Moi (rangeant mes affaires): bon, je dois y aller. Je ne veux pas que ma mater (maman) me fasse encore le bruit comme d'habitude
Christian (se levant): moi aussi je vais y aller alors
On ramasse nos affaires et nous allons en route pour prendre chacun son taxi et rentrer. C'est tout sérieux que j'arrive dans mon quartier et que je me dirige vers la maison. La première chose qui attire mon attention devant la porte de la maison, ce sont les chaussures d'homme. Je suis le seul homme qui vit avec ma mère, alors, si ces chaussures ne sont pas à moi, ils sont à quelqu'un d'autre. Je deviens déjà tout nerveux en entrant dans la maison.
Il n'y a personne au salon, ni dans la cuisine, ni dans aucun espace commun. Je fonce vers la chambre de maman qui est fermée à clef.
Moi (grosse voix): maman! (bousculant le poignet)
Elle: tu as quel problème Kévin? Tu veux quoi?
Moi (tambourinant sur la porte): fais sortir le monsieur qui est avec toi là-bas, fais-le sortir!
Elle: tu es malade?
Moi: je suis malade hein? Attends
Je fonce à l'arrière de la cuisine pour prendre la machette et je reviens vers sa porte. Elle l'avait déjà ouverte, mais en me voyant arriver, elle l'a rapidement fermée.
Moi (énervé): ouvre cette porte! Ouvre-la! Si c'est un homme, qu'il sorte d'ici m'affronter. Ouvre!
Maman (derrière la porte): Kévin tu es fou?! Ça ne te va pas ou quoi? Tu es qui pour commander quelqu'un ici?
Moi: mais sortez maintenant pour voir qui commande ici? Sortez!
Silence
J'ai fait tout un désordre pendant environ 2h du temps, elle ne parlait plus tout ce temps. Où je suis dans mes pleins là, qu'ils essaient seulement de sortir, ils me sentiront passer. Je prends mes aises au salon, et je vais voir s'il y a à manger à la cuisine. Je me sers tranquillement et vais manger au salon devant la télévision. Voyant qu'ils ne réagissent pas, et étant très fatigué, je me résigne à aller dans ma chambre me reposer un peu.
Muhire
C'est hallucinant, je crois que c'est la première fois que je tombe sur un enfant aussi insolent. Tu vis dans la maison de ta mère et c'est toi qui la menace? Donc parce qu'elle est ta mère, elle n'a pas le droit de faire sa vie? Et voir que Justine cautionne ça, c'est incroyable.
Moi: mais laisse-moi sortir, il dit que si je suis un homme que je sorte. Je n'ai pas peur de lui, fais-moi sortir Justine
Elle (apeurée): non Muhire, tu ne le connais pas bien. Il est capable de te frapper avec cette machette. Je ne veux pas de drame stp, c'est mon fils
Moi (m'énervant): et moi je ne suis pas l'enfant de quelqu'un? Il se prend pour qui pour me menacer? Il me connaît? Il sait aussi de quoi je suis capable?
Elle (suppliante): justement Muhire, et j'implore ta compassion envers moi. Ne fais pas ça, nous sommes dans votre pays, je ne veux pas qu'on l'enferme stp stp
Je l'ai longuement regardée avant de décider de laisser tomber cet insolent qu'elle appelle son fils.
Moi (la regardant): pourquoi tu le laisses te traiter de la sorte? C'est ton fils Justine et peu importe la raison, il n'a pas le droit de te traiter de la sorte. Comme tu le dis, c'est toi sa mère
Justine (soupirant): laisse tomber Muhire
Le petit a fait un tapage de deux heures environ puis plus rien. Nous étions bloqués dans la chambre tant qu'on entendait des mouvements au salon. Chacun était dans son coin, je n'avais qu'une seule envie celle de me casser d'ici. C'est aux environs de 5h du matin que je l'ai fait en me promettant de ne plus jamais remettre les pieds ici, encore moins de revoir Justine. Ça ne sert à rien, cette relation est vouée à l'échec. Je n'accepterais jamais qu'un enfant monte sur ma tête, qu'elle gère son fils. Pendant qu'on y est, qu'ils se marient même ensemble.
