Chapitre 2 Under the Red Skies

13 octobre 2005, dans la région de Thizi Wezzu, en Algérie...

Le jour se lève sur Thizi Wezzu. Toutes les femmes du palais se lèvent et font des préparations, et les hommes vont chercher des vivres et matériaux. Ils préparent tous un truc du genre, un évènement très spécial. Toutes les mosquées sont fermées, et les épiceries exceptionnellement vides. C'est un grand mariage qui se prépare. Un mariage royalement royal, dirait-on. Des jeunes filles sillonnent des ruelles pour chercher des fleurs.

Pendant ce temps dans une maison, il y a une petite fille toujours dans son lit qui est brusquement réveillée par sa mère sur les nerfs.

- Illi* ! Que fais-tu toujours couchée ? Allez hop ! On se lève.

Embêtée par de forts rayons de soleil, la petite fille répond :

- Mmm....Imma*, pas maintenant... Referme les rideaux s'il te plaît.

- Ah bon ! Eh bien je constate que j'ai en face de moi une autre princesse de ce palais, madame. Bon si tu permets, nous en avons déjà deux grandes qui auront besoin de deux beaux pagnes rouge or. Et tu sais très bien que les tissus ne leur arriveront point tous seuls, non ?

- Maman....

- hmmm, SAMIRAH, attends. Tu as encore passé une nuit blanche à papoter à la fenêtre avec ton ami Imran ?

La mère et la fille continuent de parler quand elles sont stoppés par les pleurs d'un bébé. C'est Jalal, le dernier né. La mère s'exclame :

- Super, il s'est réveillé ! Hé le petit héros, bonjour. Comment tu vas ce matin, mon trésor? Tu as bien dormi ?

Samirah intervient.

- Bébé peut pas parler.

- Toi tu peux t'occuper de lui, s'il te plaît ? Vu que tu ne veux rien faire.

- Et papa et toi ?

- Nous allons dans le centre. C'est le mariage de tes parrains. T'as pas oublié. C'est pour ce soir.

Samirah regarde sa mère partir, toujours la poussière du sommeil dans les yeux. Elle était très fatiguée et elle devait encore regarder le bébé.

- Bébé Jalal, tu te rends compte ? Tu vois ce qui se passe ? Non mais regardez son minuscule corps. Tu es très petit et innocent.

Samirah tripote le nez du bébé qui se met à rire, et ensuite pleurer.

- Oh non non non, Bébé Jalal ! Je suis désolée. Oh non. Chhhhhhh.

Le bébé se calme quelques temps plus tard. Samirah prend un petit bout de pagne propre qu'elle éponge de liquide odorant et parcoure chaque dimension du corps de l'enfant qui sourit à nouveau. Soudain, elle entend un petit coup par la fenêtre. C'est juste un signal de son voisin et ami Imran.

- Eh Samy.... Ta journée commence bien ?

Samirah sourit en le regardant et se précipite jusqu'à la fenêtre.

- Salut Imran. Euh, pour la journée, je sais pas trop. Je viens de me faire réveiller par ma imma plus tôt que d'habitude....

- Comment ça plus tôt que d'habitude ? Il est 11 heures.

- Exactement. Maintenant je dois m'occuper du bébé comme mes parents sont sortis.

- Attends, là tu es seule ? Avec le bout de chou que tu as comme petit frère ? Attends-moi, j'arrive.

À peine il s'éclipse de sa fenêtre et là Samirah entend frapper à la porte.

- C'est qui ?

Aucune réponse. Alors elle hésite un instant à ouvrir par prudence. Plus tard, elle entend la voix d' Imran, ce qui l'emmène à ouvrir lestement la porte.

- Alors, il est où ce prince ? Je peux le garder avec toi hein ? Dis oui... S'il te plaît, Samy.

- Imran, il est juste devant toi. Je peux aller au lit ?

- Pfff paresseuse. Alors Bébé Jalal....

On frappe à nouveau à la porte et Samirah crie d'ennui. Imran ouvre et c'est Zhena, la tante de Samirah et Jalal.

- Tifawin* les enfants, votre mère est là ?

- Non, elle vient de sortir. Elle va au centre.

- D'accord merci beaucoup, gentil garçon et.... Toi allongée sur le lit ! Hey ! Sors retrouver les autres. Tu vas avec ton ami et le petit chercher des roses et des piquets dorés. Pas de dormeur en ce jour très spécial, compris ?

- Roh d'accord je me lève !

Tatie Zhena se retire à la minute. Imran se charge de chercher la poussette en bois qu'il avait construite pour Jalal un an plus tôt, y met des coussins et couvertures, avant d'y installer le bébé. Il se tourne vers Samirah qui se contente juste de mettre ses tongues roses, le visage résigné.

- On y va, l'ami. Dit-elle.

- Je ne sens plus ta dynamique aujourd'hui. Tu n'es plus si impliquée que d'habitude. T'as dormi à quelle heure hier ? T'as au moins prié j'espère.

- Nooon, bébé Jalal a pissé sur ma natte hier alors...

Imran se met à rire. Samirah revient voir le bébé tout excité qui finit par lui vomir dessus, au grand amusement de son ami.

- Hehe, bébé Jalal a vomi sur ta face.

