Chapitre 2 CHAPITRE 2

QUELQUES JOURS PLUS TARD

-Point de vue externe-

Pendant qu'ils sont en train de dormir, enlacés l'un contre l'autre, Manon est brutalement réveillée par l'envie de vomir. Elle se lève en hâte du lit et file directement dans les toilettes. Ouvre avec fracas le couvercle du pot et s'agrippe sur les bords de ce dernier pour vomir. Son mari, très inquiet, se lève pour la rejoindre. Nathan reste devant la porte et observe sa femme jusqu'à ce que cette dernière finisse et rince sa bouche. Elle retrouve son mari devant la porte et se blottit dans ses bras.

-Bébé, il faut que tu ailles à l'hôpital ! Voilà déjà quatre jours que ces vomissements durent. Sans compter les fièvres nocturnes que tu fais tous les jours. Déclare Nathan inquiet.

-Ce n'est rien de grave mon cœur ! Je pense qu'il s'agit d'un petit paludisme. Dit Manon pour calmer son homme.

-Et tes menstruations ? Tu les as vus ce mois-ci ?

- Euh, non ! Ça fait déjà deux mois hein.

-Et si c'était ce à quoi je pense ? Il demande en caressant les longs cheveux crépus de sa femme.

-Hum ! lâche de façon triviale Manon. Elle ne veut pas se précipiter à épouser l'idée de son mari. Car toutes les fois où elle l'a fait, elle a été déçue par les résultats du test de grossesse.

-Tu as encore les tests de grossesse dans le placard ?

Elle ne répond pas, car elle est perdue dans ses pensées. Nathan se détache d'elle pour aller chercher les tests de grossesse. N'ayant pas trouvé, il va la rejoindre dans le lit.

-On ira à l'hôpital à la première heure demain matin. Ce malaise a déjà trop duré. J'espère juste qu'il s'agira d'une grossesse, car j'avoue être fatigué de patienter. Le cœur en peine, Nathan conclut.

Manon a un pincement au cœur à l'écoute de cette phrase. Elle ne dit rien et tourne le visage vers le mur. Des larmes de douleur commencent à couler de ses yeux. Elle est vraiment frustrée. Elle ne comprend pas ce qui ne va pas avec elle, elle a consulté les plus grands gynécologues du pays et on n'a rien pu trouvé. Sa mère lui a concocté des potions traditionnelles qu'elle a bu en cachette, car son mari n'aime pas ces choses. Jusque là, elle n'a pas eu de résultats. Elle est allée avec sa mère consulter des guérisseurs de renommée dans son village, aucune amélioration favorable. Elle se demande ce qu'elle a pu faire au bon Dieu pour que ce dernier la punisse de la sorte. Elle qui s'était préservée pour l'homme qui l'épousera, comme ses parents le lui avaient recommandé. Elle n'a pas couché de gauche à droite comme certaines filles dans son entourage, pourquoi ce problème doit-il lui arriver ?

Elle a l'intention d'aller voir son pasteur demain, après qu'elle soit rentrée de l'hôpital. Ceci, peu importe le diagnostic que son gynécologue lui donnera. Elle a vraiment besoin d'un soutien spirituel, car elle n'en peut vraiment plus.

Nathan se rend compte que sa femme est trop éloigné de lui et qu'elle a trop duré dans cette position. Il la tire et essaye de tourner son visage vers lui. Elle résiste, car elle ne veut pas que son homme voit dans quel état elle est. Elle soulève sa main et essuie rapidement ses larmes avec le drap avant de se tourner vers lui. Nathan peut tout de suite remarquer qu'elle a pleuré, puisque ses yeux sont tout rouges. Aussi, son visage est tout triste.

-Qu'est de qu'il y a chérie ? Il demande.

Manon ne répond pas, son cœur est tellement meurtri qu'elle ne parvient pas à résister longtemps contre les pleurs. Elle se met à sangloter aussitôt, ce qui étonne son homme qui ne comprend rien du tout et se demande ce qui se passe.

