Point de vue d'Éléonore :
Cette nuit-là, je me suis réfugiée dans le monde des humains. J'ai trouvé le bar le plus bruyant et le plus sombre que j'ai pu et j'ai essayé de noyer l'agonie de mon âme dans du whisky bon marché. La brûlure de l'alcool était une distraction bienvenue à la douleur creuse dans ma poitrine.
Après mon quatrième verre, mon estomac s'est rebellé. J'ai titubé jusqu'aux toilettes, mon corps se soulevant jusqu'à ce qu'il ne reste plus rien en moi que de l'amertume.
J'ai poussé la porte, la tête me tournant, le monde basculant violemment. Mes jambes ont flanché et j'ai basculé en avant, me préparant à l'impact du sol collant.
Il n'est jamais venu.
Un bras d'acier s'est refermé sur ma taille, me stabilisant avec une force sans effort. J'ai levé les yeux, ma vision floue, et j'ai plongé mon regard dans la paire d'yeux la plus intense que j'aie jamais vue. C'était lui. Damien, l'Alpha Suprême de la meute de la Lune de Sang.
Sa voix était un grondement sourd, empreint d'une autorité qui vibrait jusqu'à la moelle de mes os. « Où est mon Bêta ? »
Il demandait après Bastien. L'homme qui était censé être avec moi.
Mon esprit ivre a enregistré autre chose. Une odeur. Elle a percé l'odeur de bière rassie et de fumée du bar, submergeant mes sens. C'était l'odeur d'une tempête de neige à venir et le parfum vif et pur des pins dans une forêt gelée. Ma louve intérieure, silencieuse et endormie depuis si longtemps, s'est agitée en moi, laissant échapper un gémissement doux et désespéré de désir.
Poussée par le whisky et un cœur brisé, une impulsion téméraire a pris le dessus. J'ai enroulé mes bras autour de son cou épais, mes doigts s'emmêlant dans les cheveux de sa nuque.
« Il ne veut plus de moi », ai-je bredouillé, mes lèvres frôlant son oreille. « Alpha, est-ce que vous me voulez, pour cette nuit ? »
Ses yeux sombres se sont enflammés, une tempête se levant dans leurs profondeurs. J'ai senti un frisson parcourir le corps puissant pressé contre le mien. Un seul mot a résonné dans mon esprit, un rugissement possessif et primal qui n'était pas le mien.
*À moi !*
Le silence s'est étiré, et une vague d'humiliation m'a submergée. Je venais de m'offrir au loup-garou le plus puissant du continent, et il me rejetait. J'ai commencé à retirer mes bras, mes joues brûlantes.
Puis, sa voix profonde a brisé le silence. « D'accord. »
Mais avant que je puisse réagir, il m'a soulevée du sol, me portant hors du bar comme si je ne pesais rien. Dès que nous fûmes dans sa voiture, son contrôle vola en éclats. Sa bouche s'est écrasée sur la mienne dans un baiser qui était pure possession, une marque de propriété.
À l'instant où nos lèvres se sont rencontrées, une secousse, aussi vive et puissante qu'un éclair, a traversé tout mon corps. Le Frisson Électrique. L'attraction entre nous était une force physique, une marée irrésistible qui nous entraînait. Des années de solitude refoulée et une nuit de trahison fraîche ont éclaté en une tempête de besoin désespéré.
Cette nuit-là, je me suis donnée à l'Alpha Suprême, un homme qui était mon partenaire prédestiné.