- Super, je dois aller me laver maintenant.

- Une fille doit pas sentir du vomi. Vas-y je reste avec bébé.

Deux heures plus tard,

Imran, Samirah et Jalal sont fortement éblouis par l'éclat du soleil de treize heures. Imran a le réflexe d'apporter un mini parasol qu'il stocke sur la poussette pour mettre le bébé à l'ombre. En cours de route, ils sont salués par tous les voisins en mouvement et le bébé principalement. Samirah demande l'air ennuyée à son pote :

- Oui euh... On prenait quoi déjà ?

- Eh bien, on a dit piquet de bois dorés, je crois. Et avec des roses aussi.

- Hummmm et à quoi ils vont bien pouvoir servir ?

- Tu devrais cesser de faire des nuits blanches hhhhh. Tu sais, tu es réputée pour toujours remettre en question les principes de croyance.

- Je ne vois pas ce que tu essaies d'avancer au juste. Tu sais.....

- Sami.... Tu dois toujours et à jamais retenir au fond au fond dans ton cœur que ... La rose c'est pour l'amour et le piquet pour la protection. La grande Salamenis l'a établie. Et le doré c'est pour sa solidité. Pigé ?

Imran et Samirah se fixent pendant un moment jusqu'à ce que le garçon de 10 ans sourie.

- Tu es vraiment pétillante aujourd'hui.

- Ah tu trouves ? Vraiment ?

- Bah ouais et c'est génial.

- Moi aussi je te trouve plutôt cool. Pas juste parce que tu es mon meilleur ami, tu es gentil et tu m'apprends toujours un tas de choses. Sur la culture, croyance, nourriture et tout le reste. En plus tu m'accompagnes sous ce soleil cauchemardesque avec bébé Jalal.

- Sami.... Je serai toujours là pour toi, ne l'oublie jamais.

- Merci.

- Et maintenant, tous les trois on va à la chasse aux roses et aux piquets. Je me charge de ces derniers, toi et le petit prince vous cueillissez des roses. Ça te va comme ça ?

Il y a avait de la lueur dans les yeux et le sourire d'Imran. Ensemble, ils s'éloignent dans les champs fleuris un peu loin du village. Ils s'amusent, rigolent, jouent à cache-cache etc.... Le temps passe, le soleil estime déjà qu'il est temps pour lui de se coucher.

Au village, il reste déjà quelques minutes avant le passage des mariés. Les parents étaient déjà revenus du Centre mais ne retrouvent pas leurs enfants. C'est bizarre. On se demande alors tous où les enfants sont passés. Tatie Zhena vient auprès d'eux.

- Nadja, bonsoir ! Tu es enfin revenue.

- Bonsoir Zhena, ça me fait plaisir de te voir.

- Que se passe-t-il ? Pourquoi cette tête, ma chérie ?

- Je suis très inquiète, Samirah et Jalal ont disparu.

- Comment ? Disparu ?

- Ouais depuis ce matin, mon mari et moi sommes partis au Centre, histoire d'assister à une cérémonie des parrains. J'avais laissé Samirah ici et elle devait s'occuper du petit Jal.

- Aaaaaaaaaaaaah ok. Il n'y a pas de quoi s'inquiéter, ma Nadja.

- Tu sais où ils se trouvent ?

- Mais oui bien sûr. J'étais passée après votre départ pour vous chercher. Alors je suis tombée sur son ami qui était avec Samirah et le bébé. Je les ai envoyés chercher les piquets et les roses pour le mariage. Vous n'avez pas à vous en faire.

- Ah ! Elle est avec Imran, ça me rassure un peu. Merci Zhena.

Il est 17h45. Le coin du mariage est incroyablement rempli d'habitants de Thizi Wezzu. Tous les membres de famille des amoureux sont aux premières loges. Les plus petits ont quant à eux un coin spécial pour s'asseoir et manger des goûters. Il y a des femmes et hommes voilés avec des pagnes qui tournent, dansent.

Les routes sont dégagées car des éléphants transportent des parrains et leurs protégés. Des jeunes garçons torses nus des coins s'occupent d'agiter les drapeaux algériens et de mettre de la musique traditionnelle. Des femmes, dont Nadja et Zhena, accompagnent les parrains et leurs protégés jusqu'à l'autel.

Jusque-là, le mariage se déroule à merveille et tout le monde est heureux. Cependant, un peu plus loin, au niveau des collines, une troupe d'hommes en noir avec des armes observe en direction de la population, souriant. Ils s'approchent doucement et cherchent un bon angle. Le chef dit à ses acolytes :

- Faut pas qu'on oublie pourquoi nous sommes là aujourd'hui. Vengeance, ce mot ci est écrit juste sur nos fronts. On doit pas avoir de pitié. Vieux, jeunes, on n'épargne personne. D'accord ? Maintenant, on va leur montrer qui est roi sur cette table. Ils n'auront plus du tout du pouvoir sur la vie des autres.

- COMPRIS ! CHEF !

- On pourrait y laisser notre vie. Attention.

L'un d'entre eux trouve enfin un bon angle et sort sa lance-roquette. Il lance le premier coup direction l'agglomération. Telle une étoile filante, il heurte et effondre la tour au-dessus des mariés. Les deux ne survivront pas. Tout le monde est terrorisé. Les hommes en noir commencent à lancer des bombes et roquettes en continu, dans le but de devaster le village. Tout le monde crie de panique, au grand plaisir des bourreaux.

