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Le vent s'engouffrait dans la clairière, soulevant les feuilles mortes et les tourbillons de poussière qui dansaient sous la lumière du matin. Le froid mordait la peau de Selena, mais ce n'était rien comparé au vide glacial qui s'était installé dans sa poitrine.
Cela faisait plusieurs jours qu'elle avait quitté la demeure de son père pour s'isoler dans la petite cabane qu'elle utilisait parfois pour fuir la pression de la meute. Ici, personne ne viendrait la chercher. Personne ne voudrait la voir.
Ses mains tremblaient alors qu'elle tentait de porter la tasse de thé chaud à ses lèvres. Elle n'avait presque rien avalé depuis cette nuit fatale, et son corps commençait à en subir les conséquences. Son appétit était inexistant, et chaque odeur trop forte lui donnait la nausée.
Une vague de malaise la prit soudainement, et elle eut à peine le temps de se lever avant que son estomac ne se retourne. Elle tituba hors de la cabane et s'effondra sur les genoux, vomissant les maigres restes de son dernier repas.
Le spasme laissa place à une faiblesse inhabituelle.
Son souffle était court, sa tête bourdonnante.
Quelque chose n'allait pas.
Une peur sourde naquit en elle, se répandant comme du poison dans ses veines.
- Non...
Ce n'était pas possible.
Ses doigts se crispèrent dans la terre humide. Son esprit refusa d'accepter l'évidence, mais son corps, lui, lui hurlait la vérité.
Elle porta une main tremblante à son ventre.
Un frisson la parcourut de la tête aux pieds.
Elle savait.
Même sans test, même sans confirmation médicale. Elle le savait au plus profond d'elle-même.
Elle portait l'enfant de Ronan.
La panique l'envahit si violemment qu'elle eut l'impression de suffoquer.
Elle n'était pas prête à ça.
Comment pouvait-elle l'être ?
La tradition de leur meute était claire : un enfant né d'un couple non uni par le lien du destin était vu comme une faiblesse, une honte. Son propre père ne supporterait jamais un tel scandale.
Et Ronan...
Ronan, qui l'avait rejetée avec une froideur impitoyable.
Un sanglot monta dans sa gorge, mais elle le ravala.
Elle ne pouvait pas rester là, à se laisser dévorer par la peur.
Elle devait lui parler.
***
Les quartiers des guerriers étaient animés, remplis de loups en plein entraînement matinal. Selena se fraya un chemin parmi eux, ignorant les regards curieux et les murmures à son passage.
Elle savait qu'elle était devenue un sujet de conversation depuis la nuit du bal. L'humiliation publique qu'elle avait subie n'était pas passée inaperçue.
Mais aujourd'hui, elle n'en avait rien à faire.
Son seul objectif était de trouver Ronan.
Elle le repéra rapidement près de l'arène d'entraînement, torse nu, son corps couvert d'une fine couche de sueur alors qu'il échangeait des coups avec un autre guerrier.
Son cœur se serra malgré elle.
Il était si fort, si imposant... et pourtant, il avait choisi de l'abandonner.
Elle attendit qu'il termine son combat, les poings serrés, puis s'approcha de lui avec détermination.
- Ronan.
Il se retourna lentement, essuyant la sueur sur son front.
Son expression se referma instantanément en la voyant.
- Qu'est-ce que tu veux ?
Son ton était sec, tranchant comme une lame.
Elle inspira profondément, essayant de calmer les battements affolés de son cœur.
- Il faut qu'on parle.
Il haussa un sourcil, visiblement agacé.
- Je croyais avoir été clair, Selena. Il n'y a rien à dire entre nous.
- C'est important, insista-t-elle.
- Rien de ce que tu as à dire ne m'intéresse.
Il se détourna, prêt à partir, mais elle attrapa son bras.
- Ronan, s'il te plaît.
Il s'arrêta, la regardant enfin dans les yeux.
Son regard était froid, dénué de toute émotion.
- Je t'ai dit de partir.
Son cœur se brisa une fois de plus.
- Alors c'est tout ? Tu comptes juste faire comme si rien ne s'était jamais passé ?
- C'est exactement ça.
Elle recula, dévastée.
Il ne lui laissait aucune chance.
Il n'avait jamais eu l'intention d'écouter.
Elle baissa les yeux, mordant l'intérieur de sa joue pour ne pas laisser les larmes couler.
- Très bien.
Sa voix était tremblante, mais elle se força à ne pas vaciller.
Sans un mot de plus, elle tourna les talons et partit.
Cette fois, elle savait qu'elle ne reviendrait pas.
***
Les rumeurs couraient vite au sein de la meute.
À peine Selena avait-elle quitté le terrain d'entraînement qu'elle sentait déjà les regards sur elle. Des chuchotements s'élevaient dès qu'elle passait à proximité d'un groupe de loups.
Elle essaya de les ignorer, de garder la tête haute, mais une partie d'elle savait déjà de quoi il retournait.
Son absence prolongée, son teint pâle, ses allers-retours discrets...
Certains avaient compris avant même qu'elle ne l'accepte elle-même.
Elle rentra au domaine familial en serrant les poings, espérant pouvoir se réfugier dans sa chambre avant d'avoir à affronter qui que ce soit.
Mais en franchissant le seuil, elle se figea.
Son père était là, debout au centre du grand hall, les bras croisés sur sa poitrine massive.
Son regard perçant la scruta un instant, et un silence pesant s'installa.
- Selena, commença-t-il d'une voix dure.
Elle sentit son souffle se bloquer.
- Il y a quelque chose que tu veux me dire ?
Le vent soufflait en rafales, comme un présage du chaos à venir. Selena se tenait au sommet de la colline qui dominait la vallée où se trouvait la maison familiale, les yeux rivés sur l'horizon. L'air était chargé d'une tension étrange, un frisson d'appréhension qui parcourait la forêt. La meute était en alerte, prête à réagir à la moindre menace. Mais Selena sentait au fond d'elle que quelque chose de plus terrible que ce qu'ils redoutaient se profilait.
Elle serra les poings, un pressentiment glacé se glissant dans ses veines. La nuit tombait lentement, enveloppant le paysage d'une ombre inquiétante. Elle entendit des bruits au loin, des bruits qui n'étaient pas naturels. Des bruits de pas lourds, presque synchronisés, de plus en plus proches.
- Selena.
La voix de son père la fit sursauter. Elle se tourna vivement pour voir l'Alpha arriver, l'air grave. Son visage, normalement marqué par la confiance et la force, était aujourd'hui fermé, ses sourcils froncés, son regard distant.
- Père, qu'est-ce qui se passe ? Pourquoi tout le monde est-il si tendu ?
Il la regarda d'un air presque désespéré.
- Un danger imminent. L'Alpha de la meute voisine... il prépare une attaque.
Son cœur fit un bond dans sa poitrine.
- Mais pourquoi ? N'avons-nous pas toujours été alliés ?
- C'est ce que je croyais aussi. Mais il y a des trahisons qui ne se voient pas
venir.