"Maman, sérieusement, je vais devoir épouser le fiancé de Julie ?"
Le teint pâle, Fernanda sent monter le regret en elle. Les Moreau attendent dehors, l'avenir des Toscanes est en jeu. S'agenouillant devant Clara, elle implore :
"Ma chérie, Julie mérite mieux, fais-le pour elle."
Les yeux de Clara, froids comme la glace, scrutent sa mère. Malgré le lien biologique qui les unit, son cœur appartient entièrement aux enfants issus du mariage précédent de son père.
Fernanda sait quel prix payer pour ce mariage arrangé avec le fiancé de Julie, un homme aux traits disgracieux et à la faiblesse notoire. Cependant, elle supplie Clara de s'y soumettre.
Le serviteur les interrompt avec empressement :
"Mme Fernanda, Mlle Clara, les Moreau vous attendent."
Sans tendre la main pour aider Fernanda, Clara rétorque d'une froide nonchalance :
"Lève-toi, je suis prête à partir ."
L'amertume s'infiltre en elle à cet instant, alimentant son désespoir grandissant. En ouvrant la porte, Clara découvre une escorte de gardes du corps, dépêchée par les Moreau. Aujourd'hui, sans cérémonie ni robe de mariée, elle est en route vers son mariage.
" D'accord, allons-y", déclare-t-elle d'une voix déterminée.
Au cœur de la Cité d'Odral, les Moreau trônent en tant que la famille la plus opulente. Raphaël Moreau, leur unique héritier, a été marqué à jamais par un enlèvement survenu il y a une décennie. Depuis, il s'est terré dans l'ombre, cruel et énigmatique, tel une réincarnation moderne de Barbe Bleue, dont les conquêtes ne ressortaient jamais vivantes de sa chambre. Cependant, cette sinistre réputation ne trouble en rien Clara.
À l'intérieur de la somptueuse villa des Moreau, les gardes du corps guident Clara jusqu'à sa chambre. La porte se referme, plongeant la pièce dans l'obscurité.
Clara détourne le regard lorsque la porte s'ouvre à nouveau. Un homme de haute stature entre, illuminant la pièce de sa présence. Une lumière tamisée inonde la pièce, laissant entrevoir un visage sculpté par les dieux.
Un malaise s'insinue lorsque la lumière s'allume soudainement. Instinctivement, Clara couvre ses yeux de sa main, étudiant l'homme avec prudence.
Ce qu'elle découvre la laisse bouche bée. Sa stupeur ne naît pas de la laideur ou de l'horreur, mais de la beauté saisissante de l'homme.
Vêtu d'un costume noir raffiné, il dégage une prestance royale avec son corps athlétique et ses jambes élancées. Son visage, d'une perfection rare, émane pourtant une aura intimidante.
Pendant une fraction de seconde, Raphaël la scrute, ses sourcils se fronçant légèrement. D'un ton paisible, dénué de toute émotion, il lâche :
"Que tu es laide ."
Reconnaissant son insinuation, Clara reprend ses esprits, ne se laissant pas affecter par les jugements portés sur son apparence. Sa méfiance s'impose à nouveau :
" Qui êtes-vous ?"
Ses yeux noirs pétillent d'intérêt, sa voix profonde retentissant :
"Tu ne sais pas qui est ton époux ?"
À mesure qu'il s'approche, Clara ressent un frisson d'appréhension. Néanmoins, elle soutient son regard, sa posture fière :
" Bien sûr que si, mon époux est Raphaël Moreau !"
Son regard s'adoucit, saisissant que Clara croit les rumeurs qui circulent. Même si elle est destinée à un homme "laid et impuissant", sa tranquillité intrigue Raphaël.
Un sourire en coin, il réplique légèrement :
"Ah, alors tu es la future femme de mon cousin. Moi, c'est Yann, le cousin de Raphaël. Pas enthousiasmée par l'idée d'épouser un infirme, j'imagine ?"
L'homme accentue exprès le mot « un infirme », d'une voix basse et séductrice. D'un pas délibéré, il s'approche d'elle, son souffle se faisant plus prononcé . Un inconfort naît en Clara, mais elle finit par se laisser convaincre. Après tout, la villa de Raphaël ne s'ouvre pas à tout le monde.