Nadja est horrifiée face à la mort de sa sœur, écrasée dans les décombres de la tour. Elle en ressort grièvement blessée et manque des flammes. Elle court dans les environs à la recherche de son mari et principalement ses enfants qu'elle n'a toujours pas revus depuis. Elle crie de toutes ses forces : SAMIRAH ! SAMIRAH ! SAMIRAH !!! Alors qu'elle veut rentrer chez elle, elle est descendue par une énorme boule de feu.

Samirah, Imran et le bébé Jalal sont toujours dans les champs et décident finalement de retourner pour ne pas manquer le mariage.

- Samirah, on s'est vraiment bien amusés cette journée.

- Ouais, Imran et, il faut maintenant enlever ce parapluie sur la poussette. Je crois qu'il fait déjà nuit.

- Tu as raison. Hhhhhhhh. Attends, j'ai quelque chose pour toi. Ferme les yeux.

- Quoi.....

- S'il te plaît, ferme les yeux. C'est une surprise.

- D'accord mais vite.

- D'accord, ouvre ta main. Et lève un peu la tête.

Elle fait ce qu'Imran lui demande. Elle finit par ouvrir les yeux à sa demande et voit une très grande et jolie rose et sur une des pétales, il y a gravé son nom. Elle découvre également qu'elle a un collier de tige à fleurs merveilleux. Elle est très contente et embrasse fortement Imran.

- C'est magnifique, Imran. Merci beaucoup.

- Tkt et j'ai même fait pareil pour Bébé Jal....

Il n'a même pas eu le temps de terminer car le bébé s'est mis à pleurer, et très fort. Samirah et Imran regardent des lueurs jaune or au-dessus de Thizi Wezzu. Ils n'en croient pas leurs yeux. Il se passe probablement quelque chose de grave, très grave. Ça se complique encore plus lorsque les bruits des explosions y sont entendus. Les enfants pensent tout de suite à leurs parents et sont terrifiés.

- Samirah, ça doit être dangereux d'y aller. Faut que tu restes là avec bébé Jalal.

- NON NON NOOOOOOOOOON !

- Ne pleure pas, je t'en prie. Du calme ! Il faut que j'aille voir.

Samirah le retient par la main, en larmes, à côté du bébé qui pleure également. Un autre boom est entendu.

- J'arrive.

- Non, ne m'abandonne pas....

- Je te promets de revenir. Occupe-toi de ton petit frère.

Imran court dès lors en direction de l'agglomération. Un autre boom encore plus violent se fait entendre, ce qui inquiète encore plus Samirah, complètement dévastée à l'idée d'avoir perdu tous ses proches. Son meilleur ami, Imran, disparaissait dans des ruines enflammées.

FLASH-FORWARD

13 octobre 2021 à Bedford Avenue, à Williamsburg, dans le quartier de Brooklyn, à New York, aux États-Unis

Jalal, un garçon ordinaire de 16 ans, est poursuivi dans les rues désertes de Brooklyn par un gang. La course poursuite a commencé il y a déjà trois heures. Le garçon aurait déjà dû rentrer de l'école. Mais en ce moment, il lutte pour sa vie. Mais ses bourreaux ne veulent pas le laisser tranquille. Il traverse, inquiet, le pont Hudson de Brooklyn sans même savoir où il compte s'arrêter enfin. Il trébuche une fois et tombe, manquant ensuite de se faire faucher par un semi-remorque et sentant de plus près encore les pas de ses agresseurs. Il doit à nouveau se lever et continuer à courir.

Après une longue distance déjà parcourue, le malheureux s'arrête devant une cathédrale et y remarque de la lumière à l'intérieur. Il s'empresse alors d'aller frapper à la porte.

- À L'AIDE ! OUVREZ-MOI S'IL VOUS PLAÎT ! NE ME FAITES PAS ÇA, ALLAH ! S'IL VOUS PLAÎT, OUVREZ LA PORTE ! OUVREEEEEZ !

- C'EST QUOI TOUT CE CHAHUT ?

Le jeune garçon s'écroule devant l'entrée, qui finit par s'ouvrir et c'est un prêtre plutôt âgé qui se met et tend la main à Jalal. Il le relève et le fait entrer.

Le garçon s'assoit à une table sur l'estrade, tandis que le prêtre lui donne un verre d'eau. Ce dernier est ensuite assis, entrain de le regarder l'enfant épuisé avec pitié. Il commence par prendre la parole :

- Tu te sens déjà mieux, mon garçon ? Oh là là, Seigneur, regarde cet enfant triste, apeuré, protège-le Seigneur ! Toi Seul sait ce qu'il y a dans le cœur des gens, Seigneur !

La prière est interrompue par Jalal qui tousse. Le prêtre continue :

- Mon fils, qu'est-ce qui t'es arrivé ?

- Ils veulent me tuer, mon père. Ces gens veulent me tuer, ils veulent que je sois mort...

- Cesse de dire cela, mon garçon...

- Mais c'est la vérité.

- Vu ton état, tu as fait plus qu'un marathon, où habites-tu, mon garçon ?

