Mon père, je ne le connais et je ne l'ai jamais vu. Ma mère dit qu'il a disparu quand elle lui a annoncé ma grossesse. Je naquis donc d'un seul parent, Madame Linette Soppo. Elle est de New Bell, ce quartier réputé de Douala. Oui je suis née ici à New Bell, j'y ai grandi et fréquenté l'école primaire publique ainsi que le lycée. A 18 ans et avec le bac en poche, je suis allée à l'université de Douala où j'ai obtenu une licence en sciences économiques et depuis ma vie est au point mort. Pourquoi ? Peut être parce que je veux traverser comme on dit ici à New Bell, je veux aussi percer pour aller à Mbeng me chercher.
Je suis grande de taille, à ce qu'il parait je tiens cette taille de mon père. Je fais 1 mètre 87 avec une fine forme aux courbes bien harmonisées. Ici à New Bell, on m'appelle Beyonce. Ah oui, tout le monde me connait moi la fille de Linette Soppo la dame de fer. On la surnomme « Marguerite Tchatcher ». Au quartier quand elle passe, les gens fuient. En gros, ma mère ne donne pas le lait.
Nous ne sommes pas riche, c'est juste que ma mère a su se trouver une place dans la société et on a eu la chance que mon grand père nous a légué sa maison de deux pièces. J'ai un grand frère que maman a eu dans ses années de Lycée mais sa belle famille avait rejeté maman et arraché l'enfant. A ce qu'il se dit il serait en France mais on n'a aucune nouvelle de lui. Maman parle souvent de lui et me montre quelques photos de lui quand il était encore un bébé. Il s'appelle Cédric Moussavou oui son père est gabonais et était venu en mission au Cameroun quand il est tombé sous le charme de la jeune Linette. Bref, je ne veux pas entrer dans les détails de cette histoire car dans un premier temps je n'en sais pas trop, et dans un second temps c'est un sujet qui fâche. Maman fait la ligne, elle va en Chine pour acheter des mèches brésiliennes, péruviennes, indiennes de toute qualité. Elle a ouvert un magasin au marché central sous l'enseigne « TOUT CHEZ LINETTE ». On y trouve vraiment toute qualité de mèche et un bon nombre de salons de coiffure qui se ravitaille chez elle ainsi qu'une multitude de clients.
Maman n'a pas un grand niveau d'étude ; cependant avec le CAP, elle occupait la fonction d'Assistante social adjointe à l'hôpital la Quintinie de Douala. Lassée d'avoir toujours un salaire minable, elle décida à 40 ans de prendre une retraite anticipée pour se lancer dans le monde des affaires.
Les débuts ont été très difficiles mais elle a plutôt pris ses marques. Je ne connais pas les extra ou quoi que ce soit, j'ai toujours eu le strict minimum dans ma vie. La seule chose que j'ai demandé d'extra à maman, c'est le financement de mon voyage et c'est la dernière des choses qu'elle fera pour moi. Après cela, je devrais en faire plus pour elle. Nous sommes très proches, on se dit tout, on se parle, je connais ses dragueurs, elle connait les miens. Nous avons toujours été là l'une pour l'autre. C'est ma maman à moi même si je sais qu'elle pleure son fils intérieurement. Mais qui sait, un jour elle le retrouvera.
Je disais donc que quand j'ai eu ma licence en sciences économiques j'ai décidé de partir du Cameroun parce que j'ai la conviction que ma place n'y était pas . En mon sens, j'ai fini ce que j'avais à y faire. Je veux donc poursuivre mon chemin ailleurs, voir d'autres horizons mais pas en France, en Allemagne, au Canada ni en Angleterre. Je veux aller aux Etats Unis d'Amérique. Mais pourquoi les USA?
A cette question, j'ai aucune réponse, je veux juste y aller pour obtenir un master en finances et pourquoi pas un doctorat.
