Chapitre 4 Chapitre 4

La nuit était tombée sur Manhattan comme une couverture sombre et pesante, recouvrant la ville de son voile inquiétant. Natalie se tenait dans le salon de son appartement, une tasse de thé chaud entre les mains, la chaleur apaisant légèrement les nerfs tendus. Depuis la conversation qu'elle avait eue avec Daniel, le garde du corps envoyé par Alexander, elle ne pouvait plus se débarrasser du sentiment de danger qui pesait sur elle. Chaque bruit, chaque ombre semblait se faufiler dans sa vision périphérique, chaque coin de rue était désormais un lieu où elle se sentait observée.

Le téléphone de Natalie vibra soudainement sur la table basse, brisant le silence qui régnait dans la pièce. Elle se leva d'un coup, lissant les plis de son pantalon, et attrapa le téléphone. Le nom qui apparaissait à l'écran fit une pression douloureuse sur sa poitrine : *Elizabeth*.

Elle hésita un instant avant de décrocher, mais un sentiment de devoir la poussa à répondre.

« Maman ? » demanda-t-elle, essayant de dissimuler l'anxiété dans sa voix.

« Natalie, il faut que tu écoutes ce que je vais te dire. » La voix d'Elizabeth était basse, tendue. « Tu te souviens des rumeurs qui circulaient autour de ton père avant que tu partes ? Il y avait des bruits de transactions douteuses, des investissements risqués... »

Natalie sentit son estomac se tordre. « Oui, je me souviens. »

Elizabeth marqua une pause, et le silence entre elles sembla s'étirer comme un fil fragile. Puis elle reprit, plus lentement, ses mots pesant lourdement dans l'air. « Ces rumeurs étaient vraies. Il y a eu un scandale financier. Un grand scandale, Natalie. Et il menace tout ce que ton père a construit. »

Le souffle de Natalie se coucha dans sa gorge, étouffé par l'effroi. Son père, Charles Carter, l'homme qu'elle avait toujours admiré, le titan de l'immobilier dont elle avait été la fille chérie, plongé dans un scandale financier ? Cela ne pouvait pas être vrai. Ce n'était pas possible.

« Maman, que veux-tu dire ? » demanda-t-elle, sa voix plus faible qu'elle ne l'aurait souhaité.

Elizabeth soupira, et la tension dans sa voix grandit. « J'ai reçu des informations hier. Ce scandale pourrait être bien plus grand qu'on ne le pense. Et il ne va pas disparaître si facilement. Il y a des gens qui vont chercher à récupérer ce qui leur appartient, des gens qui ne reculeront devant rien, y compris utiliser ta famille pour arriver à leurs fins. »

Les mots résonnèrent dans l'esprit de Natalie comme des échos, frappant un rythme effrayant dans son cœur. Elle se sentait submergée, incapable de saisir la portée de ce qu'elle venait d'apprendre.

« Je... je ne sais pas quoi dire, maman. »

Elizabeth n'attendit pas de réponse. « J'ai besoin que tu viennes ce soir, à un gala. Il y a des gens là-bas qui doivent savoir qu'on ne se laisse pas faire. On doit montrer à tout le monde que la famille Carter est encore forte, encore unie. »

Le gala ? Pourquoi tout à coup un gala ? Natalie sentit une étrange lourdeur s'emparer d'elle. « Maman, je... » Elle se pinça les lèvres, cherchant les mots. Elle n'était pas prête pour un événement comme celui-ci. « Pourquoi ce gala ? »

Elizabeth se fit plus pressante. « Tu dois être là, Natalie. Il y a des gens à qui tu dois parler. Des gens qui, je le crains, sont liés à tout ça. »

Il y eut un moment de silence. Natalie déglutit, mais elle savait déjà qu'elle n'avait pas le choix. Elle ne pouvait pas fuir encore une fois. Ce monde, sa famille, son passé, tout cela revenait à elle plus vite qu'elle ne l'avait imaginé.

Elle se rendit au gala plus tard dans la soirée. Le lieu était impressionnant, un grand hôtel dans le quartier financier de la ville, tout en verre et en métal, un symbole de richesse et de pouvoir. La foule était élégante, parée de robes de soirée et de costumes sombres, des sourires polis et des poignées de main glacées se mêlant à l'air saturé de rires forcés et de conversations superficielles. Natalie se sentit une étrangère, comme une ombre parmi les lumières éclatantes.

Elizabeth l'accueillit dès qu'elle entra, son regard inquiet masqué par un sourire professionnel. Mais ce n'était pas elle que Natalie cherchait. Elle parcourut la pièce du regard, cherchant des visages familiers, des figures qui lui rappelaient son enfance, ses années passées dans l'ombre du pouvoir et de la richesse.

Elle aperçut alors des hommes et des femmes qui semblaient à l'aise dans cet environnement, dans ce monde qui lui avait échappé. Ils parlaient en petits groupes, leurs rires s'entrelassant, mais leurs paroles trahissaient un sous-entendu. Un d'entre eux, un homme imposant en costume sombre, lui sembla particulièrement familier. Il avait un regard dur et calculateur, et son nom lui revint soudainement, comme un coup de poignard dans le cœur : *Richard Hale*, un ancien associé de son père.

Ses mains tremblèrent légèrement. Comment Richard Hale pouvait-il être ici ? Cet homme, de tous ceux qui avaient été liés à Charles Carter, était celui qui avait toujours semblé jouer dans les coulisses, prenant des décisions que personne ne comprenait vraiment.

Elle détourna les yeux, cherchant une distraction, lorsqu'elle aperçut une silhouette familière. Un homme aux cheveux sombres, les traits marqués par le temps, un sourire que Natalie n'avait jamais oublié. Alexander Drake. Il se tenait là, dans un coin du salon, discutant avec Richard Hale. Leur conversation semblait serrée, bien plus intime que ce qu'elle aurait imaginé.

Ses yeux s'écarquillèrent lorsqu'elle entendit quelques mots de leur échange.

« Nous devons agir avant qu'elle ne parle, avant qu'elle ne comprenne tout ce qui se passe. » La voix d'Alexander était basse, mesurée, presque menaçante. Il parla si peu, mais ses paroles se fixaient dans l'air comme une promesse brisée.

« Et si elle ne coopère pas ? » répondit Hale, un sourire cruel au coin des lèvres. « Tu sais ce qu'il en coûte. »

« Elle coopérera. Elle n'a pas le choix. »

Le souffle de Natalie se coucha dans sa gorge. Elle recula discrètement, mais ses jambes semblaient lourdes, comme si l'air lui-même avait pris du poids. *De quoi parlait-il ? Que lui réservait Alexander ?* Les questions tourbillonnaient dans son esprit, mais il n'y avait aucune réponse claire.

Elle s'éclipsa dans un coin sombre de la salle, cherchant à reprendre son calme. Mais à peine quelques instants passèrent qu'une alerte vibra sur son téléphone, un message anonyme.

*Ne lui fais pas confiance. Il est bien plus dangereux que tu ne le crois. Il a manipulé ton père, et il compte te manipuler aussi. Fuir est la seule solution.*

Le message était bref, effrayant, et pourtant d'une clarté glaciale. Natalie sentit la sueur lui couler le long de la nuque. Qui était derrière ce message ? Et pourquoi quelqu'un voulait-il la prévenir ? Ses mains tremblaient, mais elle se força à se concentrer. Elle devait comprendre ce qui se passait avant qu'il ne soit trop tard.

Le gala était devenu une cage, et elle en était l'oiseau pris au piège. Mais qui était le chasseur, et que cherchait-il à attraper ?