Il avait l'air épuisé, mais c'était la fatigue superficielle de l'homme d'affaires contrarié, pas celle, dévastatrice, d'un père en deuil.
Le fracas de la porte d'entrée principale fit trembler les murs de la villa.
Ce n'était pas une entrée polie.
C'était une invasion.
Leo bondit de sa chaise, la fureur déformant ses traits.
"Qui ose..." commença-t-il en se ruant vers le grand hall.
Mais sa voix mourut dans sa gorge. Il se figea.
Le Roi Alpha de la Cité des Vents se tenait là, flanqué de sa garde d'élite.
Il ne portait pas de couronne, mais son aura était si impérieuse que l'air semblait se courber et crépiter autour de lui.
"Où est-elle ?" gronda mon père.
Sa voix était basse, terrifiante, évoquant le grondement souterrain qui précède un séisme.
Leo ajusta nerveusement sa veste, tentant désespérément de retrouver sa posture d'Alpha dominant.
Pourtant, face à la majesté brute de mon père, il ressemblait à un enfant déguisé en adulte.
"Je ne sais pas de quoi vous parlez," répondit Leo d'un ton glacial, bien que fragile. "Vous n'avez aucune autorité ici."
Pour toute réponse, mon père jeta une tablette aux pieds de Leo.
L'appareil glissa sur le marbre, l'écran affichant la photo déchirante de Cayden sous assistance respiratoire.
"Ma fille," articula mon père, détachant chaque syllabe comme une sentence. "Et mon petit-fils. Où sont-ils ?"
Patricia descendit les escaliers à cet instant, le visage tordu par le dédain.
"Encore cette histoire ?" siffla-t-elle. "Cette fille n'est personne. Une vagabonde que mon fils a eu la pitié d'héberger. Et ce bâtard..."
"Silence !" rugit mon père.
Le son fit vibrer les vitres dans leurs cadres.
Patricia recula d'un pas, la peur l'emportant malgré elle sur son arrogance.
Leo ramassa la tablette. Il fixa la photo un instant, puis releva les yeux vers mon père.
"C'est une erreur," déclara-t-il, un sourire méprisant étirant ses lèvres. "Mia n'est pas votre fille. Elle n'a aucune famille. Elle me l'a dit elle-même."
"Elle a fui pour vous protéger de moi," répliqua mon père, la douleur perçant enfin sous la colère volcanique. "Elle a renoncé à son titre pour être avec un homme qu'elle croyait digne. Je vois maintenant qu'elle a commis une erreur fatale."
Leo éclata de rire. Un rire sec, incrédule.
"C'est ridicule. Mia est une manipulatrice. C'est encore un de ses jeux tordus pour me faire culpabiliser. Elle a engagé des acteurs ? Elle a monté ce scénario ?"
Il sortit son téléphone et brandit mon message d'adieu comme une preuve irréfutable.
"Regardez," cracha Leo avec dégoût. "'Je quitte ton monde'. Elle joue la victime dramatique. Elle reviendra en rampant quand elle aura besoin d'argent."
J'ai vu les veines saillir sur le cou de mon père, pulsant au rythme de sa rage contenue.
"Si elle ne revient pas," dit-il d'une voix dangereusement douce, "je raserai cette maison, pierre par pierre, jusqu'à ce que je trouve ses os."
"C'est assez !" hurla Patricia. "Sortez de chez moi ! Ce sont nos affaires privées. Ce gamin est un sang-mêlé sans importance et sa mère est une ratée !"
Mon père ignora ses cris et planta son regard droit dans celui de Leo.
"Tu ne sais vraiment pas ce que tu as perdu, n'est-ce pas ?"
"J'ai perdu un poids mort," répliqua Leo, son arrogance intacte, aveugle à la vérité qui le fixait en face.
Je voulais hurler.
Je voulais le secouer de toutes mes forces.
Son aveuglement n'était pas seulement de la stupidité ; c'était un choix délibéré.
Il choisissait de croire le mensonge parce que la vérité était trop lourde à porter.
Mais la vérité n'a que faire de ce que l'on peut porter.
Elle écrase tout sur son passage.