- Bedford Avenue, à Williamsburg

- Oh Ciel, c'est à plus de 20km d'ici. Tu vis avec ta famille, au moins ?

- Juste ma grande sœur, elle ne sait pas que je suis ici, si loin de la maison. Je crois qu'elle est inquiète, très inquiète.

- D'accord, nous allons l'appeler. Mais arrête de pleurer, mon garçon. Tout ira bien. Je vais passer un petit coup de fil. En attendant, tu peux prier là-bas.

- D'accord.

- Ok, ne pleure plus.

Le prêtre va vers le téléphone fixe pour appeler quand soudain, il entend des chuchotements et se retourne. Il est stupéfait de voir le garçon, ayant pris une natte, entrain de s'agenouiller, les yeux fermés, chuchotant d'une langue incompréhensible, il a fallu que le gentilhomme prononce ALLAH, ce qui a tout basculé au sein de la cathédrale catholique.

- HEY SATAN !

Le garçon prit peur et arrêta brusquement sa prière. Il était choqué par ce qu'il venait d'entendre. Le prêtre s'approchait de lui avec une trique et lui a demandé d'enlever son kamis* blanc, ce qui a déstabilisé à l'occasion le garçon qui hésite. Le prêtre crie encore :

- T'ES SOURD OU QUOI, L'ISLAMISTE ? DAESH OU JE NE SAIS PAS QUOI ? QUI T'A ENVOYÉ ICI ? HEIN ? ENLÈVE CE BOUBOU TOUT DE SUITE, DE PEUR QUE JE VIENNE L'ARRACHER DE MES PROPRES MAINS !

- Mais qu'est-ce qu'il a, mon kamis, mon père ?

- Je ne suis pas ton père ! Je ne suis pas père de misérables. Comme vous aimez les morts, je vais t'en donner. Maintenant sors de cette cathédrale.

- Mais monsieur, ils vont me tuer....

À peine il finit de parler, le prêtre s'éclipse et reviens avec un fusil de chasse. Il tire dans la direction du petit garçon, ce qui a manqué de le viser sur le front, heureusement, il s'était jeté au sol.

Au même moment, la porte centrale est entrain de subir des coups de l'extérieur. Jalal est horrifié lorsqu'il entend soudainement : On sait que tu es là, le jaune ! Ouvre cette porte tout de suite, qu'on te fasse la peau, p'tit morveux ! Que va alors faire le pauvre petit garçon ? Rien.

Derrière lui, il y a le prêtre qui recharge son fusil de chasse et devant lui ses bourreaux qui l'ont au final retrouvé. Au moment où le prêtre s'apprête à tirer, la porte s'ouvre et en même temps le premier tir est lancé, Jalal esquive la balle qui se planque dans la tête de l'un d'entre les trois hommes, le tuant à l'occasion. Jalal en profite pour se glisser entre les deux restants et continuer son extrême et harassant "jogging de l'horreur" .

Il rebrousse le chemin qu'il a pris précédemment, retraverse le pont de Brooklyn où il trébuche à nouveau, tombant la tête la première, manquant à nouveau de se faire achever par un semi-remorque qui ne prêtait pas attention à lui. Il devait se relever et continuer s'il voulait vivre encore. Il est extrêmement fatigué et devient maintenant sujet aux hallucinations.

Il est maintenant 23h. Il n'y a pratiquement plus personne dehors. Une jeune femme, Samirah, court dans chaque coin de rue, criant le nom de Jalal partout. Elle demande à chaque passant, espérant que l'un d'eux lui donne ne serait-ce qu'une simple piste, mais sans succès. Plus tard, alors qu'elle erre dans les rues, elle entend une discussion intéressante entre deux enfants du coin, deux garçonnets hispaniques assis sur les marches d'un escalier.

- Hey, adivina que?

Hey devine quoi?

- ¿Qué?

Quoi ?

- Hay tal acecho en Brooklyn.

Il y a une course poursuite dans Brooklyn.

- ¿Estás seguro?

Tu es sûr ?

- Sí. Un niño con un vestido largo amarillo es perseguido por tres hombres que dicen que el niño es musulmán.

Oui, un garçon vêtu d'une longue robe jaune est poursuivi par trois hommes qui disent que le garçon est musulman.

- ¿Estás bromeando?

Tu déconnes !

- No, lo juro. Simplemente lo atraparon mientras el niño lloraba mucho. Lo empujaron salvajemente a un pozo local. El vecino llamó de inmediato a la sala de emergencias.

Non, je jure. Ils l'ont juste attrapé alors que le garçon pleurait beaucoup. Il a été sauvagement poussé dans un puits local. Le voisin a immédiatement appelé les urgences.

- ¿Crees que está muerto?

Tu crois qu'il est mort ?

- Seguramente. Hay muy pocas posibilidades de que sobreviva. Y luego los hombres no fueron vistos de nuevo, huyeron poco después.

Sûrement. Il y a très peu de chance qu'il survive. Et puis les hommes n'ont pas été revus, ils se sont enfuis peu de temps après.

- Es triste para la familia del chico.

C'est triste pour la famille du garçon.

- Sí. Ahora mismo hay una gran multitud donde está acostado el niño.

