Elle n'avait même pas remarqué sa blessure, seulement sa présence inopportune.
"Papa... Papa ne se réveille pas, Maman," balbutia Léo, les larmes aux yeux.
"Il faut que tu viennes ! Il est tout froid !"
Julien posa une main réconfortante sur l'épaule de Sophie.
"Chérie, ne t'inquiète pas. Antoine est sûrement encore en train de faire une de ses scènes pour attirer ton attention. Il sait que tu es occupée avec moi."
Ses mots étaient du venin, instillant le doute, ravivant la paranoïa de Sophie.
"Il utilise Léo, comme d'habitude."
Sophie se tourna vers Léo, les yeux pleins de fureur.
"Ton père t'a envoyé ici pour me harceler ? Pour me faire culpabiliser ?"
Elle attrapa violemment le bras de Léo.
"Tu vas arrêter de mentir et de me suivre partout !"
Elle le secoua, le tirant vers l'intérieur du hall.
Léo, déséquilibré, tomba lourdement sur le sol en marbre.
Sa tête heurta de nouveau le sol. Un cri étranglé lui échappa.
La douleur ravivée, plus intense.
Il resta étendu, sonné.
"Non !" Mon cri silencieux résonna dans le vide.
Je me précipitai vers lui, essayant de le protéger, de repousser Sophie.
Mais mes mains traversèrent son corps, traversèrent celui de Léo.
Cette impuissance était une damnation.
Sophie regarda Léo au sol sans une once de compassion.
"Tu vois, Julien ? Il fait semblant. Il est manipulateur, comme son père."
Elle se détourna, prête à partir.
Julien se pencha alors vers Léo, feignant de l'aider à se relever.
"Viens, petit, ne reste pas par terre."
Mais en le relevant, il appuya discrètement mais fermement sur la blessure à la tête de Léo, puis simula une glissade.
Il tomba à genoux, grimaçant de douleur, tenant sa propre cheville.
"Aïe ! Ma cheville ! Ce petit diable m'a fait trébucher !"
Sophie se précipita vers Julien, toute son attention tournée vers lui.
"Julien ! Ça va ? Mon pauvre chéri !"
Elle foudroya Léo du regard. "Regarde ce que tu as fait ! Tu as blessé Julien !"
L'injustice était flagrante, la manipulation parfaite.
Léo, en larmes, secoua la tête.
"Non... Je n'ai rien fait... C'est pas vrai..."
Sa voix était brisée par la douleur et la trahison.
Il ne comprenait pas. Sa propre mère.
"Demande pardon à Julien, immédiatement !" ordonna Sophie, son ton glacial.
"Tu es désobéissant et méchant !"
Elle le fusillait du regard.
"Mais Maman... je n'ai rien fait... Pourquoi tu ne me crois pas ?"
Les larmes coulaient sur ses joues ensanglantées.
Son monde s'écroulait. La confiance en sa mère, brisée.
"Assez !" hurla Sophie. "Tu vas être puni pour ton insolence et ta méchanceté !"
Elle attrapa Léo par le bras, le traînant sans ménagement.
"Tu vas rester dehors, au soleil, jusqu'à ce que tu comprennes ta leçon !"
Elle le jeta littéralement hors du bâtiment, sur le trottoir brûlant.
Elle ordonna aux gardes de ne pas le laisser rentrer.
Léo resta là, sous le soleil de plomb, ses blessures le brûlant.
Le trottoir était chaud. Sa tête lui faisait un mal de chien.
Il appelait doucement : "Papa... Papa..."
Il ne comprenait pas cette cruauté.
Mon cœur d'esprit saignait pour lui.
"Je suis là, mon Léo. Je suis avec toi. Ne perds pas espoir."
Je lui murmurais des mots de réconfort, sachant qu'il ne pouvait pas m'entendre.
Mais peut-être, d'une manière ou d'une autre, sentait-il ma présence.
Le soleil tapait fort. Léo commençait à avoir des vertiges.
Sa peau devenait rouge. Ses lèvres étaient sèches.
Mais il ne bougeait pas. Il attendait.
Il s'accrochait à la promesse qu'il m'avait faite. Ramener Maman.
Après ce qui sembla une éternité, Sophie et Julien sortirent.
Julien boitait légèrement, s'appuyant sur Sophie, un air de martyr.
Il vit Léo et un sourire mauvais étira ses lèvres.
"Regarde, chérie, il est toujours là. Quel petit comédien."
Léo tenta de se lever en les voyant.
"Maman !"
Mais ses jambes flageolèrent. La douleur était trop forte. Il retomba sur ses genoux.
La chute rouvrit sa blessure à la tête. Le sang recommença à couler abondamment.
"Maman, s'il te plaît... viens à la maison... Papa a besoin de toi..."
Sa voix était faible, suppliante. Il ignorait les regards mauvais de Julien.
Il ne voyait que sa mère. Son dernier espoir.
Julien intervint, sa voix doucereuse.
"Sophie, ma chérie, ne te laisse pas avoir. Si Antoine avait vraiment un problème, il ne serait pas seul. Il serait sûrement avec... quelqu'un d'autre."
Il insinuait, plantant une nouvelle graine de jalousie dans l'esprit déjà empoisonné de Sophie.
Léo secoua la tête avec véhémence.
"Non ! Papa est seul ! Il est malade !"
Il essayait de me défendre, de défendre la vérité.
Sa loyauté était inébranlable.
Sophie, aveuglée par la colère et les insinuations de Julien, devint encore plus dure.
"Assez de tes mensonges, Léo ! Tu me fatigues !"
Elle fit un signe aux gardes du corps qui accompagnaient Julien.
"Ramenez-le de force à l'appartement. Et assurez-vous qu'il ne ressorte plus."
Léo la regarda, les yeux agrandis par la terreur et l'incompréhension.
"Maman... non... s'il te plaît..."
Sophie se pencha vers lui, son visage à quelques centimètres du sien.
"Si j'entends encore un seul mot de ta part sur ton père, je te jure que je te chasse de la maison pour de bon. Tu m'entends ?"
Ses mots étaient d'une cruauté insoutenable.
Léo était sous le choc. Ce n'était plus sa mère.
C'était une étrangère, froide et méchante.
Son petit cœur se brisa en mille morceaux.
Il ne la reconnaissait plus.
Alors que les gardes le saisissaient brutalement, Sophie et Julien montèrent dans la voiture de sport.
Léo se débattit, criant une dernière fois : "Maman !"
La voiture démarra, s'éloignant rapidement.
Sophie ne jeta pas un seul regard en arrière.
Léo, tiré par les gardes, tenta de suivre la voiture des yeux.
Il trébucha de nouveau, sa cheville se tordant douloureusement sous lui.
Un nouveau cri de douleur.
Il tomba lourdement sur le trottoir.
La voiture de Sophie disparut au coin de la rue.
Elle l'avait abandonné. Blessé. Seul.
Les gardes le relevèrent sans ménagement.
L'un d'eux, visiblement agacé, le ramena à l'appartement. Il le déposa dans l'entrée.
"Reste ici et ne fais plus d'histoires."
Puis il partit, refermant la porte à clé de l'extérieur.
Léo était seul, dans l'appartement sombre et silencieux.
Ses blessures le faisaient terriblement souffrir.
Mais sa première pensée fut pour moi.
Il boitilla jusqu'à la chambre, s'approcha du lit.
Il essaya de me sourire, malgré ses larmes et son sang.
"Papa... je suis désolé... Maman ne veut pas venir..."
Il cacha sa propre douleur, essayant de me protéger, même dans mon état inanimé.