Mon ambition est d'être une grande femme car j'ai toujours eu un faible pour ces femmes intellectuelles qui mettent des lunettes avec des tailleurs cousus sur mesure et tes talons aiguilles. Elles ont d'ailleurs un discours cohérent et captivant comme mon professeur de comptabilité en DEUG 2. Oh cette femme, quand elle entrait dans l'amphithéâtre, je bavais et je me disais intérieurement « je serai comme vous madame ».
Ma mère, Donald et moi avions tenté trois fois d'obtenir le visa des USA sans aucun succès. Les cotisations, la pension retraite de maman, le terrain que mon grand père m'a légué, oui tout a été dilapide dans cette histoire de visa sans qu'on ait gain de cause. Nous n'avons jamais été remboursés et la personne finissait toujours par nous arnaquer.
Maman gardait espoir pendant que moi je désespérais jusqu'au jour où Cecilia, une fille du quartier qui est récemment partie en Angleterre me brancha à son réseau. Enzo, le dur, ce mec a changé ma vie ! Qui ne le connait pas à akwa? Il a tous les documents et peut fournir n'importe quelle pièce d'identité. Moi, je l'appelle « petit biya » parce que s'il meurt akwa s'effondre. C'est donc Enzo qui a tout fait, on a juste payer ce qu'il nous a demandé.
Ma vie sentimentale? Hum j'ai eu pas mal de mec dans ma vie ah. Quand tu grandis à New Bell, à quinze ans, tu es déjà émancipée. En ce qui me concerne, j'étais du genre si tu n'es pas intello, je ne te regarde même pas. Ah oui, Jessipa craque pour les cerveaux pleins parce que sans me vanter, je suis intelligente et je n'ai jamais repris de classe sauf à l'université où j'ai eu une note en histoires des faits économiques qui par hasard avait disparu. Ah les facs, on connait bien le trafic des Unités de Valeurs. C'est la raison pour laquelle j'ai dû finir ma licence avec un an de retard.
.....Donald Ngimbouss Rodeon...
L'homme qui m'a troublée en mon année de terminales. Ce jeune brillant étudiant que j'ai rencontré lors du concours de la meilleure dissertation de philosophie dans la province du littoral, était membre du jury pendant je faisais partie des concourants. Je vous disait que Dieu ne m'a peut être pas donnée de père mais il m'a gratifié du don de l'intelligence et de la taille aussi, alors je ne peux que lui dire merci.
Donald et moi, on se connait depuis maintenant sept ans mais notre relation amoureuse a pris forme il y a seulement 4 ans quand j'étais en année Licence. C'est un Bassa de souche pure originaire de Puma. Il a 3 frères et aucune sœur. Ses parents gagnent bien leur vie et tous ses frères sont à l'étranger mais mon Donald n'a jamais voulu prendre cette route.
Il me dit toujours que le bonheur c'est en Afrique. Il allait juste en vacances.
Après sa Maîtrise en gestion, il s'en est allé au Nigeria pour un programme de six mois. A son retour, son père ayant « les longs bras » lui a trouvé un poste de Directeur Administratif et Financier à CEGELEC à Douala. A trente ans on peut dire qu'il gagne plutôt bien sa vie.
Je l'aime parce qu'il bosse dur et contrairement à ses frères, il ne s'accroche pas sur les biens de ses parents. Il habite un petit appartement au quartier Kotto. Il a sa petite voiture et mène sa petite vie tranquillement avec deux ou trois amis.
Sa famille ne m'aime pas du tout donc je me contente que de Donald. Il n'y a jamais de belle mère ou quoi que ce soit. Sa mère lui demande ce qu'il fait avec une va-nu-pied qui a grandi à New Bell et qui de plus a arrêté ses études. Humm, un jour je vais répondre à celle là mais pour l'instant je ne la gère pas.
Donald et moi, on se suffit. On s'aime et on a beaucoup de projets. Au départ, il n'était pas d'accord avec mon projet de voyage mais vu mon obstination, il a fini par accepter. Il est très possessif et jaloux mais je gère comme je peux.
