porte et inspire profondément.

La faim me tiraille, mais la fatigue gagne. Je me brosse les dents, puis me laisse tomber dans mon lit king size. Le sommeil m'emporte aussitôt.