C'est Adrien et Chloé, pressés contre le mur de briques. Ses mains sont sous sa robe courte, ses gémissements résonnant dans l'espace étroit. C'était une autre violation de l'Omertà. Le code ne consistait pas seulement à ne pas moucharder à la police. Il s'agissait de discrétion. D'honneur. De ne pas se comporter comme un vulgaire voyou dans une ruelle, surtout pas avec sa maîtresse quand votre fiancée est juste là. Il n'était pas seulement un connard infidèle ; il embarrassait le nom de la famille, montrant une faiblesse et un manque de contrôle sur lesquels ses ennemis se jetteraient.
La vue me remplit d'un dégoût froid et pur. Il ne reste plus de jalousie, seulement un profond sentiment de répulsion.
Juste au moment où notre taxi arrive, la berline noire d'Adrien s'arrête en crissant à côté. Il sort en titubant de la ruelle, boutonnant sa chemise, le visage rouge. Chloé est juste derrière lui, un air suffisant sur le visage.
« Besoin d'un lift ? » demande-t-il, sa voix désinvolte, comme si je ne venais pas de le voir souiller notre avenir de la manière la plus humiliante possible.
Contre toute attente, et malgré le regard silencieux et furieux de Maëlle, je dis oui. Je ne sais pas pourquoi. Peut-être avais-je besoin d'une dernière, ultime poussée. Un dernier regard dans l'abîme avant de sauter.
Le trajet en voiture est lourd de tension. Chloé, suffisante sur le siège passager, parle de son nouveau partenariat de marque – une entreprise que je sais financée par l'argent sale de la famille Dubois. Adrien ne cesse de me regarder dans le rétroviseur, essayant de jauger ma réaction. Il a même l'audace de me poser des questions sur notre passé.
« Alors », dit-il, la voix légère. « On était comment, nous deux ? »
Avant que je puisse répondre, le monde explose.
Il donne un coup de volant sec. La voiture dérape, les pneus crissent, et percute un camion garé dans un fracas assourdissant de métal. Ce n'était pas un accident. C'était un message. Une démonstration pour une famille rivale, et nous étions les accessoires. Ma tête heurte la vitre. Une douleur, aiguë et aveuglante, me traverse le bras. Le monde devient flou.
À travers le bourdonnement dans mes oreilles, j'entends des sirènes. Les gyrophares d'une ambulance peignent la scène de flashs crus et terrifiants. Les hommes de main d'Adrien sont déjà là, se matérialisant de l'ombre comme des spectres. Son pouvoir absolu en pleine démonstration.
Un ambulancier se penche dans la voiture. « Qui est le plus gravement blessé ? »
Je sens le goût du sang. « Mon bras », j'arrive à dire. « Je crois qu'il est cassé. Et ma tête... »
Mais Adrien pointe déjà Chloé, qui sanglote hystériquement à propos d'une égratignure sur sa jambe.
« Elle », dit-il, sa voix froide et autoritaire. « Prenez-la en premier. Elle doit partir maintenant. »
Il choisit sa relation, sa maîtresse, plutôt que sa fiancée, la future mère de l'héritier. Il le fait devant ses hommes, devant des inconnus. C'est l'humiliation publique ultime, une déclaration de mon inutilité.
Ils sortent Chloé de la voiture, l'attachant sur un brancard alors qu'elle continue de se lamenter.
Je suis laissée seule dans le métal tordu, la douleur dans mon bras un élancement sourd comparé au nœud froid et mort qui se forme dans mon âme. Ils m'ont abandonnée. La famille m'a abandonnée.
Alors que l'ambulance s'éloigne, sa sirène hurlant dans la nuit, je sais avec une certitude glaçante que tout ce qui restait entre Adrien et moi est maintenant officiellement terminé.
C'est mort. Enterré dans l'épave de cette voiture.