Justine
C'est à 5h du matin que Muhire a pu quitter la maison en toute quiétude (soupirs). Je sais très bien qu'il ne reviendra plus, comme les autres. Le fils que Dieu m'a donné, je ne sais pas. Je pense que c'est le chanvre qu'il fume, qui lui monte à la tête. Le matin, on s'est croisé, et je l'ai tout simplement toisé.
Lui (amusé): oh maman c'est comment?
Moi (pétant un câble): fous-moi le camp tu comprends?
Lui (éclatant de rire): oh?
Moi (tonnant): rigole bien avec moi Kévin, rigole bien. C'est quand je vais sérieusement te foutre à la porte que tu vas comprendre
Lui (fronçant les sourcils): me mettre à la porte pourquoi? J'ai fait quoi? Donc chasser les rigolos qui viennent ici c'est mauvais?
Moi (furieuse): fous-moi le camp, tu comprends? Tu es qui pour te mêler de ma vie privée? J'ai ton âge? Tu paies les factures ici? Tu prends quoi en charge dans cette maison? Les autres à ton âge ne vivent plus chez leurs parents. Soit ils font de grandes études, soit ils travaillent pour subvenir à leurs besoins. Mais toi déjà 23 ans, tu es encore en Tle, avec des moyennes médiocres, mais toujours à faire son intéressant (il lève les yeux) Lève bien les yeux avec moi, impoli comme ça! Tu commandes qui ici? Tu peux commander qui? Tu ne vois pas Jérémie? (il se lève) Un enfant intelligent, poli, et qui ne fait pas chier ses parents. Mais c'est un vaurien comme toi (il s'en va) qui veut toujours faire le dingue, tchrrrrrr!!!!! Quoi? Parce que tu mets les bandanas et les bagues que tu penses que tu es quelqu'un? Tu es bien malade! Tchrrrr!!!
Je pense que même les voisins ont dû entendre comment j'ai piaffé tellement c'était violent. C'est avec les nerfs bien tendus que je suis allée au boulot. Je suis secrétaire dans une entreprise de la place à Kigali. Je suis d'origine gabonaise, et je suis dans ce pays (le Rwanda) pour le travail. Je me bats dur chaque jour, afin de subvenir aux besoins du fils unique que Dieu m'a donné. Mais j'en ai marre, je suis vraiment à bout. L'école zéro, comportement zéro; il ne veut rien foutre si ce n'est fumer son chanvre, pfff. Combien d'hommes m'ont laissé tomber à cause de Kévin, combien? Je ne peux pas faire ma vie en paix, et cet enfant reste tranquille, rien. Toujours à m'apporter des histoires rocambolesques.
Je passe toute cette journée de mauvaise humeur, et je rentre aux environs de 16h. Je prends une bonne douche et je vais relaxer sur mon lit. J'appelle mes sœurs en appel vidéo Whatsapp pour leur raconter, les nouvelles péripéties de cette maison. Nous sommes quatre enfants de papa et maman. Notre père est déjà décédé, il ne nous reste plus que notre mère. Alors, il y a notre aîné Corentin, ensuite Gabrielle, Martine et moi.
Martine (répondant): allo?
Moi: bonjour Martine
Elle: bonjour ça va?
Moi (soupirant): ah (Gabrielle apparaît)
Gabrielle: bonjour
Nous: bonjour
Elle: vous allez bien?
Martine: moi ça va, apparemment pour Justine ce n'est pas ça
Gabrielle (soupirant): il a encore fait quoi cette fois-ci?
Je n'attendais que cette question, je me suis défoulée comme j'ai pu, et c'est en larmes que j'ai fini mon récit.
