Chapitre 1 Chapitre 1

Chapitre 1

Élyana contemplait le test de grossesse entre ses mains tremblantes. Deux barres roses. Positif. Elle le fixa, les yeux écarquillés, incapable de respirer. Le monde semblait s'être arrêté autour d'elle, comme si le temps suspendait son cours pour ce moment précis. Une chaleur douce envahit son ventre, et malgré elle, un sourire timide étira ses lèvres. Elle allait être mère.

Elle posa une main sur son abdomen encore plat, comme pour se lier déjà à cette vie naissante. Elle avait tant espéré ce moment. Tant prié pour un signe que son mariage avec Kael pouvait encore être sauvé. Ces derniers mois avaient été un tourbillon d'incertitudes et de distance entre eux. Kael, l'Alpha de la meute, était devenu un homme qu'elle ne reconnaissait plus. Froid, distant, absorbé par ses responsabilités... ou du moins, c'est ce qu'elle croyait.

Mais ce test... c'était peut-être leur chance. Un enfant pouvait tout changer, n'est-ce pas ? Une nouvelle vie, un nouveau départ, une raison pour eux de se retrouver. Élyana inspira profondément, essayant de calmer les battements frénétiques de son cœur.

Elle rangea précautionneusement le test dans un tiroir et se regarda dans le miroir de la salle de bain. Ses longs cheveux noirs encadraient un visage marqué par des cernes et l'inquiétude, mais ses yeux brillaient d'un éclat nouveau. Il fallait qu'elle le lui dise. Pas demain, pas plus tard. Maintenant.

Kael était dans son bureau, comme souvent ces derniers temps. Elle descendit les escaliers en chêne de leur maison, le parquet craquant sous ses pas. Son cœur battait si fort qu'elle craignait qu'il ne l'entende avant qu'elle n'ait prononcé un seul mot.

« Kael ? » appela-t-elle doucement en arrivant devant la porte entrouverte de son bureau.

Pas de réponse. Élyana fronça les sourcils et poussa la porte. Le bureau était vide. Une odeur de tabac flottait encore dans l'air, signe qu'il avait quitté la pièce récemment. Elle allait rebrousser chemin quand un murmure lui parvint. Un murmure étouffé, suivi d'un rire.

Son cœur se serra. Ces derniers mois, Kael avait pris l'habitude de disparaître sans prévenir, sous prétexte de réunions ou de devoirs liés à la meute. Elle s'était toujours convaincue qu'il disait la vérité, refusant de céder à la paranoïa. Mais ce rire... c'était une voix qu'elle reconnaissait entre mille.

Lyra.

Élyana se figea, son sang se glaçant dans ses veines. Que faisait Lyra ici à une heure pareille ? Son amie d'enfance, presque une sœur. Lyra, celle qui avait été son pilier dans les moments difficiles. Une colère sourde monta en elle, mais elle secoua la tête. Ce n'était rien. Elles étaient amies. Peut-être discutait-elle simplement avec Kael à propos de la meute.

Elle suivit les murmures, ses pas devenant de plus en plus silencieux. Ils venaient du salon. L'instinct d'Élyana lui criait de ne pas avancer, de faire demi-tour, mais une force irrépressible la poussait à découvrir la vérité.

En arrivant devant l'entrée du salon, elle s'arrêta net.

Kael était là, assis sur le canapé, Lyra à califourchon sur lui. Leurs corps étaient enlacés, leurs lèvres fusionnées dans un baiser ardent. Kael murmura quelque chose qu'Élyana ne put entendre, mais Lyra rit, un son léger et insouciant, comme si ce moment était le leur depuis toujours.

Élyana porta une main tremblante à sa bouche, luttant pour ne pas faire un bruit. Son cœur, qui battait avec espoir quelques instants plus tôt, semblait sur le point d'exploser dans sa poitrine. Une douleur sourde l'envahit, comme si on lui arrachait l'âme.

« Comment... » murmura-t-elle, sa voix à peine audible.

Kael et Lyra se figèrent, leurs têtes se tournant vers elle. Le choc dans leurs yeux fut instantané, mais c'est Lyra qui bougea la première. Elle se redressa, ajustant maladroitement sa robe, ses joues rouges de culpabilité.

« Élyana, je... je peux tout expliquer, » balbutia Lyra.

Kael, lui, resta immobile, le regard sombre. Il ne chercha même pas à nier. Pas un mot, pas un geste. Juste ce silence, lourd et tranchant, qui confirmait ce qu'Élyana ne voulait pas croire.

« Explique ? » répéta-t-elle, sa voix brisée par l'émotion. « Tu peux expliquer ça, Lyra ? Toi, ma meilleure amie... depuis combien de temps ? »

Lyra ouvrit la bouche, mais aucun mot n'en sortit. Kael se leva finalement, mais pas pour s'approcher d'Élyana. Il resta là, à quelques pas, les bras croisés, le visage impassible.

« Depuis longtemps, » dit-il finalement, sa voix basse et rauque.

Élyana recula comme si on venait de lui asséner un coup. Depuis longtemps. Ces deux mots résonnèrent dans son esprit, déchirant ce qui restait de son cœur.

« Alors... tout ce temps... » Elle porta une main à son ventre, réalisant avec une clarté dévastatrice que l'enfant qu'elle portait n'allait pas sauver son mariage. Ce n'était qu'une illusion, une chimère qu'elle s'était créée pour se protéger de la vérité.

Kael baissa les yeux vers son geste, remarquant pour la première fois son expression, sa main posée sur son ventre.

« Tu es enceinte, » murmura-t-il, plus comme une constatation que comme une question.

Élyana éclata de rire, un rire amer et douloureux qui semblait résonner dans toute la pièce.

« Oui, Kael. Enceinte. Et je pensais que c'était une bonne nouvelle. Que ça nous donnerait une chance de recoller les morceaux, de... de nous retrouver. Mais je vois que c'est inutile. »

Kael ne répondit pas. Pas une excuse, pas un mot pour tenter de la rassurer. Rien que ce silence qui la tuait à petit feu.

Lyra tenta de s'approcher, mais Élyana leva une main pour l'arrêter.

« Ne t'avise pas de me toucher, » cracha-t-elle, les larmes coulant librement sur ses joues. « Toi, ma sœur de cœur... Comment as-tu pu ? »

Lyra détourna les yeux, honteuse, mais cela n'apaisait en rien la douleur d'Élyana.

Elle recula vers la porte, le souffle court, sentant qu'elle ne pourrait plus rester dans cette maison une seconde de plus.

« Vous pouvez vous garder l'un l'autre. Je n'ai plus rien à faire ici, » dit-elle d'une voix tremblante.

Kael ouvrit la bouche, comme pour protester, mais elle le coupa.

« Non. Pas un mot de plus. Vous avez fait votre choix. Et maintenant, je fais le mien. »

Elle tourna les talons et quitta la maison, le vent froid de la nuit frappant son visage. Ses jambes tremblaient, mais elle continua d'avancer, une main toujours posée sur son ventre.

Dans son esprit, une pensée résonnait : **Elle avait peut-être perdu Kael, mais elle n'était pas seule. Elle avait cet enfant, ce petit être qu'elle protégerait coûte que coûte.**

Et pour cela, elle allait se relever. Quoi qu'il en coûte.