Elle était allongée sur un sol dur, froid et poussiéreux, et une odeur rance envahissait l'air. Ses souvenirs revenaient en morceaux épars : Antoine, la main sur sa bouche, puis le noir complet. Une terreur sourde monta en elle alors qu'elle réalisait que tout cela n'était pas un cauchemar.
Des bruits de sanglots discrets la tirèrent de ses pensées. Non loin, d'autres femmes étaient entassées, certaines recroquevillées sur elles-mêmes, d'autres adossées aux murs décrépis. Elles avaient toutes l'air terrifiées, leurs visages marqués par la fatigue et le désespoir.
Elisa tenta de se redresser, mais ses liens l'en empêchèrent. Une jeune femme assise à côté d'elle lui jeta un regard inquiet.
- Ne bouge pas trop, murmura-t-elle. Ils n'aiment pas qu'on fasse des histoires.
- Où... Où est-ce qu'on est ? balbutia Elisa, sa voix rauque et cassée.
La jeune femme secoua la tête, ses yeux fuyant le regard d'Elisa.
- Un entrepôt. C'est tout ce que je sais. Ils nous gardent ici... jusqu'à ce qu'ils décident quoi faire de nous.
Elisa sentit son estomac se nouer.
- Et toi, comment tu t'appelles ? demanda-t-elle, cherchant désespérément à établir un semblant de lien humain dans cet enfer.
- Clara, répondit la jeune femme après un moment d'hésitation.
Clara avait des cheveux châtains mal entretenus qui tombaient en mèches autour de son visage. Elle semblait jeune, peut-être à peine majeure, mais ses yeux racontaient une histoire de souffrance bien au-delà de son âge.
- Pourquoi... Pourquoi sommes-nous ici ? continua Elisa, même si elle craignait la réponse.
Clara hésita avant de répondre, sa voix baissant presque en un murmure.
- Ils... ils nous vendent. Certaines pour travailler, d'autres... pour des choses bien pires.
Elisa sentit un frisson glacé parcourir son dos. Le peu d'espoir auquel elle s'accrochait vacilla dangereusement.
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Le bruit métallique d'une porte qui s'ouvrait brusquement fit sursauter tout le monde. Une silhouette imposante entra, suivie de deux hommes armés. L'homme qui se tenait devant elles portait un long manteau noir et avait un regard dur et froid.
- Ivan, chuchota Clara, visiblement terrifiée.
Elisa ne connaissait pas cet homme, mais la peur qu'il inspirait aux autres captives était palpable. Ivan balaya la pièce du regard, un sourire carnassier étirant ses lèvres.
- Bienvenue, mesdemoiselles, lança-t-il d'une voix rauque et sarcastique. Vous êtes entre de bonnes mains, je vous l'assure.
Il s'avança lentement, inspectant chacune des femmes comme un prédateur évaluant sa proie. Lorsqu'il s'arrêta devant Elisa, elle leva les yeux pour croiser son regard, un mélange de défi et de peur brûlant en elle.
- Toi, fit-il en pointant son doigt vers elle. Tu as l'air... différente.
Elisa ne répondit pas, serrant les dents pour empêcher sa voix de trahir son trouble.
- Un peu de caractère, hein ? On va s'assurer que ça disparaisse vite.
Il se pencha vers elle, son visage si près qu'elle pouvait sentir son haleine chargée d'alcool et de tabac.
- Écoute-moi bien, ma jolie. Ici, c'est moi qui décide. Et si tu veux survivre, tu ferais mieux d'apprendre à obéir.
Elisa se sentit bouillir de rage, mais elle savait qu'elle ne devait pas répliquer. Ivan ricana avant de se redresser.
- Très bien, mes agneaux. Reposez-vous. Demain, le vrai travail commence.
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Quelques heures plus tard, le silence était retombé dans l'entrepôt. Elisa était allongée sur le sol, ses pensées tourbillonnant. Elle tentait de trouver une issue, un moyen de s'échapper.
C'est alors qu'elle remarqua une autre silhouette, debout près de la porte. Contrairement aux hommes brutaux qu'elle avait vus jusqu'à présent, celui-ci portait un costume impeccable. Ses cheveux noirs étaient soigneusement coiffés, et son allure dégageait une certaine élégance, presque incongrue dans cet endroit sordide.
Il l'observait, mais son regard n'avait rien de menaçant. Il semblait... hésitant, presque compatissant.
Elisa détourna les yeux, méfiante. Pourtant, elle sentit une étrange lueur d'espoir s'allumer en elle. Peut-être qu'il n'était pas comme les autres. Peut-être qu'il pourrait l'aider.
Mais avant qu'elle ne puisse se raccrocher à cette idée, la porte s'ouvrit à nouveau, et Ivan entra, son regard passant rapidement de l'homme en costume à Elisa.
- Alexis, qu'est-ce que tu fais là ? lança Ivan d'un ton méfiant.
- Rien de spécial, répondit Alexis, haussant les épaules. Je voulais juste m'assurer que tout était en ordre.
Ivan plissa les yeux, mais ne répondit pas. Elisa sentit son estomac se nouer davantage. Ce "Alexis" semblait être dans une position d'autorité, mais elle ne savait pas s'il était réellement un allié potentiel ou juste un autre pion dans cet enfer.
Alors qu'Ivan s'éloignait, Alexis jeta un dernier coup d'œil à Elisa. Leurs regards se croisèrent, et elle crut voir une promesse silencieuse dans ses yeux.
Quand il sortit de la pièce, Elisa se retrouva à nouveau seule avec ses pensées, une question obsédante résonnant dans son esprit : pouvait-elle lui faire confiance ?
Elisa était restée immobile sur le sol froid de la cellule, la tête pleine de questions et d'une peur qu'elle peinait à contenir. Le visage d'Alexis hantait ses pensées. Il était différent, cela ne faisait aucun doute. Mais cela suffisait-il à lui faire confiance ? Et pourquoi avait-il fixé son regard sur elle, comme s'il portait en lui une clé qu'elle ne comprenait pas encore ?
Les heures passaient lentement, entrecoupées seulement par les sanglots étouffés des autres captives. Clara, assise près d'elle, semblait avoir sombré dans un silence profond, le regard vide.
Soudain, le grincement de la porte la fit sursauter. Alexis entra dans la pièce, ses pas calmes mais déterminés contrastant avec l'aura brutale des autres hommes qu'Elisa avait vus jusqu'à présent. Il s'arrêta juste à côté d'elle, et pendant un instant, elle eut l'impression que le monde entier s'était figé.
- Toi, viens, murmura-t-il, suffisamment bas pour que les gardes postés près de la porte ne l'entendent pas.
Elisa fronça les sourcils, son cœur battant à tout rompre.
- Pourquoi ? demanda-t-elle, sa voix presque inaudible.
Il ne répondit pas immédiatement, se contentant de jeter un regard rapide autour de lui. Puis, dans un geste furtif, il fit glisser un petit bout de papier plié dans sa main, qu'il laissa tomber près de ses doigts liés avant de se redresser.
- Fais vite, dit-il, d'un ton suffisamment ferme pour être entendu par les gardes, avant de sortir aussi discrètement qu'il était entré.
Elisa resta figée, incapable de bouger pendant plusieurs secondes. Quand elle fut sûre que personne ne regardait, elle fit glisser ses doigts vers le papier et l'attrapa avec maladresse. En le dépliant, elle découvrit un message écrit à la hâte :
« Je peux vous faire sortir d'ici. Faites-moi confiance. Préparez-vous. »