Oui, en ce moment il y a une grande foule où le garçon est étendu.

Samirah est choquée par ce qu'elle entend. Elle court vers le duo pour leur demander où tout cela se passe. Les deux garçonnets pointent le doigt à une ruelle où même de là on peut voir au moins une dizaine de personne et des couleurs d'une ambulance.

Intriguée, elle court dans leur direction pour regarder le corps en question. Elle bouscule toute la foule devant elle. Elle voit un garçon inanimé gisant au milieu de la population choquée, il est tout mouillé et sale, une jambe affreusement déboitée, venant d'être sorti du puits, pratiquement nu.

Il a fallu un petit coup d'œil aux inscriptions sacrées sur le bras gauche et une partie du cou pour que Samirah reconnaisse avec horreur son petit frère Jalal.

Elle s'effondre en larmes face à cette découverte alors que la pluie approche. Les ambulanciers vérifient le pouls du garçon et le soulèvent pour l'emmener dans le véhicule. Samirah veut aller rester auprès de son petit frère, mais un ambulancier l'en empêche strictement.

L'ambulance démarre alors que les premières gouttes de pluie frappent l'agglomération. La jeune femme en détresse regarde au loin l'ambulance avant de lever ses yeux au ciel.

Jalal se retrouve dans un couloir tout vert qu'il décide de suivre. Peu de temps après, il aperçoit une vue d'une ville dans une région qu'il ne connait pas. Il y voit au loin des enfants qui jouent dans un beau champ de fleurs. Ils étaient trois : une jeune fille, un jeune garçon, avec un un bébé dans son berceau.

Jalal cligne des yeux et l'image change en flammes dans cette même région. Plusieurs personnes meurent de façon atroce. Et derrière lui, il voit plusieurs hommes en noir sortant des couteaux et disant : on veut pas de gens comme toi dans notre société... Jalal recommence à courir très rapidement, puis il finit par entendre plusieurs voix tout autour, dont celle de sa grande sœur.

Il se réveille dans une chambre d'hôpital. Il est vraiment très mal en point avec la jambe droite en plâtre maintenue vers le haut. À chaque fois qu'il essaie de parler, tout son corps lui fait mal.

Ça va maintenant jusqu'à son mental lorsqu'il entend des infirmiers à l'extérieur discuter :

- C'est un vrai miracle auquel on a fait face aujourd'hui.

- Je confirme. Je n'avais encore jamais connu un garçon qui a survécu dans ce genre de situations comme celle-ci jusqu'à il y a quelques minutes.

- Il demeure inconscient toujours jusqu'à présent. Et honnêtement, ce brave gars risque de décliner de force.

- Où veux-tu en venir ?

- Ce type ne peut rester longtemps occupé dans cet hôpital.

- Et je peux savoir pourquoi ?

- Tu oublies comment ça marche dans cet hôpital ? Tu sais très bien où je veux en venir. Et le patron ne va pas apprécier s'il apprend qu'on garde un jaune dans le coin.

Une larme coule de derrière le masque de Jalal, piqué de tubes sur tous les côtés, il murmure avec tristesse le nom de Samirah.

Cette dernière arrive enfin dans l'hôpital. Elle interroge chaque infirmier qu'elle croise dans les couloirs avant de crier au sein de l'établissement : JALAL ME VOILÀ !

Elle tombe enfin sur la réceptionniste revenue de sa pause.

– Bonsoir. Dîtes-moi, En quoi puis-je vous aider, madame ?

- Oui euh... Bonsoir, je suis venue chercher à voir mon petit frère. On vient de l'amener dans cet hôpital.

- Euh... Il a quel âge ?

- 16 ans, madame.

La réceptionniste sort un grand registre et demande :

- Madame, comment s'appelle t-il ?

Samirah commence à regarder dans tous les sens. La dame demande à nouveau le nom de son petit frère.

- Jalal Al-Karazim

La dame commence dès lors à tousser et est apeurée, comme si Samirah avait dit quelque chose de grave. Tout le monde autour commence à fuir, n'ayant probablement pas compris qu'il s'agissait d'un nom complet qu'elle donnait.

Tout le monde y a vu de l'horreur, un signal terroriste. Quelques temps plus tard, Samirah finit par se mettre dans une colère noire, ce qui n'a pas vraiment arrangé la situation. Elle attrape la réceptionniste par le col.

- Je ne suis pas venue chercher les palabres, je ne suis pas d'humeur, VOUS COMPRENEZ ? C'est bien l'anglais votre langue que je parle. ME POUSSEZ PAS À BOUT !

- LÂCHEZ MOI , MADAME, S'IL VOUS PLAÎT, Vous me faîtes mal, très mal.

- Laissez tomber, je vais le trouver moi-même. Bande de fous que vous êtes.

Samirah vagabonde alors de salle en salle pour retrouver Jalal, mais elle est suivie de près par des agents de sécurité.

Elle cogne la dernière porte en prononçant le nom de Jalal, mais elle entend des bas gémissements. Elle appelle à nouveau Jalal. Ce dernier finit par réagir en criant en retour le nom de sa sœur. Elle ouvre la porte et est soulagée de revoir son frère toujours vivant et conscient.

- Samirah, j'ai cru que j'allais mourir...