-Bébé, qu'est ce qu'il y a ?

Elle ne répond pas, il décide de la laisser se calmer. Il la tire vers lui et la prend dans ses bras. Il sait que lorsqu'elle est dans cet état, ça ne sert à rien d'insister, car elle ne réagira pas. Il faut simplement attendre qu'elle se calme, ainsi elle pourra parler.

****

- Manon Bala-

Vous savez déjà qui je suis n'est-ce-pas ? Je suppose que oui, car mon Nathan vous a certainement parlé de moi. Mais il y a des informations que je vais devoir ajouter. Je suis issue d'une famille de classe moyenne. Mon père était enseignant de philosophie au lycée bilingue de Yaoundé, il est retraité maintenant. Ma mère quant à elle, est une couturière. Eh oui, je suis une fille Eton. Contrairement à tous les Eton, moi je suis très calme, douce et très posée, lol. Vous ne me croyez pas, je sais. Pourtant, c'est très vrai. Je suis née et j'ai grandi à Yaoundé au quartier Ahala.

Mes parents n'étant pas riches, nous n'avons pas toujours eu ce que tous les enfants de notre entourage avaient. Mais ce n'était pas un problème pour nous, car nos parents se battaient pour subvenir à nos besoins de première nécessité. J'ai un petit frère et une petite sœur. Claude et Thérèse, âgés respectivement de 23 ans et 20 ans. Oups, j'ai oublié de vous dire que moi-même j'ai 28 ans, pfff. J'ai trop de choses en tête dernièrement.

Clara et moi avions grandi ensemble, dans le même quartier. Contrairement à moi, elle est issue d'une famille pauvre. Son petit frère et elle ont été élevés par leur mère, car leur père est décédé lorsque celle-ci avait 12 ans. C'est ma best friend, elle est ma confidente, je partage tout avec elle. C'est une fille bien, je vous assure. Je l'aime de tout mon cœur, je donnerai tout pour elle.

Lorsque nous avons réussi le baccalauréat, nous avons intégré l'université de Yaoundé 1 ensemble. En fait, je vous explique, elle n'avait pas d'argent pour payer son inscription et autre, car sa mère lui avait demandé d'arrêter l'école, afin de pouvoir chercher un travail avec lequel elle aiderait sa famille. Elle m'avait fait part de la décision de sa mère avec les larmes aux yeux. J'avais des économies, comme toujours, j'ai décidé de payer sa pension et ses fournitures scolaires de première nécessité... Bref, puisque j'ai la main large, je l'ai toujours soutenu. C'est ça la véritable amitié, ne dit-on pas qu'on reconnaît les vrais amies dans le besoin ?

Nous fréquentons la même église. Les gens autour de moi sont tout le temps en train de me demander de me méfier de Clara. Mais je ne les écoute pas, ils sont juste jaloux, c'est tout. Je l'ai toujours soutenu dans les mauvaises conditions, j'ai toujours été là pour elle. Elle aussi d'ailleurs. Ça a toujours été vice versa. C'est vrai que financièrement et matériellement parlant, elle ne m'a presque jamais rien apporté. Ça ne me dérange pas en tout cas.

Lorsque j'étais en licence 3, j'ai composé le concours pour entrer dans une école d'architecture. Rien n'était sûr que j'allais réussir à ce concours, alors je continuais à partir à l'université en attendant les résultats.

Voici donc qu'un jour, j'avais fini de faire cours. Je me dirigeais vers l'amphithéâtre de Clara, pour aller la prendre afin que nous puissions aller manger et rentrer à la maison par la suite. Je savais qu'elle n'avait pas d'argent de poche ni de taxi, je ne pouvais donc pas me permettre de manger sans l'inviter, pire encore rentrer sans elle. Au fait, je divisais souvent l'argent de taxis que mes parents me donnaient par deux. Je parcourais une certaine distance à pied, afin qu'avec le reste de mon argent, Clara puisse elle aussi s'en sortir.

