Chapitre 5 5

Un silence stupéfait tomba sur le stade. Les regards autrefois moqueurs se transformèrent en expressions d'incrédulité. Ursule , haletante et tremblante, ne réalisait pas encore ce qu'elle venait d'accomplir. Elle avait remporté l'épreuve. Elle, l'humaine sous-estimée, avait battu des loups-garous à leur propre jeu.

Elias fut le premier à la rejoindre, un large sourire éclairant son visage. « Je te l'avais dit ! » s'exclama-t-il en la serrant dans ses bras. « Tu es incroyable, Ursule ! »

Elle rit, encore sous le choc, son corps vibrant d'adrénaline. « Je... je n'arrive pas à y croire. Je l'ai fait. »

Autour d'eux, les autres étudiants murmuraient entre eux, certains semblant encore incapable de comprendre ce qui venait de se passer. Quelques-uns la regardaient avec un nouveau respect, tandis que d'autres étaient visiblement agacés par cette victoire inattendue.

Mais parmi eux, une silhouette se démarquait. Un homme, grand et imposant, observait Ursule de loin. Ses yeux perçaient à travers la foule, fixés sur elle avec une intensité presque palpable. C'était un Alpha, l'un des plus puissants du campus, et pour la première fois, il semblait avoir trouvé un intérêt particulier dans cette jeune étudiante humaine.

Ursule ne le remarqua pas, trop absorbée par les acclamations de ses camarades. Mais ce regard ne la quitterait plus. L'Alpha, un certain Kael, savait que cette compétition n'était qu'un début. Il avait vu quelque chose en elle, quelque chose que personne d'autre n'avait encore découvert. Et il comptait bien garder un œil sur elle.

Le campus était immense, mais malgré sa taille, Ursule ne pouvait échapper à l'attention que sa victoire avait attirée. Chaque regard semblait peser sur elle, chaque murmure lui donnait l'impression que tout le monde parlait d'elle. Depuis la compétition sportive, elle avait senti un changement. Ses camarades, autrefois distants ou méprisants, semblaient soudain fascinés par cette humaine qui avait réussi l'impensable. Pourtant, ce n'était pas une fascination bienveillante. L'admiration se mêlait souvent à la jalousie, et avec cela, le mépris ne semblait jamais bien loin.

Ce matin-là, alors qu'elle traversait le campus pour se rendre à la bibliothèque, Ursule sentit quelque chose de différent dans l'air. Les rires derrière elle étaient plus forts que d'habitude, les regards plus insistants. Elle se retourna, cherchant la source de cette agitation, et aperçut un groupe d'étudiants rassemblés non loin. Leurs vêtements impeccables, leur port de tête hautain... C'étaient les héritiers, ceux qui étaient nés dans ce monde privilégié des loups-garous. Ursule les reconnaissait : les riches, les puissants, ceux qui n'avaient jamais eu à prouver quoi que ce soit. Ils lui jetaient des regards méprisants, chuchotant entre eux.

« C'est elle ? » lança une voix perçante, assez fort pour qu'Ursule l'entende. « L'humaine qui croit qu'elle peut nous surpasser ? »

Elle sentit une montée de chaleur dans son visage, son cœur battant plus vite. Elle avait espéré que, après sa victoire, les autres finiraient par l'accepter. Mais ce n'était pas le cas. Elle avait éveillé quelque chose de beaucoup plus dangereux : la jalousie, peut-être même la haine. Ces étudiants riches, habitués à dominer, ne supportaient pas l'idée qu'une humaine ait pu les battre.

Ursule baissa les yeux, accélérant le pas. Elle savait qu'il valait mieux ignorer leurs provocations, mais elle sentait leur présence se rapprocher. Des rires plus près, des pas plus rapides derrière elle. Soudain, un coup d'épaule violent la fit trébucher. Elle se rattrapa de justesse, mais son sac tomba au sol, ses livres éparpillés autour d'elle.

« Alors, la petite humaine, on a du mal à garder l'équilibre ? » ricana une voix moqueuse. Un jeune homme, grand et élancé, la regardait de haut avec un sourire cruel. À ses côtés, ses amis riaient, tous arborant la même arrogance, celle de ceux qui n'avaient jamais connu la défaite.

Ursule tenta de garder son calme, rassemblant rapidement ses affaires sans dire un mot. Son cœur battait à tout rompre, mais elle refusait de leur montrer qu'elle était effrayée. Elle savait que s'ils sentaient la moindre faiblesse, cela ne ferait qu'empirer les choses.

« Pourquoi tu te caches, hein ? » lança une autre voix féminine. « Tu penses que parce que tu as gagné une stupide épreuve, tu es l'une des nôtres ? »

Ursule serra les dents. Elle n'avait jamais voulu être comme eux. Tout ce qu'elle voulait, c'était apprendre, profiter de cette opportunité inespérée. Mais ici, rien n'était simple. Les étudiants comme eux ne voulaient pas de son succès, encore moins de sa présence. Et maintenant, ils la harcelaient, comme des prédateurs jouant avec leur proie.