- Non, ne dis pas ça, Jalal. Nous sommes réunis à nouveau maintenant. Plus rien ni personne ne pourra nous séparer encore. Je ne veux pas te perdre.

- Moi non plus, je ne veux pas te laisser toute seule.

Les deux font un câlin et Jalal reprend la parole.

- J'ai entendu quand deux infirmiers ont parlé à l'extérieur.

- D'accord, et qu'est-ce qu'ils ont dit ?

- Des choses horribles sur nous.

- Comment ça, les choses horribles ?

- Je ne serai pas traité ici longtemps car ils n'acceptent pas de jaunes dans l'hôpital.

- Qui est-ce qu'ils appellent Jaunes ? Nous, de si belles créatures ? Ce n'est pas très grave, je vais personnellement m'occuper de toi.

À ce moment, des agents de sécurité surgissent pour faire sortir Samirah de la salle et une altercation a lieu. Pendant ce temps, des infirmiers viennent en masse et retirent les canaux de Jalal, le libèrent entièrement avant de sauvagement l'expulser aux côtés de sa sœur. Déçue, Samirah dit à son frère :

- Bismillah* ils ne connaîtront pas la paix. Tiens bon, Jalal.

Les deux malheureux sortent avec difficulté de l'hôpital. Jalal commence à gémir d'une douleur atroce. Un vieil homme passant par là, prend pitié des jeunes gens et aide la jeune femme à prendre le garçon et le mettre dans sa carcasse blanche. Ils se dirigent, en plein milieu de la nuit, enfin à la maison.

Samirah, après avoir fait sortir Jalal, qui hurle de douleur avec sa jambe toujours tordue, remercie le vieil homme qui s'en va ensuite.

FLASH-BACK........

13 octobre 2005, à 22h, un peu plus loin de la région Tizi Ozou, en Algérie.

Samirah reste dans les bois, près de l'entrée, terrorisée par ce qu'il vient de se passer. Son ami Imran lui avait promis de revenir et est rentré dans la ville. Mais hélas, il n'a toujours pas refait surface depuis, entre cette grosse fumée noire et nauséabonde et plusieurs maisons continuant d'exploser et s'autodétruire. Samirah crie avec détresse le nom d'Imran plusieurs fois, mais sans aucune réponse.

Elle entend tout à coup des pas et regarde des hommes en noir venir avec des masques à oxygène. Avec le bébé, elle s'éloigne discrètement de la planque et se cache encore plus loin près d'une clairière. Elle se pose à un arbre et pleure à chaque fois qu'elle entend d'autres coups de feu. Les bruits bien que lointains, terrifient le bébé, qui pleure à son tour.

Les deux enfants deviennent incontrôlables. Ils ne savent plus quoi faire, ni où se cacher, ni même s'il y a encore des survivants, y compris sa famille et son meilleur ami. Les deux se retrouvent dorénavant tous seuls. Bien qu'elle pleure, Samirah va essayer de calmer son frère, surtout qu'elle vient repérer des pas dans la zone. Ce serait d'ici que les hommes en noir sont venus.

La silhouette de l'un d'entre eux finalement repérée, la jeune fille prend ses jambes à son coup avec le bébé dans la poussette qui est toujours entrain de pleurer. Elle court sans regarder derrière elle, et sans même savoir où elle va s'arrêter. Ce qui est sûr, c'est qu'elle est entrain d'être poursuivie par ces hommes vu qu'ils viennent de crier "Hé ! LA FILLE AVEC LA POUSSETTE DE BOIS"

Sa vie et celle de son frère désormais en dépendent. Quelques temps plus tard, l'un des bourreaux lance un projectile assez fort pour casser la poussette de bois où se trouve Jalal.

Samirah est désespérée, elle doit donc prendre le temps pour soulever le bébé et ainsi continuer à courir.

D'arbres à arbres, rivières après rivières, Samirah est fortement épuisée et arrive enfin devant un pont apparemment fragile car en bois relié de cordes. Ne voyant plus les bourreaux derrière elle au loin, elle traverse délicatement ce pont très grand et au-dessus du vide, tout en faisant très attention.

Elle atteint déjà le milieu du parcours quand elle entend à nouveau au loin : ON L'A RETROUVÉE ! ELLE EST LÀ-BAS SUR LA PASSERELLE !

- ELLE A L'AIR FRAGILE ! IL FAUT DÉTRUIRE LA PASSERELLE AVEC DES FUSILS ! ON VA FAIRE LÂCHER CES CORDES ! GO GO GO !

Samirah ne peut pas en croire ses oreilles. Mais elle sait également qu'elle ne peut pas aller plus vite. Sachant qu'ils sont déjà très loin d'elle, elle se baissa alors avec le bébé et rampa le reste de la passerelle, le bébé toujours dans les bras. Elle a déjà très sommeil et l'enfant pleure toujours sans cesse.

Les hommes tirent alors en direction du pont qui se détériore rapidement. Samirah est en panique et a le réflexe de propulser le bébé dans le noir jusqu'à la terre ferme, ce qui le fait encore pleurer de douleur. Elle venait de faire quelque chose de très risqué autant pour le bébé. Elle venait de balancer un bébé couvert, mais ça s'est plutôt bien passé vu qu'elle entend toujours des pleurs de loin.

