Dans un lointain village de Ruuga, niché au cœur de la savane africaine, vivait une jeune fille prénommée Rhilane. Fille unique de ses parents, elle était un joyau rare, éblouissante d'amour pour le savoir. Elle fréquentait une école primaire privée à Kimbourg, où elle brillait de mille feux. Élève exemplaire, dotée d'un esprit d'une vivacité troublante, elle captivait tant ses camarades que ses maîtres par son éloquence, son intelligence et la grâce innée de son comportement. Chaque mot qu'elle prononçait, chaque idée qu'elle exprimait, semblait imprégné d'un éclat surnaturel.
À peine âgée de huit ans, Rhilane avait déjà franchi plusieurs classes, tant son intelligence surpassait la norme. Elle s'apprêtait à intégrer le cours moyen deuxième année, un fait rare et admiré dans son village. Mais alors que l'avenir s'ouvrait devant elle comme une fleur au soleil, le destin, cruel et imprévisible, frappa sa famille en plein cœur.
Un soir, alors que le vent soufflait doucement sur les collines de Ruuga, une tragédie s'abattit. Son père, Kerlin, homme généreux, bienveillant, directeur respecté d'une école publique à Lèpre, une ville située à soixante kilomètres de Ruuga, fut victime d'un terrible accident. Alors qu'il rentrait de son travail aux alentours de quinze heures, un véhicule le heurta violemment. Les secours, alertés en urgence, le transportèrent vers l'hôpital régional de Lèpre. Malheureusement, Kerlin ne survécut pas au trajet. Il rendit l'âme dans le taxi qui le conduisait à l'hôpital.
Les secouristes, bouleversés, identifièrent la victime grâce à ses papiers d'identité. Ils contactèrent aussitôt ses collègues et informèrent sa famille. L'un de ses collègues, ému jusqu'aux larmes, arriva à l'hôpital et constata avec horreur la véracité du drame. Sans tarder, il demanda que le corps soit transféré à la morgue, le temps de prévenir la famille et de permettre aux proches de faire leur deuil dignement.
Ce collègue loyal enfourcha sa moto, le cœur en miettes, et prit la route vers Ruuga. À son arrivée, il trouva les membres de la famille réunis sous le grand manguier, dans la cour du frère aîné de Kerlin, Swalking. L'ambiance était empreinte de joie et de partage. Les enfants jouaient, les anciens évoquaient souvenirs et sagesses, tandis que le soleil déclinait dans une lumière dorée.
Le collègue fut touché par cette scène de paix familiale. Il salua poliment l'assemblée, refusa gentiment la chaise qu'on lui proposait, prétextant l'urgence de sa mission. Il décida de ne pas troubler cette harmonie avec une nouvelle aussi funeste. Il s'éloigna avec Swalking, homme droit et respecté malgré l'ascendant de sa femme Zhaline. Derrière la maison traditionnelle en terre cuite, à l'abri des regards, il lui confia la terrible vérité.
- Cher Swalking, dit-il la voix tremblante, ma venue ici n'était pas prévue. Ce qui m'amène est une douleur immense à porter. Je t'en supplie, sois fort. Ton frère Kerlin a été victime d'un accident alors qu'il rentrait de son travail. Il a été transporté d'urgence à l'hôpital de Lèpre... mais il n'a pas survécu au trajet. Il est parti.
Swalking chancela sous le choc, mais respecta la demande de discrétion de son interlocuteur. Le collègue alla ensuite trouver Astrale, l'épouse de Kerlin, et lui révéla la nouvelle avec la même prudence. Hélas, la douleur fut trop forte. Astrale hurla, un cri de désespoir qui fendit l'air comme un éclair dans un ciel serein. Tous reconnurent sa voix. Le silence s'abattit sur la cour. Les jeux cessèrent, les conversations s'éteignirent. Le rassemblement joyeux bascula dans l'inquiétude.
Sans donner d'explication, le trio – Swalking, Astrale et le collègue – quitta discrètement le lieu pour rejoindre l'hôpital. Les autres, stupéfaits, devinrent muets, figés dans un pressentiment douloureux.
Ainsi commença le long chemin du deuil pour la famille de Rhilane, cette enfant prodige à qui le destin venait d'arracher son pilier. Mais c'est aussi dans cette douleur que germera, peut-être, la grandeur d'une âme appelée à briller plus fort encore.
Ceci est l'histoire de Rhilane, et ce n'est que le commencement.