Je suis morte la gorge transpercée par un tire-bouchon.
La dernière image que j'ai vue était le visage de mon fiancé, Lucas, se déformant dans un sourire triomphant aux côtés de mon assistante, Camille.
Puis, tout est devenu noir.
Quand j'ai rouvert les yeux, j'étais de retour dans la cave de l'hôtel, l'endroit même où ma vie s'était effondrée. L'odeur familière de chêne humide et de vin m'a frappée.
Devant moi se tenait Madame Dupont, une voisine de mon village natal en Alsace, son visage pincé par la cupidité.
« Alors, Solange ? Ce vin, c'est un trésor, n'est-ce pas ? Mon mari l'a gardé pendant des décennies. »
Je fixais le verre dans ma main.
Le liquide ambré contenait une moisissure rare, une variante de la "maladie du bouchon" si virulente qu'elle pouvait contaminer toute une cave en quelques jours. Dans ma vie précédente, j'avais essayé de l'avertir.
Cette décision m'avait coûté la vie, ainsi que le vignoble centenaire de ma famille, réduit en cendres.
« Madame Dupont, ce vin est dangereux. Il doit être détruit immédiatement. »
Ma voix était calme, mais ferme.
Son visage s'est immédiatement crispé. « Détruire ? Tu veux juste nous le voler ! Tu es jalouse parce que nous avons un trésor et pas toi ! »
Son fils, Hugo, un jeune homme gâté et arrogant, a ricané à côté d'elle.
« C'est ça, elle veut nous arnaquer. On devrait demander un autre avis. »
C'était le signal. Le début de la fin.
Mais cette fois, je n'allais pas me battre.
J'ai posé le verre lentement sur la table. « Très bien. Si vous n'avez pas confiance en mon jugement, je vais demander à mon assistante, Camille, de s'en occuper. »
Le visage de Madame Dupont s'est illuminé. Elle a toujours préféré Camille, qui savait la flatter avec des mots mielleux.
J'ai fait un signe à Martin, mon jeune stagiaire. « Va chercher Camille. Dis-lui que nous avons une dégustation très importante. »
Martin m'a regardée, l'air confus, mais il a obéi sans poser de questions. Il était le seul à m'être resté loyal jusqu'au bout.
Dans ma vie passée, il avait été renvoyé par le directeur, l'oncle de Camille, pour avoir pris ma défense. Cette fois, je le protégerais.
Camille est arrivée, son sourire mielleux déjà en place. « Solange, on a besoin de moi ? »
Je lui ai montré la bouteille. « Madame Dupont souhaite votre expertise. Je suis un peu fatiguée aujourd'hui. »
Ses yeux ont brillé de suffisance. Elle a pris le verre, l'a agité avec un air faussement professionnel et a humé le contenu.
« Oh, quel arôme complexe ! Des notes de fruits secs, de miel... C'est magnifique. Un vin avec un potentiel de vieillissement incroyable. »
Ses paroles étaient un poison, mais cette fois, ce n'était pas moi qui allais le boire.
Madame Dupont a applaudi. « Tu vois ! Je savais que tu étais la meilleure, ma petite Camille ! Pas comme certaines qui veulent juste nous voler. »
J'ai observé la scène en silence, mon cœur froid comme la pierre.
Le piège était en place. Mais cette fois, ce n'était pas pour moi.