Entre ma mère et lui ce n'est pas trop la grande amitié à cause de sa mère mais maman accepte mes choix et fait de son mieux pour toujours sourire quand il vient me prendre. On a fait pas mal de chemin et bien que je parte dans quelques semaines, j'aime Donald et je me battrai pour que cela reste ainsi.
Il est bientôt dix heures et je dois me rendre au magasin pour voir maman. Nous avons encore beaucoup pour mon voyage. Il y a le billet d'avion qui n'est pas encore payé et à côté de cela, je dois bien causer avec Donald. La sonnerie de mon téléphone me sort de mes pensées. Je souris en voyant le nom qui s'affiche à l'écran. C'est Adrianna, ma combie (meilleure amie) de tous les temps. Avec cette fille, j'ai fais de vraies folies car nous avons toutes grandie ici à New Bell
- Allo
- Yo ma belleuh on dit quoi?
- Ah ca c'est Drie hein ! elle parle comme une gangstar girl....
- Oui miss je suis la dis donc tu es où?
- Je suis à la maison. Ma mère le chômage veut ma mort même une nonce de boulot, il n'y a pas à l'horizon. Je dis hein affaire de foirage dans le pays ci la c'est grave.
- Assia la mère ! continue de persévérer ça va aller. Bon je suis entrain de sortir, je vais voir la mater. Préviens Naty qu'on sort ce soir et c'est moi qui vous invite. J'ai une nouvelle à vous annoncer.
- Humm Ange oooh c'est quoi comme ça mama ? Donald t'a déjà pomper le mouna (bébé) ?
- (Je sourie) cette fille est trop folle ...pardon préviens Nathy. Je passe vous prendre ce soir à 19 heures. On va à AKwa G3 for life.
G3 c'est notre code à nous. Ces deux filles sont comme des sœurs pour moi. A cause des échecs de mes trois tentatives de visa, quand j'ai lancé la 4ème, j'ai voulu garder cela pour moi. Elles ne savent donc pas que j'ai redemandé le visa. J'aimerai bien voir la tête de Nathy quand je vais leur annoncer la nouvelle ce soir autour d'un bon poisson braisé comme j'aime.
La moto me laisse devant le magasin de maman. Cette dernière me regarde énervée car je sais qu'elle m'attend depuis un moment.
Maman est très économe donc elle n'a pas d'assistance. Elle gère son magasin elle-même, C'est seulement quand elle voyage que je prends la relève. Elle dit toujours que le malheur de quelqu'un ne vient jamais de loin donc si elle tombe un jour elle préfère que ce soit par sa faute.
- Ah tu es déjà là ?
- Oui Ma'a.
- Ok
- Il faut que tu ailles voir madame Ngobille pour qu'elle prenne ton billet. Quand tu veux partir quand ?
- Euh, je ne sais pas Ma'a, peut-être dans trois semaines
- Akie trois semaines que tu vas faire quoi encore ici ? N'oublies pas que tu dois d'abord faire 6 mois de langue avant de t'inscrire pour ton master. Enzo a déjà tout fait.
- Ma'a, je dois aussi discuter avec Donald. Je ne peux pas partir comme sa comme une voleuse.
- Humm, fais juste attention Donald là. Je ne veux pas qu'il t'empêche de partir. Va donc à la banque retirer l'argent et va voir madame Ngobille afin qu'elle te prenne un billet Douala- New York. Tiens voici la carte.
Je prends la carte et je file à la banque. Je prends l'argent puis je vais voir Madame Ngobille. En chemin, j'appelle déjà pour savoir si elle est au bureau. Elle y est et me dit qu'elle m'attend. Je la retrouve donc et ensemble nous regardons les différentes options. On finit par trouver mon billet. Je pars dans exactement 3 semaines et 4 jours. J'appelle maman pour lui faire le compte rendu et direction la maison pour faire un peu de ménage et manger avant de sortir prendre les filles.
......Ngobock Adrianna .......