Samirah sent qu'elle est entrain de descendre et comprend lors qu'elle va tomber, alors que les hommes continuent de tirer. Quelques temps plus tard, les tirs s'estompent. Samirah est restée accrochée aux cordes et monte difficilement vers la falaise.

Elle reprend le bébé, soulagée enfin de les avoir semés, ces hommes - partis étant persuadés qu'elle et le bébé sont morts dans le vide - Elle erre dans la forêt où elle se retrouve à nouveau confrontée à une bête sauvage.

Elle réussit cependant à s'en débarrasser en lançant un cri très fort et sauvage, ce qui fait fuir l'animal. D'où elle est, elle peut apercevoir la pleine lune, planant au-dessus de toutes ces branches d'arbres. Elle a extrêmement froid et décide de se placer dans un endroit sûr de la forêt et d'y faire du feu. Elle couvre le bébé et se couvre elle-même avec une vieille natte et s'endort, non sans avoir chanté une berceuse à son petit frère afin de le calmer et de sorte qu'il s'endorme.

FLASH-FORWARD.......

14 octobre 2021, à 3h du matin, dans Bedford Avenue à Williamsburg, dans le quartier Brooklyn, à New York, aux États-Unis....

Jalal est sur le canapé du salon, endormi, torse nu et transpirant à grosses gouttes. Il est dans un grand inconfort, surtout en raison de sa jambe ignoblement déplacée qui lui fait toujours très mal. Ses yeux finissent par s'ouvrir. Il entend un grand bruit et regarde une des fenêtres, grande ouverte.

Il entend des pas et voit des silhouettes toutes noires déambuler à travers les pièces de l'appartement.

Ces silhouettes finissent par s'arrêter devant le garçon handicapé qui entre alors dans une grande panique et crie au secours. L'un d'entre eux crie :

- LA FERME ENFIN !!! TU CROYAIS T'EN ÊTRE SORTI ? APRÈS AVOIR TUÉ NOTRE AMI ?

- Je ne l'ai pas tué, je n'ai rien fait...

- TAIS-TOI ET MEURT ! LES GENS COMME TOI N'ONT PAS LEUR PLACE EN AMÉRIQUE !!!

Les deux hommes sortent des fusils à pompe et commence à vider leurs chargeurs sur le pauvre garçon en pleurs et en douleur qui demande de l'aide.

Jalal se réveille à nouveau. Il ne s'agissait en réalité que d'un affreux et malheureux cauchemar. Il crie, devenant incontrôlable. Sa grande sœur se lève à son tour et sort de sa chambre en vitesse pour aller auprès de lui. Il était complètement paniqué et peinait à se calmer.

Samirah lève ses yeux au ciel et s'agenouille auprès de Jalal. Elle place ses deux mains sur la tête du garçon en larmes et lui chante la berceuse semblable à celle que son ami Imran lui avait apprise pour l'enfant il y a 16 ans :

لماذا تبكين وأنت لست وحدك؟

limadha tabkin wa'ant last wahdaka?

Pourquoi pleures-tu quand tu n'es pas seul ?

لماذا انت حزين عندما تكون برفقتك؟

limadha ant hazin eindama takun birifqatika?

Pourquoi es-tu triste quand tu es accompagné ?

العالم من حولك في قدرتك على التحكم.

alealam min hawlik fi qudratik ealaa altahakumi.

Le monde autour de toi, c'est à toi le pouvoir de contrôler.

الدموع موجودة فقط لتنجس كل شيء

aldumue mawjudat faqat litunjis kula shay'

Les larmes sont juste là pour tout souiller

الفرح موجود لجعل كل شيء على ما يرام

alfarah mawjud lijael kuli shay' ealaa ma yuram

La joie est là pour tout arranger

إذا ابتسمت أكثر ، سينفتح العالم عليك

iidha abtasamt 'akthar , sayanfatih alealam ealayk

Si tu souris plus, le monde s'offrira à toi

إذا بقيت زن ، فإن العالم سينفتح عليك

iidha baqiat zin , fa'iina alealam sayanfatih ealayk

Si tu restes zen, le monde s'offrira à toi.

Jalal a les yeux tristes fixés sur sa grande sœur qui chante, lui tenant la main. Elle lui chantait cette chanson toute sa vie jusqu'à présent. Jalal commence à esquisser d'un léger sourire avant d'incliner à nouveau sa tête pour se rendormir. Pendant ce temps Samirah, n'a plus l'envie de retourner dans sa chambre et dort là, à genoux, la tête posée sur le torse de son petit frère.

Au petit matin, Jalal finit par rouvrir les yeux, réveillé par des rayons du soleil levant et voit la maison déjà rangée et la musique en marche. Il voit derrière elle sa sœur entrain de faire le ménage dans la cuisine en dansant. Cette dernière le voit à son tour et lui sourit.

- Salam Aleykoum, le futur roi. Tu as bien dormi finalement ?

- Bonjour Sam. Oui merci beaucoup et toi ?

- Aaah, un peu ouais. Je crois même que j'ai un petit torticolis. J'ai dormi de façon très particulière hahahaha. Tiens, le petit-déjeuner est prêt. Tu peux te lever ou bien je te l'apporte ?

