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La veille du festival des vendanges, mon grand-père m'a convoqué dans son bureau. L'air était lourd, chargé de l'odeur du vieux bois et du cuir. Il était assis derrière son immense bureau, le visage sévère, les mains jointes.
« Adrien, demain, tu dois faire ton choix. La famille attend. Nos partenaires attendent. Qui sera la future Madame de Courcy ? »
Devant lui, trois dossiers. Trois jeunes femmes. L'une d'elles était Chloé Dubois. Mon amie d'enfance. Celle que tout le monde pensait que j'allais choisir.
Je l'ai regardé droit dans les yeux.
« Ce ne sera aucune d'entre elles. »
Le silence est tombé. Mon grand-père a froncé les sourcils, une expression qu'il réservait aux très mauvaises affaires.
« Qu'est-ce que tu racontes ? »
« Je veux épouser Éléonore Vasseur. »
Son visage s'est figé. La surprise, puis la colère.
« Éléonore ? Ta "tata" Éléonore ? La meilleure amie de ta mère ? C'est une blague ? Elle a presque vingt ans de plus que toi ! »
Ce n'était pas une blague. C'était ma seule chance de ne pas tout revivre.
Car je me souvenais de tout. De ma vie d'avant.
Dans cette vie, j'avais choisi Chloé. J'étais fou d'elle. Je lui avais tout donné. Mon nom, ma fortune, mon cœur.
Notre mariage avait été un enfer. Elle me méprisait. Elle couchait avec Lucas Moreau, le fils de notre maître de chai, dans notre propre lit.
Puis il y a eu l'incendie. Un feu "accidentel" dans les chais. Lucas est mort.
Chloé est devenue folle de douleur. Elle m'a tout avoué. L'enfant qu'elle portait n'était pas le mien, mais celui de Lucas.
Puis elle a planté un couteau dans mon cœur.
En mourant, j'ai vu son sourire haineux. Elle s'est ensuite suicidée.
La dernière chose que j'ai apprise, c'est une lettre. Une lettre d'Éléonore. Elle s'était exilée après mon mariage. En apprenant ma mort, elle s'était donné la mort. Dans cette lettre, elle avouait enfin. Elle m'avait toujours aimé.
Maintenant, j'étais de retour. Revenu à ce moment précis. Le moment avant la catastrophe.
Cette fois, je ne ferais pas la même erreur.
Je devais protéger la seule personne qui m'ait jamais vraiment aimé. Et je devais me venger.
Mon grand-père me fixait, furieux.
« Explique-toi, Adrien. Et ton explication a intérêt à être bonne. »
« Grand-père, je sais ce que je fais. Chloé n'est pas celle que vous croyez. Elle ne m'apportera que des problèmes. Avec Éléonore, tout sera stable. Elle connaît la famille, elle est respectée. C'est un choix de raison. »
Je ne pouvais pas lui dire la vérité. Pas encore.
Il a soupiré, un long soupir fatigué. Il a vu quelque chose dans mes yeux. Une détermination qu'il ne me connaissait pas.
« Très bien. Fais comme tu veux. Mais si tu te trompes, tu assumeras seul les conséquences. »
Il a pris les trois dossiers et les a jetés à la poubelle. L'affaire était close.
En sortant du bureau, je suis tombé sur Chloé. Elle m'attendait dans le couloir, un sourire confiant sur les lèvres.
« Alors, Adrien ? Tu as parlé à ton grand-père ? J'imagine que tout est réglé pour demain. »
Elle s'est approchée, a voulu me prendre le bras. Je l'ai évitée.
Son sourire s'est effacé.
« Qu'est-ce qui se passe ? »
« Je n'épouserai pas Chloé Dubois. »
Elle m'a regardé, d'abord surprise, puis un éclair de compréhension a traversé ses yeux. Un éclair que je connaissais trop bien.
Elle aussi. Elle s'était réincarnée.
Elle a ri. Un rire arrogant.
« Oh, je vois. Tu joues la comédie. Tu veux me rendre jalouse en annonçant un faux mariage avec cette vieille peau d'Éléonore ? C'est mignon. »
Elle a sorti son téléphone.
« Très bien, jouons. Mais si tu veux que je revienne vers toi, il y a des conditions. Lucas a besoin d'un appartement à Bordeaux. Un bel appartement sur les quais. Achète-le pour lui. C'est ma première condition pour notre "futur mariage". »
J'ai soutenu son regard. Son arrogance était sans limites. Elle pensait vraiment que j'étais encore son jouet.
« D'accord. »
Ma réponse froide l'a surprise. Elle s'attendait à ce que je discute, que je sois blessé.
Mais le vieil Adrien était mort. Poignardé par elle.
Le nouvel Adrien était là pour la vengeance.