Une Vie Pleine, Sans Lui
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Chapitre 3

Je suis restée assise sur le bord du lit pendant un long moment, écoutant le silence de l'appartement. Dehors, la ville vivait, mais ici, tout était mort. Marc ne m'a pas suivie. Il était probablement retourné sur le canapé, près de Chloé, rassuré de m'avoir "remise à ma place".

J'ai regardé mes pieds. Le sang avait séché, formant des croûtes sombres. La douleur était vive. Je me suis levée en grimaçant et j'ai boité jusqu'à la salle de bain.

En fouillant dans l'armoire à pharmacie, j'ai renversé une bouteille de lotion pour le corps. Elle s'est écrasée sur le carrelage, répandant son parfum floral et une crème blanche et grasse partout.

« Merde. »

J'ai commencé à ramasser les morceaux de plastique, les mains tremblantes.

La porte s'est ouverte brusquement. Marc se tenait là, le visage fermé.

« Tu ne peux pas faire attention ? » a-t-il sifflé. « Regarde le bazar que tu as mis. »

Il m'a regardée, accroupie au sol, essayant de nettoyer le désordre avec du papier toilette. Un regard de pur dégoût est passé sur son visage.

« T'es vraiment désespérée, » a-t-il lâché, avant de tourner les talons. « J'en ai marre. Je sors prendre l'air. »

La porte d'entrée a claqué. Il était parti. Avec elle, sans doute.

Je suis restée là, à genoux sur le sol froid de la salle de bain, entourée de crème et de débris. Je me sentais sale, brisée.

Quelques minutes plus tard, mon téléphone a vibré sur le comptoir. C'était lui. Un appel vidéo.

J'ai hésité, puis j'ai décroché.

Son visage est apparu à l'écran. Il était torse nu, les cheveux mouillés. Il était dans une douche. Il souriait, l'air suffisant.

« Alors, tu t'es calmée ? » a-t-il commencé.

Puis, l'image a bougé. Et pendant une fraction de seconde, j'ai vu. Une main de femme, avec des ongles longs et vernis de rouge, s'est posée sur son épaule.

Mon souffle s'est coupé.

Il a vu mon expression changer. Paniqué, il a immédiatement raccroché.

Mon téléphone est resté noir. Le silence était assourdissant. Il n'y avait plus de doute. Il n'y en avait jamais eu, en fait. Je m'étais juste voilée la face.

Une minute plus tard, un message est arrivé.

De Marc.

« Désolé, fausse manip. Je ne rentrerai pas ce soir, finalement. Gros dossier à boucler avec Chloé. On se voit demain. »

Alors que je lisais le message, un autre son est parvenu de son téléphone, qu'il avait dû laisser allumé par erreur. Un rire. Le rire cristallin et moqueur de Chloé, en fond sonore. Puis plus rien.

Je me suis assise sur le sol froid, le téléphone serré dans ma main.

Et je me suis souvenue.

Je me suis souvenue de nos débuts, à l'université. Marc était mon héros. J'étais timide, peu sûre de moi. Il était populaire, brillant, et il m'avait choisie, moi. Il me protégeait. Un jour, un garçon plus âgé m'avait importunée à la bibliothèque. Marc était intervenu. Il ne l'avait pas frappé, il lui avait juste parlé, calmement mais fermement, et le garçon n'était plus jamais revenu m'embêter. Marc m'avait prise dans ses bras et m'avait dit : "Tant que je serai là, personne ne te fera de mal."

Où était passé cet homme ? Quand était-il devenu ce monstre froid et manipulateur ?

J'ai dû m'endormir sur le sol de la salle de bain, épuisée par la douleur et le chagrin. Je me suis réveillée quelques heures plus tard, le corps ankylosé, le cœur lourd.

J'ai regardé mon téléphone. Plusieurs messages de Marc.

« Tu ne réponds pas ? Tu me fais peur, Léa. »

« Sérieusement, arrête ce jeu. C'est puéril. »

« Si tu crois que c'est en agissant comme ça que tu vas me faire changer, tu te trompes. Tu ne fais qu'aggraver les choses. »

Chaque mot était un reproche, une accusation. Aucune excuse, aucun remords.

Mon cœur, qui saignait depuis des heures, s'est soudain senti étrangement vide. Froid.

C'est à ce moment-là que j'ai su que c'était vraiment, irrévocablement, terminé.

Je me suis levée. J'ai ignoré la douleur dans mes pieds. Je suis allée dans la chambre et j'ai sorti ma plus grande valise du placard.

J'ai commencé à faire mes bagages. Méthodiquement. Sans larmes.

Vêtements, livres, mon ordinateur.

En vidant le tiroir de ma table de chevet, mes doigts ont heurté une petite boîte en velours bleu. Je l'avais oubliée.

Je l'ai ouverte. À l'intérieur, il y avait un collier. Simple, en argent, avec un petit pendentif en forme de fleur de cerisier. Un cadeau de Marc pour notre dixième anniversaire de rencontre. Je ne le portais jamais.

J'ai soulevé le faux fond de la boîte. En dessous, il y avait ce que je cherchais. La clé de la maison de mes parents, laissée à l'abandon depuis leur mort. Ma seule véritable maison.

Au moment où je refermais la boîte, la porte de la chambre s'est ouverte à la volée.

Marc était là. Le visage défait, les yeux injectés de sang. Il devait être rentré en catastrophe.

Il a vu la valise ouverte sur le lit. Il a vu la boîte dans ma main.

Son visage s'est tordu de fureur.

« Qu'est-ce que tu fais ? » a-t-il hurlé.

Il s'est précipité sur moi. Il a arraché la boîte de ma main.

« Tu me voles, maintenant ? »

Il m'a poussée violemment. J'ai perdu l'équilibre et je suis tombée en arrière, ma tête heurtant le coin de la table de chevet.

Une douleur fulgurante m'a traversé le crâne.

Il se tenait au-dessus de moi, tremblant de rage.

« Tu es exactement comme ton père ! Un voleur et un menteur ! »

Le monde s'est arrêté.

Mon père. La blessure la plus profonde, la plus secrète. Mon père avait été accusé de détournement de fonds dans son entreprise. Il s'était suicidé avant le procès, laissant ma mère et moi dans la honte et les dettes. Marc était le seul à qui j'avais tout raconté. Il m'avait consolée, m'avait juré que cela ne changeait rien.

Et aujourd'hui, il utilisait ça contre moi.

L'homme qui avait juré de me protéger venait de me donner le coup de grâce.

            
            

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