- Tu te moques de moi, c'est pas cool.

- Désolé Jalal, dit-elle en riant.

Elle prend un bol de céréales avec une bouteille de lait, ainsi qu'une assiette d'oeufs brouillés et des tartines. Elle les pose sur la table du salon face à Jalal et aide ce dernier à se relever et se placer en position assise. Elle s'asseoit ensuite à côté de lui et continue.

- J'ai parlé avec ton amie Syntyche. Elle m'a dit que le lycée où vous deviez aller ensemble après votre BEPC a fini par clore les inscriptions.

- Oh non !

- Je sais, alors je pense pas vraiment qu'on ait encore le choix. Je pourrais t'inscrire dans un autre lycée et pourquoi pas l'école à domicile. À mon avis c'est moins risqué, cette méthode. Ça te fera moins de problème.

Jalal semble avoir la tête ailleurs.

- Il y a un truc qui ne va pas ? Qu'y a-t-il ?

- Eh bien, Syntyche est ma meilleure amie, malgré elle mais... Je ne sais pas trop comment je vais faire seul dans un nouveau lycée, et comme si ce n'était pas déjà stressant, je suis en retard déjà sur le programme de seconde. Si ça se trouve même, ils ont déjà commencé à faire des devoirs....

- Cesse de t'inquiéter pour ça. Et puis après tu as tout pour justifier ton retard. Ça va aller. C'est mieux une école privée, non ?

- Privé ? C'est au-dessus de nos moyens financiers. On n'a même pas de papiers officiels et légaux.

- Je ne suis pas loin d'en avoir, écoute. Encore quelques démarches. Ça va prendre du temps, c'est vrai. Mais il faut tenir bon, tu comprends ?

- C'est dur.

- Peut-être bien. Mais ensemble on va s'en sortir. Je te le promets. Maintenant, mange. La journée va être longue, je vais faire le tour des lycées. Prends bien soin de toi.

Samirah sort de l'appartement et prend sa moto. Elle va dans le premier lycée privé qu'elle trouve. Elle va à l'administration et rencontre le principal.

- Bonjour monsieur.

- Bonjour madame, vous êtes venus vous inscrire ?

- Oh non non pas moi, mais mon petit frère.

- Ah d'accord. Dîtes m'en un peu plus.

- Il a 16 ans, euh, il a eu son BEPC donc voilà il va en seconde.

- Euh, est-ce qu'il a déjà été dans un collège privé ?

- Euh non.

- D'accord bien... Je peux avoir ses coordonnées ? Je sais pas, photos, acte de naissance, bulletins etc ... ?

- Oh oui oui, tenez, tout est bien là. Regardez.

Elle donne une petite pile de papiers que le principal finit par lire un à un. Il écarquille ses yeux bruns et regarde Samirah.

- Wow, c'est impressionnant.

- Quoi ? Demande-t-elle avec surprise.

- Il est musulman.

- Oui.

- Attendez je vais regarder quelque chose dans le registre, vous permettez ?

- Oh! Oui, bien sûr.

Il sort un instant du bureau. Quelques temps plus tard, il revient mais accompagné des vigiles, à la grande surprise de Samirah. Cette dernière demande :

- Mais que se passe-t-il ?

Le principal fait un signe de doigts aux vigiles qui font soudainement sortir Samirah. Ses papiers lui sont également jetés à la figure. Déçue et embarrassée, elle reprend chaque feuille et retourne à sa moto, puis continue sa recherche.

Jalal est à la maison quand il entend frapper à la porte.

- Qui est-ce ?

- C'est Syntyche. Ouvre-moi.

- Tu peux le faire, toi ? Parce que moi je ne peux pas.

Syntyche soupire avant d'ouvrir la porte. Elle est stupéfaite par ce qu'elle voit.

- Wow ! Qu'est-ce qui t'es arrivé ? Tu t'es battue avec un cerf ou quoi?

- Dans Brooklyn ? Vraiment tu m'as beaucoup manqué.

Syntyche efface son sourire en regardant l'état actuel de son ami.

- J'aurais dû être là ce soir là, dit-elle le visage baissé.

Syntyche en réalité est un garçon manqué. Elle est forte, mesquine et tempérée. En dehors de Samirah, c'était elle sa protectrice contre ses bourreaux auxquels il devait faire face. Mais aujourd'hui elle est déçue de ne pas avoir pu empêcher tout cela. Jalal lui répond :

- Je suis dans un état douloureux et embarrassant mais c'est toi qui est déçue et triste ? Syntyche, tu ne pouvais pas savoir. Personne ne pouvait savoir.

- Jalal, tu sais bien que ce n'est pas la première fois que ce genre de choses t'arrive. C'est comme ça depuis longtemps. Et en plus, je t'ai toujours protégé. Pourquoi il a fallu que ce jour soit une exception ?

- Écoute, nul ne t'a engagée pour être garde du corps, on t'a choisie pour être ma meilleure amie de la terre.

Les deux se font un important câlin.

Lexique :

Un Kamis est un vêtement traditionnel musulman pour hommes

Bismillah : Au nom d'Allah (Dieu dans la version musulmane)

1. Illi : ma fille

2. Imma : maman, mère.

3. Tifawin : bonjour.

                         

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