" C'est ton cousin, je t'en prie, ne le qualifie pas ainsi. "
Même son cousin pense cela, Raphaël doit mener une vie difficile.
Un sentiment de compassion s'éveille dans le cœur de Clara :
Même si les Moreau sont une famille riche et influente, Raphaël mène sûrement une existence pénible en tant qu'invalide.
Une lueur de surprise traverse les yeux sombres de Raphaël, qui n'aurait jamais anticipé un tel commentaire venant de cette femme qu'il juge laide.
Incapable de réprimer sa curiosité, il la scrute à nouveau . Ses cheveux en désordre, ses lunettes au style rétro et ses vêtements rembourrés la rendent peu attirante à première vue. Les taches discrètes sur son teint sombre et jaune ne contribuent pas à son charme . Il est évident que cette femme, loin est loin d'être sa "fiancée" renommée pour sa beauté W
Pourtant, les membres de la famille Moreau se moquent de l'apparence de leur future femme . Leur unique préoccupation est qu'elle ne soit pas stérile, donc que ce soit la véritable Julie ou pas ça l'importe peu.
Un éclat ténébreux brille dans les yeux de Raphaël. Sans ménagement, il pousse Clara sur le lit, l'humiliant de sa voix méprisante et froide :
" Personne d'autre n'est ici, inutile de faire semblant . Vu ta laideur, tu es sûrement toujours vierge, n'est-ce pas ? Je vais t'aider à satisfaire tes besoins . "
Sa main glisse sur sa peau douce, une caresse qui trouble Clara malgré elle.
Ses doigts fusent pour gifler violemment le visage de Raphaël.
" Ne me compare pas à des obscénités comme toi ! Avant que ton cousin n'arrive, sors immédiatement. Je ferai comme si de rien n'était . "
Bien qu'elle tente de préserver son calme, les tremblements de ses mains trahissent son anxiété . Elle avait imaginé à quel point Raphaël pouvait être laid, mais jamais elle n'aurait anticipé une telle rencontre.
Le visage de Raphaël s'obscurcit, son regard froid et implacable.
" Aucune femme n'a osé me gifler . "
Quand elle se débat , ses lunettes tombent. Révélant ses yeux d'un éclat étonnamment clair, ses cils frémissent, témoins de sa peur et de sa nervosité.
Soudainement, Raphaël hésite. Une inexplicable vague de pitié l'envahit. Se relevant, il remet en ordre sa chemise, lançant à Clara un regard glacial :
" Continue à attendre l'infirme. "
Bang !
Ce n'est que lorsque la porte se referme que les nerfs crispés de Clara se relâchent légèrement.
...
À l'extérieur.
Les gardes du corps remarquent la marque rouge sur le visage de Raphaël et l'interpellent :
" Maître, votre visage... "
Il touche sa joue, l'expression dénuée de toute émotion :
" La porte m'a frappé . "
Quelle porte pourrait laisser cinq marques distinctes sur son visage ?
Les gardes du corps n'osent pas questionner et lui remettent respectueusement un document :
" Voici les informations personnelles de madame. "
En dépliant le document, il découvre le nom inscrit : Clara Toscane. Cette femme au visage impassible se nomme « Clara ».
La mère de Clara intrigue. Nourrissant avec tendresse son beau-fils et sa belle-fille, elle maltraite pourtant sa propre fille de façon aussi cruelle.
Passant à la page suivante, Raphaël fronce les sourcils et se tourne vers un garde du corps :
" Est-elle idiote ? "
Le garde hoche la tête.
Raphaël répond avec indifférence :
" Vérifie encore . "
Quand Clara s'exprime, elle le fait avec assurance . De plus, jamais il n'a croisé une idiote capable de se débattre et de gifler avec une telle intensité dans une situation pareille.
Cela le trouble et son visage s'assombrit. Il lance le document dans les bras du garde :
" Si tu ne trouves pas les informations qui m'intéressent, ne me dérange pas ! "