« Allez, dis quelque chose. » Le jeune homme fit un pas en avant, se penchant vers elle, ses yeux brillants de malice. « Ou peut-être que tu ne sais même pas comment t'adresser à des gens comme nous ? »

Ursule releva la tête, cherchant le courage dans le fond d'elle-même. « Je n'ai rien à vous dire. »

Le silence qui suivit sa réponse fut lourd, chargé de tension. Puis, l'un des garçons éclata de rire, suivi rapidement par les autres. Ils étaient plus nombreux, plus forts, et ils le savaient. Pour eux, Ursule n'était rien d'autre qu'un jeu.

Alors qu'ils semblaient prêts à pousser leur humiliation plus loin, quelque chose changea dans l'air. Un mouvement, à peine perceptible, se produisit derrière eux. L'atmosphère autour d'eux devint plus lourde, plus tendue. L'un des jeunes hommes fronça les sourcils, se retournant rapidement, comme s'il avait senti une présence invisible.

Derrière eux, à l'ombre d'un arbre massif, un homme se tenait, calme et immobile. Il n'avait pas bougé, mais son regard intense, perçant, était fixé sur eux. C'était un Alpha, cela ne faisait aucun doute. Sa stature imposante, sa manière de se tenir... Tout chez lui exsudait une autorité naturelle, une force brute qui n'avait pas besoin de mots pour être respectée.

Les étudiants riches échangèrent des regards nerveux. Ils ne connaissaient pas cet homme, mais quelque chose dans son attitude les mit mal à l'aise. Sans un mot, ils reculèrent, s'éloignant d'Ursule . L'un d'eux murmura quelque chose à voix basse, puis ils tournèrent les talons, disparaissant aussi rapidement qu'ils étaient venus.

Ursule resta figée un instant, son cœur battant encore à toute vitesse. Elle releva les yeux vers l'homme qui se tenait toujours à distance. Son visage était inexpressif, presque impassible, mais ses yeux... Ses yeux semblaient la sonder, comme s'ils cherchaient à comprendre quelque chose qu'elle-même ne saisissait pas encore. Puis, sans un mot, il tourna les talons et s'éloigna, disparaissant dans les ombres du campus.

Elle resta là, confuse, encore sous le choc de ce qui venait de se passer. Pourquoi cet Alpha était-il intervenu ? Qui était-il, et pourquoi l'avait-il aidée ? Elle ne l'avait jamais vu avant aujourd'hui, et pourtant, il avait pris le risque de s'opposer à ces héritiers pour elle.

Alors qu'elle ramassait ses affaires, Ursule sentit un mélange d'émotions la submerger. Gratitude, soulagement, mais aussi une nouvelle forme de peur. Si un Alpha avait jugé nécessaire d'intervenir, cela signifiait que les choses allaient bien au-delà d'un simple incident de harcèlement. Ce monde, celui des loups-garous, était rempli de règles et de hiérarchies qu'elle ne comprenait pas encore. Et maintenant, elle réalisait que sa présence ici ne passait pas inaperçue.

De retour dans sa chambre, Ursule ne pouvait s'empêcher de repenser à l'Alpha. Qui était-il ? Pourquoi s'intéressait-il à elle ? Elle avait entendu des histoires sur les Alphas, ces êtres puissants qui dirigeaient les meutes avec une poigne de fer. Ils étaient rares, inaccessibles, et pourtant, elle en avait croisé un. Et ce n'était pas la première fois qu'elle sentait cette présence mystérieuse autour d'elle.

Le soir, alors qu'elle se préparait à se coucher, un sentiment de malaise l'envahit. Le campus lui semblait différent, presque oppressant. Chaque ombre, chaque recoin semblait dissimuler un secret. Elle n'était pas une simple étudiante ici, elle le comprenait maintenant. Quelque chose, ou quelqu'un, avait décidé qu'elle méritait d'être protégée. Mais pourquoi ?

Tandis qu'elle éteignait la lumière, elle se promit de découvrir ce qui se passait réellement. Ce campus regorgeait de mystères, et elle était bien déterminée à ne pas rester dans l'ignorance. L'intervention de cet Alpha n'avait fait que renforcer sa détermination. S'il y avait des règles non dites, elle les apprendrait. S'il y avait des dangers qu'elle ne comprenait pas encore, elle les affronterait.

Ursule savait que ce n'était que le début. Le harcèlement, les regards méprisants... tout cela n'était que la surface. Mais derrière cette façade se cachait quelque chose de bien plus grand, et elle devait maintenant être prête à faire face à ce qui l'attendait.

La bibliothèque était silencieuse, une atmosphère studieuse régnant parmi les étudiants qui cherchaient à maîtriser les complexités des cours. Ursule feuilletait un livre volumineux, son esprit constamment attiré par des questions qu'elle n'avait pas posées jusque-là. Depuis l'incident avec les étudiants riches et l'intervention de cet Alpha mystérieux, elle avait cette impression persistante qu'il y avait bien plus que ce que l'on lui montrait. Ses cours lui fournissaient une vision générale des traditions des loups-garous, mais jamais on ne parlait en détail de leur hiérarchie, ni de leurs dirigeants. Il semblait que ce sujet était réservé à ceux qui étaient nés dans ce monde, à ceux qui n'avaient pas besoin de poser de questions.