Hummm qu'est ce que Ange va encore nous sortir ce soir ? banalobanikasso la fille la avec ses divers... j'espère vraiment que c'est une bonne nouvelle parce quoi moi Ngobock je ne sors pas pour rien. J'appelle même d'abord Nathy pour lui dire de se préparer. Son téléphone sonne et elle décroche au bout de 3 minutes.
- Allo Nathy la belle qui est sur toi la ?
- Maff change même drie ? pardon je suis entrain de laver Junior qui a encore fait pipi sur lui
- Ekie ton fils la hein...
- Laisse seulement, je ne sais plus quoi faire de cet enfant. Sinon toi comment vont tes recherches de boulot?
- Où même ma mère ! rien de rien comme je te dis la ; bref je t'appelle parce que Ange veut qu'on sorte ce soir. Elle dit qu'elle veut nous annoncer une nouvelle.
- Ah bon ? eh c'est quoi ? Donald a encore fait quoi ?
J'éclate de rire moi-même, j'ai aussi pensé comme Nathy.
- Ah Nathy ! habille toi seulement et viens ici à 19 heures précises. Elle viendra nous chercher et
on saura.
- Ok je serai là que sauf ou bien.
Je m'habille rapido, j'ai pas eu de nouvelles de Donald aujourd'hui. Il doit être très occupé Do'o chéri ce n'est que le weekend qu'il se repose encore avec sa vipère de mère qui est tjrs dans les environs mais bon je l'appelle quand même pour lui dire que j'ai pris mon billet et que je pars dans trois semaines et aussi que je sors ce soir avec les filles. Je lance l'appelle mais sa sonne en vain sans réponse. Alors je décide de lui écrire un message.
<< cc slt choux t'es où? tjrs au taff? J'espere que tu vas bien ? j'ai pris mon billet today et je pars dans trois semaines et 4 jrs. J'aurais bien aimé te voir ce soir mais je vais annoncer la bonne nouvelle aux filles ce soir donc on va à la rue de la joie. Fais moi signe quand tu peux bzumy love>>
J'attends quelques minutes et il me répond :
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Orr mon Do'o d'amour. J'enfile vite mon jeans en relisant mon message. C'est avec les filles donc pas besoin de trop m'habiller et je veux être à l'aise. On ne sait jamais, avec ces deux folles-la, on peut se retrouver en boite.
Dix-neuf heures pile, je suis devant la maison de Drie et Nathy est déjà la. On se salue, on rit comme à l'accoutumée et on prend un taxi vite fait direction Akwa. On nous connait donc pas besoin de commander. On prend toujours la même chose, on se régale et on papote bien comme au bon vieux temps sous le rythme de Lady Ponce. Tout d'un coup, je lance dans l'air :
- J'ai eu le visa les filles.
Nathy qui secouait son popotin s'arrête subitement.
- Tu peux répéter ?
- J'ai eu le visa des states hier mes sœurs ! Votre sœur est une future Mbenguiste, je vais changer
vos vies mes chéries.
Je vois les larmes qui ruissellent sur les joues de Nathy. Cette dernière vient me prendre dans ses bras et me serre très très fort.
- Tu vas me manquer Ange weeeh je suis heureuse pour toi. Je suis tellement contente ! Tu vois ça a fini par payer. Weeh ma soeur pense à moi là-bas ohh anti tu vas voir Rihanna.
Mais Drie a l'air plus dégagée et moins triste que Nathy qui elle saute encore plus et crie comme une folle.
- Oooooooooooohhh, ma sœur part au state ! parlez encore new bell en haut ayoeeeeee atheeee je veux une autre Guinness.
La soirée se passa ainsi entre cris, pleurs, joie, boisson, poisson. On était heureuses et Drie s'éclipsa aux toilettes. Je restais donc avec Nathy, je ne l'avais pas appelée depuis 3 jours donc je profitais pour prendre de ses nouvelles.
......Drie.......
Je suis aux toilettes je ne pouvais pas digérer la nouvelle sans lancer mon plan d'attaque. Il faut battre le fer quand il est encore chaud, je lui envoie donc un message direct.
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