Gabrielle (furieuse): je ne comprends pas pourquoi l'enfant là, tu ne le mets pas un peu dehors. Je ne comprends pas. Il prend la machette pour menacer ton ami, il est malade? Moi, un de mes enfants essaient seulement de me répondre mal, ils savent où ils finiront. Je ne joue même pas avec eux, tu es trop laxiste Justine
Martine (les sourcils froncés): tu l'as même emmené là-bas pourquoi? Il fallait le laisser ici
Moi (reniflant): qui allait encore accepter de le garder? Chez Corentin, c'était la bastille qu'il buvait tout le temps, Gabrielle son mari a refusé, chez maman, il a commencé son histoire du chanvre là, il n'y a que moi qui peut le supporter
Gabrielle (tonnant): c'est ça le soucis, tu le supportes! Corentin avait tort de frapper Kévin? Qui ne sait pas dans cette famille que c'est un cas? On touche un peu ton enfant, tu pleures, tu voulais que les gens fassent comment? KENGUE (son mari) était même obligé de refuser, parce qu'il voyait comment tu réagissais. Mes enfants ne peuvent même pas un peu faire les choses comme ça, ils ne sont pas fous, c'est toi qui t'amuse encore avec Kévin
Moi (soupirant): je sais très bien que c'est de ma faute aussi, si j'avais laisser qu'on le redresse tranquillement, nous n'en serions peut-être pas là aujourd'hui
Gabrielle(se calmant): hummm
Martine: tu vas faire comment maintenant?
Moi: je prie qu'il ait son bac et s'en aille d'ici, et de toute façon, je suis de retour au Gabon l'année prochaine. Ma formation tire à sa fin donc
Gabrielle: Espérons vraiment qu'il ait son bac alors, on avisera par la suite. Hum! Même accepter que mes enfants échouent ne fût-ce qu'une classe, ou encore me ramène des moyennes en dessous de 13, jamais!
Nous avons parlé de choses plus gaies durant environ une heure, et nous nous sommes laissées. Ça me fait toujours du bien de parler avec mes sœurs, elles sont mes seules confidentes, mes seules amies. Gabrielle est très chaude comme femme (rires), c'est son caractère et nous l'aimons comme ça. Martine, c'est le juste milieu, et moi je suis très douce de nature. Mais quand tu me cherches, toi-même là-bas, et même ce fou de Kévin le sait. Corentin est assez strict et carré de caractère. Il te corrige bien comme il faut si tu débordes, mais c'est un homme généreux et aimable aussi. Mes frères et moi sommes très soudés malgré nos différences. Peu importe la difficulté dans laquelle l'un d'entre nous peut être, les autres seront toujours là pour le soutenir.
Je me suis endormie sans m'en rendre compte, et c'est le bruit des pas de Kévin qui m'a réveillé. Je me suis levée pour aller me débarbouiller et m'habiller. Je suis sortie de la chambre et j'ai trouvé Kévin, grand pied sur petit pied au salon. J'ai tracé dans la cuisine pour faire à manger. J'ai mis environ une heure pour finir de cuisiner, et je me suis servie pour aller manger au salon.
Kévin (guettant): maman, tu as préparé quoi?
Moi (le regard sur la télévision): le poulet et le riz rouge
Lui (se levant): ok
Il est aussi allé se servir et m'a rejoint.
Moi: le bac approche, j'espère que tu te prépares bien
Lui (grimaçant): oui
Moi: j'espère bien Kévin, j'espère vraiment parce que je ne te vois pas travailler ou faire quoi que ce soit donc j'espère
Lui (déposant son plat): c'est ce qui est souvent bizarre avec toi, on est tranquille tu cherches toujours les problèmes
Kévin
Comment quelqu'un peut toujours autant aimer les problèmes. Je t'ai déjà dit que je me prépare, mais il faut toujours que tu fasses des argumentations énervantes. Elle m'a saoulé, j'ai ramassé mon plat et j'ai foncé à la chambre en claquant ma porte.
****** 3 mois plus tard ******
C'est avec le cœur lourd que je regarde les fiches, et que je vois que j'ai échoué, je n'ai pas obtenu mon bac. Je vois déjà de loin les cris, les remontrances, les comparaisons avec Jérémie. Oh Seigneur! C'est d'un pas lent, très lent que j'arrive à la maison. Je trouve maman qui m'attend de pied ferme, bien ferme. A l'expression de mon visage, elle comprend.
Elle (criant): voilà! Voilà! Je savais!