***

Nous avons donc fini de manger au restaurant de l'Université. Clara me dit par la suite qu'elle avait encore cours, je lui donnais un billet de 500 pour son transport et elle retourna à l'amphithéâtre.

Nette quand je voulais sortir du portail de l'université pour aller emprunter un taxi, une Lamborghini vint se garer devant moi. Je m'éloignais pour céder le passage au monsieur dans la voiture. Il klaxonna en regardant dans ma direction et me fit signe de la main de me rapprocher de lui. Je me tournais pour regarder derrière moi, croyant peut-être qu'il y avait des filles très stylées à qui il s'adressait. À priori, ce genre de mec n'est pas le style qui peut parler à une fille comme moi, même si c'est juste pour demander un renseignement. Contrairement aux autres filles de l'université, je n'étais pas du tout bien habillé. Pour un homme comme lui, mon apparence laissait à désirer. Néanmoins, j'étais quand-même propre et je portais un parfum bon marché. Le monsieur voyant que je perdais le temps et que j'hésitais à le rejoindre, klaxonna de nouveau en me faisant signe de sa main de venir.

-Salut demoiselle ! Dit-il d'une voix rauque, suave et imposante.

Mon Dieu, quel bel homme ! Dis-je en pensées. Je répondis timidement.

-J'aimerais savoir où se trouve le rectorat s'il te plaît ?

Je lui donnais brièvement l'itinéraire.

-Je ne suis pas du coin, donc je ne comprends rien à tout ce que tu dis. Si ça ne te dérange pas, tu peux entrer dans la voiture pour m'y accompagner.

Je me méfiais de cet homme, car tout ce qui brille n'est pas or. Il fait comment pour vivre au Cameroun et ne pas connaître le rectorat de l'université de Yaoundé 1 ? Bref, j'étais sur mes gardes, car j'avais entendu trop d'histoires bizarres sur les personnes comme lui ici dehors. Les mecs fortunés qui débarquent dans les universités pour chercher les jeunes filles, puis vont les sacrifier dans leurs loges. Alors, j'ai décidé de ne pas entrer dans sa voiture.

-Tu n'entres pas ma belle ? Le monsieur me demanda.

-Non, je ne peux pas. Veuillez vous renseignez chez quelqu'un d'autre.

-Tu te méfies c'est ça ? Il ajouta.

J'acquiesçai timidement, il sourit et sortit de son véhicule après s'être bien garé.

-Alors, allons-y à pieds. Il conclut.

Je n'aimais pas du tout sa façon de me regarder. Il me regardait comme si j'avais un truc bizarre sur mon visage et ça me faisait me sentir mal alaise.

Une fois au rectorat, il me remercia et demanda mon numéro de téléphone.

-Euh,... vous le voulez pourquoi ?Je bégayais presque.

-Je veux te revoir, tu es très jolie !

J'étais très gênée, je ne m'attendais pas vraiment à ça. Alors pour me débarrasser de lui, je le lui donnais rapidement avant de tourner les talons.

Une chose en a entraîné une autre et on commença à sortir ensemble. Au début, j'étais très sceptique, mais il a beaucoup ramé pour me faire céder et lui donner ma confiance. Je ne sais pas pourquoi, mais j'avais décidé de cacher cette information à Clara. Je ne ressentais pas le besoin et le désir de le lui faire savoir. C'est cinq mois plus tard que je décidai de le lui dire.

Contrairement à ce que je pensais de lui, j'ai découvert un homme bon, dur et très froid, mais un homme avec un grand cœur. C'est le seul homme que j'ai connu jusqu'ici, c'est mon monde, c'est mon tout. Je ne l'aime pas, mais je l'adore.

La même année, j'ai réussi à mon concours et j'ai obtenu ma licence en informatique. Nathan décida dorénavant de financer mes études. Bref, il avait commencé à prendre soin de moi et peu de temps après, il était allé voir mes parents. Deux ans plus tard, nous nous sommes mariés.

                         

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